Chapitre 5

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Partie Cinq

Il lui faut quinze minutes pour réaliser que Mycroft ne revient pas. Elle a réajusté ses vêtements froissés, lissé le dessus de lit, posé sa chemise, sa cravate et son gilet sur la commode près du miroir, et s'est assise, attendant, regardant fixement le papier peint à motifs. A chaque instant, la prise de conscience s'installe lourdement dans son ventre. Elle se sent coupable et honteuse, certaine que ce bazar est de sa faute, qu'elle a outrepassé ses limites, bafoué la vulnérabilité de Mycroft et a profité de la situation.

Finalement, elle s'aventure à l'extérieur de la chambre, fermant la porte derrière elle. Incertaine de ce qu'il faut faire, elle se fraie un chemin sur la pointe des pieds dans le couloir, frappant à chaque porte sans obtenir de réponse. Alors qu'elle descend les escaliers, elle entend un bruit dans le salon. Anxieuse, et n'étant pas tout à fait sûre d'être prête pour une confrontation, elle se précipite néanmoins à l'intérieur, des mots d'excuses déjà au bord de ses lèvres. Elle s'étouffe presque avec quand elle s'arrête brutalement après quelques pas dans la pièce.

A la place de Mycroft, comme elle s'y attendait, elle voit la femme silencieuse qui leur a servi les repas plus tôt dans la soirée. La femme est occupée à débarrasser leurs verres de la petite table entre les fauteuils, s'attaquant au vin renversé.

- Oh ! Dit Molly maladroitement. Je suis désolée ! Je n'ai pas...

La femme relève la tête, sursaute, puis hausse un sourcil. Elle rappelle à Molly Anthea, sûre d'elle et un brin moqueuse, bien qu'en apparence pas malveillante.

- Je suis désolée, je pensais que vous étiez déjà partie. Comment puis-je vous aider ?

Molly trébuche, perdue.

- Um, en fait, je cherche Mycroft, vous l'avez vu ?

Le sourcil se hausse encore plus haut ;

- Mr. Holmes est parti il y a dix minutes, un peu pressé. J'étais sûre que vous étiez avec lui.

L'estomac de Molly ressemble à une tonne de briques. Elle fixe la femme d'un air vide jusqu'à ce qu'une toux polie la fasse sortir de sa stupeur. Heureusement, elle parvient à maitriser ses émotions assez longtemps pour que son cerveau se remette en marche. Se sentant toute petite sous le regard légèrement amusé de la femme, elle demande un taxi.

- Certainement, dit la femme, rassemblant les verres sur le plateau. Je vais passer l'appel tout de suite.

Molly fait l'expérience d'un amer retour à la réalité en la regardant partir. Le feu se meurt lentement dans le foyer, il ne peut pas y avoir plus de quarante-cinq minutes depuis qu'elle avait été assise ici avec Mycroft. Elle s'assoit sur l'une des chaises de la table, voulant être le plus loin possible de la cheminée. Elle se sent engourdie. La femme vient la chercher quand le taxi arrive et donne à Molly un dernier sourire ambigu avant de lui fermer la porte au nez. Émotionnellement épuisée, Molly monte dans le taxi et passe la demi-heure suivante à regarder par la vitre le paysage suburbain se transformer lentement en la vision familière de Londres la nuit.

*

Épuisée, Molly monte les dernières marches jusqu'à son appartement, ne voulant rien d'autre qu'un bain chaud et une bonne crise de larmes. La dernière chose dont elle a besoin c'est sa mère ouvrant la porte d'entrée quand Molly essaye d'y mettre sa clé.

- Molly ! Crie sa mère de façon stridente. Où diable étais-tu passée ? Il est une heure du matin bon sang !

- Maman...

La gorge de Molly se serre pendant qu'elle est absorbée dans un gros câlin dont elle essaie d'échapper.

- Je pensais qu'il t'était arrivé quelque chose d'horrible ! Comment as-tu pu monter dans la voiture de cet homme et ne répondre à aucun de mes textos ?! Je croyais qu'on t'avait kidnappé !

In the space beneath our clothes (tr)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant