➵ Chapitre 21

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   ~ Trois ans plus tôt, septembre 2016 ~

    Le soleil brillait, illuminant la douce campagne qui filait rapidement sous mes yeux déjà fatigués. L'herbe presque jaune dansait sous la légère brise de septembre, les champs s'étendaient à perte de vue, jusqu'à se confondre avec l'azur du ciel. Bientôt, les feuilles des arbres prendraient des teintes automnales chaleureuses, et joncheraient le sol sec et froid. La nature s'endormirait.

   Je poussai un profond soupir de fatigue et de lassitude, ce qui me valût un regard noir et désapprobateur de ma voisine – une femme pincée d'une trentaine d'années qui ne semblait pas très commode –. Pourvu que nous arrivions vite à Paris.

  Trois semaines s'étaient écoulées depuis mon retour en France, à Lyon. Durant ces trois semaines, je m'étais reposée, mais je m'étais souvent levée tôt et m'étais souvent couchée tard pour pouvoir parler avec Luke. Lui faisait de même. De ce fait, nous étions tous les deux littéralement lessivés pour la rentrée, qui avait lieu demain matin.

   Cette nouvelle année ne m'inspirait rien de bon : j'avais un très mauvais pressentiment, mais j'ignorais pourquoi et en quoi cela me concernait. C'étaient comme si de sombres nuages menaçant se dessinaient au loin et se rapprochaient lentement, insatiablement et inlassablement. C'étaient peut-être aussi ma fatigue et mon pessimisme qui me jouaient des tours.  

  Mes écouteurs enfoncés dans les oreilles, des notes relaxantes et enivrantes se propageant par frisson d'aile dans mon corps tout entier, je fixais rêveusement le seul paysage qui se profilait sous mes prunelles endormies. Je pensais à Luke. Il me manquait. Si j'avais ressenti un vide oppressant dans l'avion, c'étaient maintenant des abysses qui enveloppaient mon coeur d'une langueur presque monotone.

   Les seules motivations présentes dans mon esprit étaient Luke, Alice, Luke, Mike, Luke, Caitlin, Luke. Luke, Luke, Lucas, Luke. À croire que j'étais dépendante de lui, tant mes pensées, mon âme, mon esprit et mon coeur lui étaient attachés. Pourquoi diable fallait-il qu'il habitât à l'autre bout du monde ?

    Je soufflai encore une fois, mais d'une manière plus discrète cette fois-ci. Je me renfonçai dans mon siège dur – qui me paraissait confortable tant j'étais éreintée – et fermai les yeux. Avec un peu de chance, j'arriverai peut-être à rattraper quelques heures de sommeil, en sachant qu'entrant en première, la dose de travail à fournir serait donc plus importante, même si l'aspect musical resterait omniprésent. De plus, nous avions une nouvelle matière, qui liait les lettres à la musique. C'étaient ce qu'Alice et moi avions choisi. Deux choix s'étaient présentés à nous : soit arts musicaux soit lettres musicales. Sachant uniquement dessiner des bonhommes ficelles, mon choix avait été rapide. Et je devais admettre que c'était le cours que j'attendais le plus.

Caitlin, Mike et Luke avaient eu le même choix à faire à Saint-Mathew, et ils avaient pris la même chose.

   Je savais aussi que je n'aurai pas le temps de téléphoner ou de faire un Skype avec Luke tous les soirs où tous les matins. Peut-être les samedis matins, si on s'arrangeait.

    Par rapport à l'année précédente, qui était une année de découverte où nous avions choisi deux matières, nous avions dû choisir la matière que nous souhaitions étudier... J'avais pris musique. Venaient ensuite les matières imposées : mathématiques, physique-chimie, sciences de la vie et de la terre, français et histoire-géographie. Le nombre d'heures de ces matières imposées variait selon le choix que nous avions fait : l'un était plus axé sur les sciences et les mathématiques, l'autre plus organisé autour des lettres et des langues, et une autre encore rassemblant le tout de manière égale, avec en plus de l'économie.

Tout pour la musique (2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant