I-culture: 1°) le langage

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Définir le langage comme moyen de communication ne suffit pas, car il existe des systèmes de communication [monde animal] qui ne sauraient être qualifiés de « langage ». Le langage est en effet le propre de l'homme en ce qu'il témoigne de l'existence de la pensée et en ce qu'il est une condition de la vérité. Mais il est aussi un pouvoir d'action : lorsque nous parlons, nous ne nous contentons pas de décrire ce qui est, nous cherchons aussi à influencer autrui.

1) Langage et communication

- La définition la plus évidente du langage le présente comme un système de communication. C'est à comprendre de quoi ce système est formé et comment il fonctionne que s'emploie la linguistique, science fondée au XX° siècle par Ferdinand de Saussure. Celui-ci distingue dans le langage la langue, de la parole. La seconde est individuelle et dépend des intentions du locuteur, la première est sociale : c'est le système de signes dont les interlocuteurs disposent pour parler.

- La linguistique étudie donc la langue et non la parole. Elle mets en évidence que ce système de signes, à la différence de la communication animale, est conventionnelle : le lien qui unit le sens d'un mot « signifié » à la suite de sons qui le représente « signifiant » est arbitraire et non naturel. Elle établit également que les signes ne valent pas isolément mais par les relations d'opposition qu'ils entretiennent à l'intérieure d'une langue : par exemple, en distinguant mutton (viande animale) et sheep (animal vivant), l'anglais introduit une différence de sens inconnue en français.

Ferdinand de Saussure (1857-1913) : la linguistique structurale

ð Dans le cours de linguistique générale (1907-1911), Saussure établit que 1 ; les signes linguistiques sont constitué par l'association entre un contenu de pensée « signifié » et une suite de sons « signifiant », 2 ; cette association est arbitraire, c'est-à-dire conventionnelle, 3 ; la langue est un système de signes (structure), ou les signes n'ont pas de valeur isolément mais les uns par rapport aux autres. Saussure est ainsi le premier penseur du structuralisme

ð Ces thèses ont influencé les travaux de Claude Lévi-strauss sur les systèmes de parenté ou l'organisation des mythes

2) Qu'est-ce que parler ?

A. Langage humain et communication animale

- La différence entre les deux n'est pas seulement de degré ( le langage animal serait moins complexe que le langage humain, mais resterait à part entière du langage) , elle est aussi de nature : parler, c'est avoir l'intention de signifier quelque chose, c'est donc penser.

- Descartes met en évidence cette caractéristique du langage humain : certains animaux peuvent réagir à des signaux (la danse de l'abeille butineuse) mais ces signaux sont limités et les réactions qu'ils suscitent sont stéréotypées. Aucune abeille émettrice n'a jamais inventé de signification nouvelle ; aucune abeille réceptrice n'a jamais répondu autrement qu'en reproduisant la danse de l'abeille émettrice et en se dirigeant vers le butin. Aucune, en somme, n'a jamais montré un comportement indiquant une activité intelligente.

- La parole humaine, en revanche, le montre constamment puisque nous pouvons à tout instant inventer des phrases nouvelles, être immédiatement compris de nos interlocuteurs, et, comme le dit Descartes, utiliser les mots en les arrangeants « diversement pour répondre au sens de tout ce qui se dira en {notre} présence ». Un perroquet peut bien proférer des paroles, il ne parle pas. Un muet, si, puisque le système de signes qu'ils utilisent manifeste qu'ils pensent, c'est-à-dire qu'il créer du sens et sait ce qu'il dit.

B. L'homme est un sujet parlant

- Il ne suffit donc pas, comme le fait la linguistique, de décrire le langage comme un système de communication. L'analyse philosophique du langage montre qu'il n'est pas que cela, mais qu'il est aussi, et surtout, une activité qui suppose une conscience, un sujet pensant.

- Cela a une conséquence morale ; somme nous toujours responsable de ce que nous disons ? le lapsus ou le mot d'esprit, pour la psychanalyse, sont des actes de langages qui échappent au contrôle conscient et exprime l'inconscient. Selon cette hypothèse, le langage n'est donc pas toujours l'expression maitrisée d'un sujet conscient et rationnel.

3) Langage et pensée.

- Il n'y a donc langage que si les mots témoignent d'une pensée. Cela signifie-t-il que le langage exprime la pensée ? deux objections, contraires, peuvent être opposées à cette idée.

- Première, avancée par Bergson, est que notre vie antérieure, qui est singulière, ne peut être qu'imparfaitement traduite par les mots, qui sont généraux. Les formes les plus profondes de la pensée seraient alors ineffable, c'est-à-dire inexprimables par le langage, et ne pourrait être saisies que par une intuition non discursive (non susceptible de se mettre en discours).

- La deuxieme objection souligne au contraire que le langage fait plus qu'exprimer la pensée : il la constitue. Pas de pensée sans langage : c'est à travers les mots que nous pensons et l'ineffable, comme le dit Hegel, n'est pas le signe de la profondeur de la pensée mais de son évanescence, de sa fugacité, de sa non-distinction.

4) Langage et vérité

- La vérité est une propriété, non des choses, mais du langage. Quand on parle d'un « vrai » ami, de l'or « faux » on s'exprime mal. Ce qui est vrai ou faux , ce n'est pas l'or ou l'ami mais l'énoncé.

- Le langage ne peut donc dire la vérité que si ses énoncés sont doués de sens, car le sens n'est pas une donnée naturelle du langage : nous pouvons parler pour ne rien dire, ou dire n'importe quoi. La linguistique, en nous apprenant comment fonctionne la langue, risque de nous entretenir dans l'idée discutable qu'il suffit de s'exprimer dans les cadres d'une langue donnée pour produire du sens.

- Il faut donc distinguer communication et signification, c'est-à-dire parler à et parler de. Pour que nos phrases aient du sens, il faut qu'elle représentent ce que Wittgenstein appelle un « état de choses », c'est-à-dire une réalité pensable. Si les langues naturelles sont des instruments de communication, elles ne sont pas nécessairement adaptées pour représenter le monde.

- D'où l'idée d'une langue idéale : c'est-à-dire, pour parler comme Condillac, l'idée de faire de la science « une langue bien faite », excluant les malentendus, les imprécisions, les équivoques ou les impossibilités logiques.

5) Le pouvoir des mots

- Ce qui est un défaut du point de vue de l'exigence de la vérité est un atout d'un autre point de vue, c'est par sa richesse, sa complexité, que le langage produits ses doubles sens, et ses malentendus. Nous ne pouvons jouer sur les mots, sous-entendre que nous voulons pas dire explicitement, etc...

- Le langage a par ailleurs une force sensible et émotionnelle. Un discours est non seulement une description du monde, c'est aussi un acte complexe qui engage le locuteur et produit des effets sur ceux auxquels il s'adresse. Ce sont des « actes de discours » qu'étudie la pragmatique.

- La pragmatique considère le langage, non seulement dans sa dimension syntaxique ou sémantique, mais aussi comme un acte de communication.


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⏰ Last updated: Oct 02, 2019 ⏰

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