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Brzzz. Brzzz. Brzzz
Je bougonne à l'entente de ce bruit désagréable qui me dérange en plein sommeil. J'avais fini par m'endormir à une heure tardive de la nuit ou de bonne heure ce matin, au choix. Donc me faire réveiller par le vibreur de mon téléphone ne me met pas vraiment dans les meilleures dispositions. Je ne parviens pas à ouvrir les yeux alors je tâtonne sur ma table de chevet à la recherche du maudit instrument, cause de mon réveil et certainement de ma mauvaise humeur à venir pour le restant de la journée. Toujours sans ouvrir les yeux je réponds au fauteur de trouble.

-Humm
Le silence... putain c'est pas possible. Qui est l'emmerdeur qui me fait cette mauvaise blague ?Finalement après quelques secondes supplémentaires j'entends un raclement de gorge.

-Euh...
Waouhh, ça commence bien comme approche

-Brice ?
Ma mauvaise humeur s'étant définitivement invitée je réponds de façon abrupte

-Qui d'autre ça pourrait être ?

-Euh... je rappellerai plus tard. Je vois que je dérange.
Tut tut tut. Non mais c'est quoi ça putain ! Je sens cette journée aussi pourrie que celle de la veille et que toutes les autres depuis le geste malheureux de mon ami. Je me retrouve déjà à râler, allongé dans mon lit, sans avoir encore soulevé les paupières. La merde !

D'un coup de pied je rejette la couette et m'étire avant de me mettre en marche. Quand mes yeux après d'ultimes efforts s'ouvrent enfin et que je porte mon regard sur le radio réveil, je déteste encore plus la personne qui m'a sorti de mon sommeil. Vu l'heure affichée j'ai très peu, trop peu dormi. Il n'est même pas huit heures du mat et je n'ai pas cours avant cet après-midi. Putain ! Je sens que ce mot va m'accompagner tout au long de la journée. Rhaaaa. C'est rare que je sois de mauvais poil mais franchement la situation n'aide pas. Les derniers jours et cette nuit ont été éprouvants.
Je ne cesse de penser à Yannis. Toute cette histoire me fait mal. Ça tourne en boucle. J'aimerais comprendre la cause de tous ses tourments, j'aimerais que l'on puisse soulager sa douleur, j'aimerais... j'aimerais qu'il s'en sorte, qu'il ne sombre pas, qu'il ne recommence jamais. J'aimerais que plus jamais il ne souffre. Ce mec est trop, trop tout. Attachant, à l'écoute, bienveillant, altruiste et tellement d'autres choses toutes meilleures les unes que les autres. Est-ce que d'une façon quelconque je pourrais lui venir en aide ? Mais qu'est-ce je peux faire ? Et voilà c'est reparti, je vais me faire des noeuds au cerveau encore aujourd'hui. Je ne sais même pas si je peux me permettre d'aller le voir. Je ne veux surtout pas le mettre mal à l'aise.

Mes pieds se posent au sol et je me mets en pilotage automatique. Direction la cuisine pour boire un bon café et achever de me réveiller. En même temps que ma première gorgée je consulte mon portable pour savoir qui a osé interrompre ma nuit. Numéro inconnu. C'est bien ma veine. Me voilà dans l'impossibilité d'engueuler l'importun.

Après une bonne heure passée entre le petit-déjeuner et mon passage à la salle de bains, j'appelle Cam pour lui demander des nouvelles de nos potes, Yannis autant que Fauve. Cette dernière aura du mal à se remettre. Elle est si proche de son « petit ange », elle va être morte d'inquiétude pendant un bon moment, tant que Yannis traversera cette mauvaise phase.

Salut, vous êtes sur le répondeur de Camille. Je vous rappelle dès que j'ai un moment. Bip bip bip.
Je pousse un profond soupir. Je n'ai plus qu'à aller à l'éden dire bonjour à notre rebelle. Il aura peut-être des nouvelles, lui.

A peine ai-je franchi la porte du bar que j'aperçois Jehann et vu sa tête je peux d'ores et déjà dire qu'il a dû passer une nuit tout aussi merdique que la mienne. Lui qui a des iris bien noires en temps normal, aujourd'hui je peux parier que personne ne s'approchera de lui sans une certaine appréhension. Il fait peur.
Je n'ai même pas le temps de poser mon cul sur un tabouret qu'un café est déposé devant moi.

-T'as pas envie de causer si je comprends bien.

-Ouais.

-Ok. Tu comptes rester en colère après lui pendant longtemps encore ? Tu ne crois pas qu'il faut le soutenir plutôt ?

-Le soutenir ? Tu rigoles ? Tu as vu ce qu'il a fait ? Il n'a pas le droit ! Il ne devait pas nous faire ça !

-Woh, calme-toi ! Tu ne crois pas que tu y vas un peu fort ?!

Jehann pose ses mains à plat sur le comptoir et me regarde bien droit dans les yeux tout en rapprochant sa tête de la mienne.

-Non je n'exagère pas ! Oui je suis en colère ! Je suis en colère après lui, après moi !

Ses yeux deviennent brillants d'un coup et il prend la fuite laissant son boss seul derrière le bar. Ce dernier balance la tête de gauche à droite avec un air désolé.
Plus les heures passent plus ma première impression se confirme. Journée de merde.

Je me pousse à aller en cours alors que franchement je ferais mieux de retourner me coucher. Quand je pénètre dans l'amphi je m'installe près de Laura et Capucine. Et bien, heureusement pour elles qu'elles peuvent cacher leur mauvaise mine derrière un peu de maquillage. Sauf qu'aujourd'hui il aurait fallu qu'elles y aillent à la truelle parce que leurs traits sont marqués par la fatigue et l'anxiété.
Yannis nous aura sacrément plombés le moral.
Mon téléphone vibre encore et comme il s'agit du numéro inconnu je choisis de ne pas répondre. La personne n'aura qu'à laisser un message si elle veut. Ce qu'elle fait au final si j'en crois le petit bruit me le signalant. Pas grave j'écouterai plus tard.
Les filles et moi tentons de suivre les cours tant bien que mal et sommes soulagés quand nos cours prennent fin. On retrouve Camille qui nous attend à l'extérieur de la fac.

-Salut. Il a l'air maussade. L'ambiance est lourde à l'appart. J'avais envie de vous voir pour m'aérer la tête.

-Suis pas sûr que l'on soit de bonne compagnie. Tiens, j'ai essayé de te joindre au tel ce matin.

-Hum, mon portable était déchargé. Orlane t'a appelé ?

-Hein ? Ben non. Pourquoi ? Elle a pas mon numéro toute façon.

-Si. Elle m'a appelé aux aurores... elle voulait ton numéro. J'te jure, si elle n'était pas si adorable je l'aurais étranglée.

-Oh putain ! Me dis pas que...
Je me passe les mains frénétiquement sur le visage. L'appel de ce matin c'était sans doute elle. Les boules. Mais qu'est-ce qu'elle me voulait ? On ne se connaît pas. Innocemment je pose la question à mon ami.

-Tu sais peut-être ce qu'elle me voulait ?

Aussi bizarre que cela puisse paraître ma voix n'est pas très assurée. Je me sens un peu nul sur ce coup. Malgré ça un petit sourire vient se greffer sur mes lèvres. Cam fronce les sourcils se demandant certainement pourquoi je réagis comme ça. Il regarde Laura et Capucine et préfère ne pas faire parler sa curiosité. Intérieurement je remercie mon pote même si je suis certain qu'il reviendra à la charge plus tard.

Je m'éloigne un peu et écoute le message : Bonjour Brice. Euh... c'est Orlane. Tu sais la sœur de Yannis. Euh... je voulais m'excuser pour hier soir. J'étais incapable de parler et je ne sais même plus si je t'ai remercié de m'avoir raccompagné. Je... euh... peut-être que ça te dirait qu'on se retrouve pour boire un verre ensemble. Je tiens à me faire pardonner.

Et merde de merde de merde !!!

L'habit ne fait pas le moine (Tome 3)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant