Solal
Enjoy the silence - Depeche Mode(Début du chapitre)+ spécial Ines : Milionaria - Rosalía
Seize heures cinquante-neuf. Tout commence par une cour déserte. On verrait presque la poussière voler. Le soleil chauffer le béton. Le ciel retenir son souffle.
Une sonnerie stridente retentit, déchirant le silence. Dès cet instant, une faible rumeur se fait entendre, de l'intérieur de l'édifice. De là, ça ressemblerait à des chuchotements, un lointain bourdonnement.
Puis les portes s'ouvrent, quelqu'un les pousse violemment. Et soudain la cour se remplit de vie. Un flot ininterrompu de jeunes sortent des bâtiments, se précipitent vers la sortie, excités d'être libérés après cette longue journée, ce fameux lundi si redouté.
Ça ne désemplit pas. Une véritable marée humaine qui s'égosille, qui se hâte, qui se pince, s'interpelle, se rattrape, se pousse, se chamaille, se prend dans les bras. Tous vers la même direction, vers ces grilles annonciatrices de la fin des cours.
La première vague de lycéens sort maintenant sur le parking. Etrangement, ils ne partent pas de suite vers les voitures, vers les bus scolaires et les autocars de villes. Certes, quelques-uns se dépêchent en direction de la gare pour attraper le train de dix-sept heures dix, mais la plupart décident de rester, stationnant devant les grilles, s'étalant sur le trottoir.
Et de là prend forme un nouveau brouhaha, celui des élèves qui n'en sont plus, qui deviennent de simples amis qui se retrouvent pour se raconter leur journée et pour savourer sa fin, pour se griller une cigarette entre potes, pour déboucher les bouteilles de soda. Les enceintes bluetooth s'allument, les sacs abandonnés par terre, certains s'assoient, d'autres ne peuvent pas, ils se mettent à courir, à sauter, à danser, à raconter une histoire en faisant de grands mouvements évocateurs.
C'est une ruche pleine d'abeilles surexcitées, la plupart de bonne humeur, d'autres moins, et ça siffle, ça crie, ça bavarde, ça colporte les dernières rumeurs, ça ferme les livres et ouvre les bouches, ça chante, ça rit, ça fredonne, ça répond au téléphone, ça tousse et ça éternue, ça court, ça fait des roues entre les voitures, ça chute parfois, ça se relève et ça continue sa route en braillant. Ça insulte, ça se bagarre, ça sépare, ça enlace, ça s'embrasse, et parfois plus, ça sort les harmonicas et ça fonce chercher les planches de surf, ça se reconnaît dans la foule et ça tchèque. Ça fait beaucoup de choses mais ça ne pollinise pas, finalement.
Au milieu de tout ça, nous aussi on se presse pour sortir sur le parking et quitter la cour. Aurélie sort une cigarette de son sac à main et maugrée en cherchant son briquet. Adèle nous rattrape en courant, son sac de sport à la main et le casque d'Auré dans l'autre, qu'elle lui tend en se mettant à notre niveau. En sortant sur le parking, je cherche déjà mes amis des yeux, alors même que des groupes de seconde et de première nous passent devant dans un bourdonnement coloré et assourdissant. Ça sent le chewing-gum et le déo.
Puis soudain, un trou s'ouvre dans la foule et j'aperçois un idiot sautiller partout, s'appuyer sur les épaules d'un gars pour sauter plus haut, atterrir sur la chaussée et s'en écarter d'un bond pour éviter d'être renversé par le scooter qui fonce sur la route. Il fait le clown quoi. Thomas Daendels dans toute sa splendeur.
Autour de lui, Chad et Maui ont l'air de s'échanger des crayons de couleur, et je me rappelle que leur dernier cours de la journée était histoire-géo. Ils ont dû dessiner les cartes pour le bac. Alors que nous approchons du petit groupe, Jésus émerge de la masse de lycéens avec un de ses potes que j'aime pas trop, Steph. Heureusement, le meilleur ami de Thomas salue Steph et se dirige vers nous en nous faisant signe de la main. Aurélie le tacle déjà :
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Les enfants de l'océan
Teen Fiction" J'irai n'importe où pour te suivre Solal. J'irai au bout du monde avec toi. - Fais pas de promesses que tu pourras pas tenir. - C'est pas des paroles en l'air. - Alors pars avec moi. On se casse d'ici. Juste toi et moi."