Chapitre 9 - Héléna

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La journée d'Héléna avait pourtant bien commencé

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La journée d'Héléna avait pourtant bien commencé. Le restaurant fut relativement calme, lui accordant quelques minutes de répits entre deux services. L'heure fatidique approchait à grand pas. Ce soir, ils se jetteraient tous deux dans la gueule du loup. La douceur du tissu lui arracha un abject frisson. Elle ne se souvenait pas de la dernière fois où elle avait eu l'occasion de revêtir un vêtement d'une telle qualité.

Elle inspira longuement alors que la naissance de ses doigts traçait d'une lenteur démesurée les contours des broderies cousues à la main par les Sœurs de la Lune. Les Religieuses vivaient dans un monastère à l'allure moyenâgeuse dans les contrées qui bordaient les côtes, à la limite entre l'immensité des abysses de l'océan et les profondeurs des forêts mystérieuses. Recluses et isolées du monde extérieur depuis la bataille sanglante menée par les ancêtres des Seren contre les envahisseurs de la nuit, les Religieuses considéraient la nature comme une déesse dont les bienfaits cesseraient une fois la croyance anémiée.

Sa silhouette pastelle, élancée et mince se reflétant dans un miroir victorien aux pieds de lion, la rendait étrangement nerveuse. Elle ajusta les dentelles soigneusement travaillées sur ses épaules, camouflant sa marque de naissance. Les voilages de sa robe étaient légers comme une brise d'été. Ils cascadaient le long de ses jambes jusqu'à venir caresser ses orteils, semblables à une vague salée qui s'enchâssait sur la plage pour aller chatouiller ses pieds enfoncés dans le sable fin. Héléna ne se reconnaissait pas. Cela la changeait grandement de ses pantalons troués et de ses pulls trop larges. Elle franchit le seuil de la chambre d'un pas mal assuré, quittant avec appréhension la salle d'eau où elle s'était réfugiée.

- Qu'est-ce que tu en penses ? demanda-t-elle à son complice après s'être raclée la gorge pour éclaircir sa voix.

Teïlo enfilait une veste de costard bleu marine fabriquée sur mesure, qu'il était parti chercher chez un tailleur de luxe dans la matinée. Ses cheveux châtains, autrefois désordonnées étaient parfaitement ciselés pour l'occasion. Il les avait soigneusement plaqué en arrière. Une mine stupéfaite déformait curieusement les traits de son visage quand il se retourna vers son invitée. Les yeux exorbités, il la dévisagea de haut en bas sans aucune discrétion, peu certain de reconnaître l'orpheline qui lui faisait désormais face.

- Q-quoi ? Je l'ai mis à l'envers, s'affola-t-elle devant l'allure ahurie de son nouvel ami.

Elle inspecta avec attention la robe d'un sublime rose poudré qui recouvrait son corps, convaincue de l'avoir enfilé dans le bon sens, cette fois-ci... Le décolleté soulignait sa poitrine avec habileté, ses cheveux clairs délayés dans une large tresse caressaient délicieusement son dos dénudé. Héléna ressemblait à une déesse. Il ne lui manquait plus qu'une couronne de laurier et une armada de gladiateurs en armures dorées pour faire d'elle une divinité grec.

- Non, rigola celui-ci, tu es magnifique Héléna.

Une fois sa capuche vêtue, le Corbeau débordait d'une confiance en lui qui glacerait le sang de n'importe quel être humain. Le corps et l'esprit d'Héléna se partageait constamment entre l'oiseau noir et son ascendance d'orpheline des astres, comme si deux personnes distinctes cohabitaient en toute normalité. Elle préférait mille fois se terrer dans un trou de souris plutôt que de confronter sa réflexion, l'obligeant alors à accepter son héritage et le funeste destin qui l'attendait.

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