Chapitre 10

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Ce matin-là, au petit-déjeuner, Drago avait remarqué que quelque chose n'allait pas : pourquoi est-ce que c'était Londubat et Lovegood qui aidaient Granger après son malaise ? Et pourquoi Granger avait fait un malaise ? Où étaient la belette et le balafré, et pourquoi...

- Drago, ça va ? demanda Blaise en regardant son meilleur ami d'un air inquiet.

- Hein ? Bah oui pourquoi ?

- Tu m'as l'air... Ailleurs...

En effet, le blond qui avait d'habitude une posture imposante et respectable à tout moment, était penché sur sa tasse de café, tout recroquevillé sur lui-même.

- Non, non... dit-il en se redressant. Bon, Blaise, il faut qu'on y aille, on a cours dans 10 minutes. Théo, amuse-toi bien à ton cours de... je sais plus trop quoi, finit-il sur un ton méprisant.

- Etude des runes anciennes, répondit calmement Théodore.

- C'est ça. A plus. Tu viens Zabini ?

***

A la fin de trois heures et demie de cours de sortilèges et de botanique commun avec les Serdaigle puis les Gryffondor, les deux Serpentard purent aller se reposer au parc. Évidemment, tous les deux avaient remarqué l'absence de la brillante Hermione, mais aucun n'osait en parler. Blaise avait peur d'énerver Drago, et Drago avait peur de choquer Blaise en lui apprenant qu'il s'était demandé où elle était passée depuis le petit-déjeuner.

Un peu plus tard, ils allèrent manger et retrouvèrent le reste de leurs amis à leur table. Alors qu'ils commençaient à manger, un hululement se fit entendre et une chouette blanche apparut soudain, volant très haut.

Ce n'est pas l'heure du courrier ! pensèrent-ils tous en même temps.

Pourtant, la chouette descendit en piqué vers la table des Serpentard, lâcha la lettre près du verre de Blaise et repartit sous les yeux ébahis de tous les élèves, sauf Blaise qui contemplait la lettre avec suspicion, et Harry Potter.

Harry, qui avait d'abord cru voir le fantôme d'Hedwige, et qui croyait que c'était Hermione qui lui écrivait, à lui, quand il avait reconnu la chouette qui avait envoyé sa lettre à sa meilleure amie, n'en crut pas ses oreilles lorsque Pansy Parkinson dit d'une voix forte et distincte au milieu du silence suite à l'arrivée de la chouette :

- Qu'est-ce qu'elle te veut, Hermione Granger ?

Plusieurs personnes étaient totalement déboussolées : Harry, Ronald et Ginny car cette lettre que leur meilleure amie avait envoyé ne leur était pas destinée, alors même que Harry lui en avait envoyé une plus tôt dans la matinée ; Blaise, qui se demandait ce qu'il avait fait, et Drago, qui essayait de comprendre le pourquoi du comment de toute cette histoire, qui cherchait à comprendre Granger. Et puis, il y avait aussi toutes ces filles jalouses de l'effet que Granger avait provoqué en plein milieu du repas, jalouses qu'elle s'autorise à envoyer une lettre privée à Blaise Zabini, si beau et si charmeur... Après tout, ne l'avait-on pas vu collée-serrée à Drago Malefoy durant le slow du bal ?

Blaise reprit ses esprits et fourra le parchemin dans sa poche, et il continua de manger comme si rien ne s'était passé.

Les professeurs et la directrice n'avaient pas non plus osé intervenir dans ce qui semblait être une affaire entre élèves, mais eux non plus n'avaient pas dit un mot depuis la venue de la chouette.

Doucement, les conversations reprirent alors que chacun se demandait ce que Hermione Granger voulait bien dire à Blaise Zabini qui soit aussi important, et si ce dit Blaise engueulerait Pansy pour cette remarque qui l'avait fourré dans l'embarras.

          

***

Hermione espérait de tout cœur que Blaise accepte de venir la voir. Elle avait besoin de lui. Après avoir envoyé le hibou avec son petit mot, elle se rendit à la salle de bains et se recoupa les bras, les jambes... Elle souffrait tellement, elle avait envie de rejoindre ses parents au paradis ou en enfer, peu importe, du moment qu'elle était avec eux.

Mais elle parvint à se raisonner en se disant qu'elle se devait de leur rendre hommage comme il se devait, durant la cérémonie qui leur serait consacrée.

Peu après l'heure du repas, même si elle n'avait pas mangé de la journée, elle retourna dans sa chambre pour répondre à la lettre de Mafalda Stuart :

"J'accepte cette cérémonie, merci de vous charger de la préparation. Respectueusement, H. Granger."

Puis elle avait envoyé sa lettre directement au ministère avec un simple sortilège.

Elle n'avait pas voulu s'étendre plus dans sa lettre, pour ne pas passer dans les tons ironiques et hypocrites.

De plus, même si elle n'en faisait pas mention, elle leur était extrêmement reconnaissante de prendre en charge toute l'organisation de l'enterrement, car elle était trop anéantie par la souffrance - mentale comme physique - pour songer à tout cela.

Cependant, elle ne put s'empêcher de penser qu'il aurait dû en être ainsi pour toutes les familles des victimes de la guerre qui auraient pu faire leur deuil sans penser à rien d'autre ; et pas uniquement parce qu'elle était une "héroïne de guerre".

Mais elle n'y pensa pas plus, et commença à pleurer. Elle finit par s'endormir quand elle n'eut plus de larmes.

***

Blaise avait pu échapper à ses amis un instant, et une fois au calme dans la salle de bains de son dortoir, il put lire la lettre d'Hermione.

- "Rejoins-moi devant le portrait de la Grosse Dame, ce soir, 20 heures. Urgent. H. Granger.", lit-il en chuchotant.

Blaise réfléchit à toute vitesse. Hermione, sa toute nouvelle amie, avait besoin de lui. Evidemment qu'il irait la voir, mais il se demandait quand même pourquoi elle n'avait pas envoyé de mot à Weaslette, ou même à Potter, selon elle son meilleur ami pour la vie. La seule lettre que ces trois-là avaient reçu le matin était de Mme Weasley, puisque Weasley - Ronald - l'avait lu sans intérêt puis passé à sa sœur d'un air blasé. Et puis, leur agitation durant leur conversation avait été élevée, comme s'ils parlaient de Quidditch, et pas un des trois (ou des autres amis d'Hermione) ne paraissaient inquiets à son sujet.

Blaise ne les espionnait pas particulièrement, en fait, pour savoir tout ça. Seulement, lui était inquiet pour la brune. Elle avait raté les cours souvent depuis le début de l'année - et ils étaient en cours depuis une vingtaine de jours seulement -, d'ailleurs elle ne participait pas toujours, et avec beaucoup moins d'entrain que les années précédentes, aux cours auxquels elle assistait. A table, avec ses amis, elle ne participait pas aux conversations...

Il avait remarqué cela même avant qu'ils ne commencent à se parler, car elle était d'habitude la petite miss-je-sais-tout, et maintenant elle ne parlait plus. Elle avait appris l'art de la guerre mais semblait avoir perdu l'usage de sa langue pour s'exprimer.

Un autre garçon, un autre Serpentard, pensait à tout ça, un blond aux yeux gris penseurs. Il pensait à la vie, ou plutôt à l'absence de vie de Granger, comme il se plaisait à l'appeler, depuis le début de l'année. Elle semblait vide, comme une coquille dont l'animal aurait déserté. Elle était comme transparente, invisible, n'était plus que l'ombre d'elle-même. Et puis, il y avait ces marques rouges, ces cicatrices de mutilation moldue, sur ses bras, et sûrement autre part aussi.

Drago ne comprenait pas : elle qui avait toujours su rester (à peu près) positive, qui était assez intelligente pour essayer de relativiser, et qui n'aurait jamais manqué un cours, même de botanique ou d'initiation au balai volant, avait bien changé depuis la première année. Elle avait tellement changé qu'il peinait vraiment à entrevoir la même Granger, celle d'avant.

***

Blaise sauta le repas du soir pour être sûr de ne pas manquer Hermione. Il monta jusqu'au cinquième étage à 19 heures 30 et se cacha dans un recoin d'un couloir loin des escaliers pour attendre l'heure.

La demie-heure qui suivit lui parut interminable mais heureusement, ce fut enfin l'heure pour lui de rejoindre Hermione.

La jeune fille avait assez mal choisi son heure car certes la plupart des élèves étaient encore en train de manger, mais les premières années et les préfets qui les accompagnaient étaient en train de remonter aux dortoirs (ou descendre aux cachots pour les Serpentard). Blaise se cacha derrière une statue près du portrait de la Grosse Dame, et attendit. L'horloge de la cour sonna 20 heures. Alors qu'il tournait la tête vers le reste du couloir, la tête d'Hermione apparut, flottant devant lui.

Il recula de deux pas, totalement paniqué, et trébucha contre le piédestal de la statue.

Hermione sourit et dévoila sous les yeux incompréhensifs, voir apeurés, de Blaise, le reste de son corps, totalement intact, remarqua-t-il.

- Mais que... dit-il en regardant la cape argentée aux motifs étoilés qu'Hermione essayait de plier.

- Une cape d'invisibilité, expliqua-t-elle sans le regarder, avec un geste lassé de la main. C'est celle d'Harry, chuchota-t-elle.

Blaise hocha la tête sans vraiment trop comprendre. Une fois que les battements de son cœur eurent repris une vitesse normale - la tête d'Hermione lui avait provoqué une sacrée frousse -, il put détailler la brune du regard : elle avait de grandes cernes et des poches violettes sous les yeux, et ses pommettes et ses joues étaient rouges. Son nez était tout irrité à force de se moucher, le blanc de ses yeux était rosé... Et elle avait des points rouges sur son front blanc. Il se souvenait vaguement que Théodore leur avait parlé une fois, à Pansy, Drago et lui, de ce phénomène qui arrivait lorsqu'on pleurait, car les muscles de notre front éraient trop contractés... Pour une fois que le cours d'Etude des moldus de Théodore servait à quelque chose... Surtout le chapitre 'sciences et anatomie' !

Hermione ne dit pas un mot de plus et fit signe à Blaise de s'approcher d'elle. Elle déplia la cape et la fit passer sur eux deux. Blaise fut ébahi par le pouvoir de cette cape car, même lorsqu'ils se trouvèrent au milieu de la salle commune de Grffondor, personne ne les remarqua.

Hermione et Blaise montèrent au deuxième étage et Hermione chuchota une formule qui permit à Blaise d'entrer dans un dortoir de filles.

Hermione s'assit sur le lit et Blaise ne put s'empêcher d'admirer la décoration : tout, dans cette pièce et dans la salle commune, paraissait accueillant et chaleureux, les couleurs étaient vives, tout était vivant... Ce que Blaise ne put s'empêcher de trouver affreusement comique vu l'état quelque peu dépressif d'Hermione.

OUBLIER - dramioneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant