Chapitre 1 -Après l'explosion

118 22 9
                                    

L'esprit encore très embrumé, Salim revint difficilement à lui, les pensées sans cohérences, la vision floue, la bouche sèche avec la langue pesant lourd et peinant à se souvenir des dernières heures.
Donc fort ensommeillé et ne distinguant pas clairement ce qui l'entourait, son premier réflexe fut de remuer, en particulier les jambes, et la douleur fulgurante qui traversa toute sa jambe gauche jusqu'à la hanche lui rappela la prise d'otages et sa blessure.
À ce souvenir, il voulu se redresser, fébrile et un peu en panique, se demandant ce qu'il s'était passé depuis son dernier souvenir, puisqu'il semblait de toute évidence avoir perdu connaissance durant un certain temps, mais il ne parvint qu'à soulever son dos de quelques centimètres avant de retomber lourdement en arrière contre l'oreiller. Le sentir ainsi en retombant lui fit prendre conscience du lit sur lequel il était allongé.
En revanche, à part la douleur pulsant dans son genou, ses sensations demeuraient fortement atténuées, bien qu'il commençait lentement à les retrouver comme le lui confirmaient les fourmillements dans ses doigts et ses orteils, et sa vision ne lui montrait que des formes et des silhouettes imprécises composées de taches de couleurs dont certaines se mouvaient.
Comment avait-il pu être sonné à ce point ?
Il se souvenait du plan de Gabriel pour leur permettre de mettre le preneur d'otages hors d'état de nuire, auquel il n'avait pu participer, gisant au sol à cause de la balle reçue dans son genou, ce qui expliquait la douleur actuelle. Il se souvenait de Raphaël serrant sa main, plein d'inquiétude, puis des policiers l'avaient évacué de la classe pour le conduire dans une ambulance où, après lui avoir retiré la balle de la rotule, les secouristes avaient décidé de l'amener à l'hôpital pour des soins plus poussés.
Par la suite, ce dont il se rappelait était flou, il lui semblait qu'on l'avait transporté sur une civière mais, ensuite, tout était noyé dans l'obscurité et, à présent, il était allongé il ne savait où ni comment et sa vision imprécise ne l'aidait pas à comprendre où il se trouvait ni ce qu'il s'était passé.
Le bras très lourd, tant qu'il peina à l'arracher au matelas, profondément engourdis, il porta la main à son visage avec l'intention de se gifler pour se tirer de cette torpeur mais ses muscles étaient trop alourdis et pesants pour y parvenir et il ne put que poser lourdement sa paume contre sa joue. Ce qui lui permit de constater qu'il ne portait plus ses lunettes, qu'on avait donc dû lui retirer, ainsi qu'il avait un large pansement au niveau du nez, certainement pour permettre de guérir la fracture causée par les coups de Christophe Sarbes, le preneur d'otages.
On l'avait donc soigné, ce qui indiquait sûrement qu'il était à l'hôpital.
Il put en avoir la confirmation car, retrouvant peu à peu son acuité visuelle normale, ses lunettes ne servant qu'à dissimuler la couleur rouge foncé de ses yeux et non à corriger un défaut de vision, il découvrit une large salle au solde lino blanc où s'alignaient plusieurs lits équipés de roulettes,dont le sien, espacés de quelques mètres chacun. Après un peu de réflexion, possible car les brumes qui envahissaient son esprit commençaient à se dissiper, il comprit qu'il s'agissait certainement d'une salle de réveil, ce qui signifiait qu'il avait été opéré et que cette torpeur qui l'alourdissait était les restes de l'anesthésie.
À cette constatation, il ne se sentit ni soulagé ni rassuré, ni même curieux de savoir comment s'était déroulé l'opération, seulement agacé d'ignorer ce qu'il s'était passé pendant qu'il était aux mains des médecins. Il l'était encore plus à l'idée de devoir rester ici, dans cet hôpital, où les infirmiers viendraient s'enquérir de son état et où on voudrait peut-être lui faire passer des examens complémentaires, ce qui impliquerait une proximité et donc des visions de mort, les images des décès de toutes les personnes qui l'approchaient, qui le hanteraient et le tortureraient.
D'ailleurs, dans son esprit tournaient actuellement celles concernant les ambulanciers s'étant chargé des soins préliminaires directement sur place. L'avantage de l'anesthésie générale était que, au moins, aucune de ces visions n'étaient venues le harceler durant ce sommeil artificiellement provoqué.
Tout ce qu'il souhaitait était pouvoir partir pour s'enfermer dans sa chambre, loin de tout et surtout de tous, fuyant les effets de sa magie maudite, et dessiner ces scènes de mort qui lui apparaissaient pour tenter de les chasser, de s'en défaire, bien que ça n'ait jamais réellement fonctionné. C'était un peu son rituel et les moments où il ne traçait pas ces lignes au crayon à papier étaient rares mais, de toute manière, avec ses membres qui demeuraient si engourdis, il aurait été incapable de tenir un crayon entre ses doigts.
Pour l'instant, il ne pouvait qu'attendre de se remettre de cette anesthésie et de se réveiller complètement. Dans un soupir, il enfonça le crâne contre l'oreiller, en ayant déjà assez et voulant en finir.
En un sens, il se moquait bien de toute cette histoire et des extrémistes qui manifestaient devant l'institut, tant qu'on lui fichait la paix or, entre les inspecteurs qui le soupçonnaient pour les meurtres et un preneur d'otages qui se plaisait à venir bouleverser leur routine d'étudiants magiciens, sa tranquillité et sa mise à l'écart volontaire étaient grandement compromises.
Pourquoi les choses tournaient-elles ainsi ? La torture causée par ses pouvoirs qu'il subissait quotidiennement n'était-elle déjà pas suffisante ?

Les Yeux du Pouvoir - Tome 2 : Violet Aura [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant