Onzième Brouillon

1.5K 80 37
                                    

L'année scolaire était terminée depuis un bon mois et elle laissait place aux vacances d'été que tout le monde attendait tant. Depuis le procès, ma mère ne nous a donné aucune nouvelle et s'est terrée dans un silence qui devenait inquiétant. David ne se rendait pas réellement compte de la situation et semblait vivre sa meilleure vie. Mon père n'est pas réellement très autoritaire. Glace en guise de dîner, bonbons pour le gouté et petits gâteaux entre les repas, sans parler des heures de couchers et des caprices que David commençait à accumuler. Quand j'y repensais, je me demandais pourquoi est-ce que ma famille avait basculer dans le vide aussi rapidement et je me rendais compte que l'instabilité du couple de mes parents ne datait pas d'hier. En réalité, une partie d'eux s'est brisée lorsque Simon a définitivement quitté la maison. Bien malgré l'arrivée de David, ça n'avait rien arrangé. Quant à moi, je me retrouvais toujours au milieu de tout ça, impuissante et désemparée, tentant le tout pour le tout de rabibocher mes parents et surtout de faire revenir Simon.
Mon père venait tout juste de finir le travail et comme à son habitude, s'était affalé dans le canapé en attendant que son café ait fini de couler. David s'amusait faire du dessin dans la cuisine tandis que je faisais le tour des universités sur internet.

-Toujours hésitante ?
-Hm... répondis-je.
-Tu sais l'Imperial College London est très bien.
-Ne cherche pas à m'envoyer là où tu as étudié.
-Et qu'est-ce qui te plairait ?
-De ne pas aller à l'université.
-Mais je croyais que tu voulais devenir archéologue !
-Je le croyais aussi mais plus rien ne m'intéresse.
-Il y a quelque chose dont il faut que je te parle.

Je le regardais avec de grands yeux, le bip de la cafetière en fond sonore et il prit place face à moi, les mains jointes sur la table, l'air sérieux.

-Quand j'ai eu ton âge, la même pensée me taraudait. Mes parents m'ont alors laissé le choix, me mettre à travailler tout de suite, où alors, me laisser un an pour trouver ma voie.
-Qu'est-ce que tu as choisi ?
-J'ai voulu travaillé au début. Je me disais que de gagner de l'argent tout de suite me rendrait indépendant plus vite mais pas du tout. La vie d'adulte ne s'acquiert pas du jour au lendemain. Mes parents on donc prit cette décision à ma place, j'avais un an pour souffler et me trouver. Ils m'ont alors donné ceci.

Il fit glisser sur la table une enveloppe et resta silencieux. Il me fit un geste de la tête comme pour me dire de l'ouvrir et c'est ce que je fis.

-Un billet pour... Vérone ?
-Ils m'ont envoyé chez mes grands parents pendant un an. Là bas, j'ai découvert plein de choses et j'y ai surtout rencontré ta mère. Elle était en échange universitaire pour sa licence et était dans sa première année.
-Tu crois vraiment que je vais trouver l'amour là bas ? Ris-je. C'est pas un peu trop tiré par les cheveux ?
-Si je t'offre ce billet c'est pour que tu puisses te concentrer sur toi même. Vérone est une ville magnifique, tes grands parents y sont retournés pour leur retraite, ils te prendront chez eux.
-Je vais y réfléchir.
-Ne tarde pas trop, le vol est la semaine prochaine.

Il se leva, quitta la pièce et me laissa en proie avec mes pensées. L'Italie ne m'avait jamais vraiment intéressée, sûrement parce que je n'avais jamais réellement eu envie de voyager où que se soit. Je regardai, tournai et retournai le billet sans savoir quoi en penser. Il me laissait perplexe et je décidai de le laisser sur la table pour la journée. Tout de même intriguée par la ville de Vérone, je fis quelques recherches pour peut-être m'aider à me faire une idée et bizarrement mes grand-parents m'appelèrent en fin de journée. La communication était très dure avec eux puisqu'ils parlaient difficilement anglais et je ne connaissais que très peu de mots en italien. Cela ne m'aida pas cependant à prendre une décision mais me réjouissait tout même d'entendre mes grand-parents si heureux de peut-être me recevoir.

Le lendemain la même question me taraudait, qu'est-ce que j'allais faire ? Je n'avais pas vraiment de but ici mais ça me fendait le cœur de quitter David et mon père. La question ne se posait pas pour Simon mais je savais qu'il me manquerait tout de même comme il m'a toujours manqué jusqu'ici. Seulement, j'étais une peureuse. J'ai toujours eu peur de l'inconnu et de me lancer dans le bain à corps perdu sans savoir dans quoi je m'embarquais et où est-ce que ça me mènerait. Je me torturais tellement l'esprit que la fin de semaine arriva à vitesse grand V. Je pris alors cette décision sur un coup de tête, je partirais à Vérone pendant un an.

Lundi 11 Juin, 8h j'étais dans l'avion prête à m'envoler vers l'Italie. David avait pleuré comme un bébé et mon père par fierté, avait tenté l'impossible pour ne pas verser de larmes. J'avais senti mon cœur s'alourdir face à la porte d'embarquement mais essayais tant bien que mal de me convaincre que je venais de prendre la bonne décision. Dans peu de temps je serais à Vérone.

En arrivant sur le tarmac, je me sentis étrangement plus sereine qu'en partant. Je regardais les gens récupérer leurs bagages qui devaient peser une tone tandis que je n'avais avec moi qu'un sac à dos et une petite valise. Mes grands-parents m'attendaient à l'extérieur de l'aéroport en me faisant des grands gestes pour que je les vois et ma grand-mère se jeta sur moi.

-Dio mio ! Comme tu es grande. S'émerveilla-t-elle avec son sublime accent.
-Ou c'est toi qui es petite nonna. Ris-je.
-Je t'ai fais un tiramisu tu vas te régaler.
-C'est un peu cliché non ? Souris-je.
-C'est quoi ça « cliché »? Je ne connais pas ça!
-Stereotipo, cara mia. Lui sourit mon grand-père. Comment tu vas Bella ?
-Ca va, j'ai très faim !
-Andiamo, on rentre ! S'exclama ma grand mère.

L'air était déjà plus doux ici qu'en Angleterre et je me surprise à être excitée de découvrir la ville et ses alentours. Mon grand-père mit ma valise dans le coffre de leur voiture et je montais à l'arrière. Aujourd'hui ce terminait un brouillon important de ma vie.

——————
Vocabulaire
Nonna: mamie
Dio mio: Mon dieu
Cara mia: Mon coeur
Andiamo: Allez
Stereotipo: cliché/stéréotype
Bella: ma belle

Linked - Tom HollandWhere stories live. Discover now