18 - Les souvenirs des Elvaruste

118 3 0
                                    


juin 1985...

Elle a 23 ans et est étudiante finissante en Sciences infirmière. Elle est au Cap-Haïtien pour son service social. Trois ans plus tôt l'UNESCO avait classé comme patrimoine mondiale des endroits de cette ville, comme La Citadelle La Ferrière et les ruines du Palais sans-souci qui sont situées à environ 15 KM, au sud, au sein du Parc National Historique Citadelle, Sans-Souci Ramiers. De son abréviation PNH-CSSR.

Assise sur la cour déserte de l'hôpital Universitaire Justinien, durant son heure libre, elle lit un roman : Compère Général Soleil de Jacques Stephen Alexis. D'habitude, elle lit les romans à l'eau de rose. C'était un grand sentimental. Malgré la lecture passionnante, elle entendit de loin, sa meilleure amie qui l'appelle. Elle esquisse un sourire et fit mine de rien entendre.

Ce soir, ils avaient rendez-vous dans un vieux bar du coin. Et son amie tenait à le lui rappeler. Depuis deux semaines, Adeline fréquentait un médecin. Pas n'importe lequel, Georges Silvestre, le médecin en chef de l'hôpital. Entre elles, il n'y avait pas de secret. Elles étaient différentes, comme deux pôles opposés d'un aimant. C'était vraisemblablement là, la raison de leur attachement. Enfin l'une d'entre elle. Miriam était super intelligente, et d'un côté ça attirait Adeline. Sa façon de passer les cours avec facilité, la fascinait. Les professeurs l'aimaient, les élèves étaient jalouses d'elles. Elle se demande encore pourquoi Miriam l'avait choisie comme amie.

Adeline était différente, genre vraiment. La totale opposée de son binôme, mais pas en ce qui concerne ses études. Ce point, elle ne le négligeait pas et était prête à tout, même ce qu'on refuse d'imaginer. C'était ça le seul souci entre elles. Miriam détestait ça.

Lorsque Miriam Beljour leva la tête, elle avait en face d'elle, une jolie femme, bien en chair qui lui souriait.

-    Oh ! Madame a laissé tomber les « Harlequin » ?

Elle lui rendit son sourire.

- N'oublie pas pour ce soir, OK, fais-toi jolie, fit Adeline.

Miriam acquiesça de la tête. Elle s'en va.

En rentrant chez elle cet après-midi, Miriam passa acheter des kokiyòl chez Mant Gas, une vieille dame très sympa qui avait établi ses quartiers sur le trottoir de la Rue 11. Il fallait que vous goutiez une fois, une seule pour devenir client incontesté. Et bien, il y a des gens qui ont été créés pour une chose précise. Si c'était vrai, alors Mant Gas a été créé pour ces pâtisseries dont elle seule avait le secret.

Penchée vers l'avant, la vieille dame enveloppait ses 1o kòb Kokiyol dans ce que tout le monde appelait du papier sucre. Son odeur avait quelque chose de particulier, de chatouillante, de délicieuses.

Lorsqu'elle finit ses achats, elle regarda autour d'elle, le paysage est magnifique, l'ambiance est bienveillante, sans savoir que, dans environ un an, tout va changer. Tout va basculer. Ce sera un nouveau règne. Le coup d'état va plonger ce pays qu'elle aime tant dans un chaos sans pareil, dans un coma sans fin.

Miriam et Adeline habitaient une petite maison à la Rue Q. Le gouvernement avait pris en charge le logement des infirmières. Lorsqu'on les avait demandé de choisir, les deux filles avaient hésité entre une maison plus grande à la Rue Nord et une autre plus petite à la Rue Q. finalement, elles s'étaient mises d'accord pour la plus petite maison. Adeline a grandi à quelques mètres de là, dans la Rue P, avec une grand-mère aimante et un grand-père qui sarclait pour subvenir aux besoins de la famille. Oui. Adeline a grandi entre le gobelet emaye pour son kafe et le gobelet en aluminium pour son thé chaque matin avant son déjeuner. Elle a grandi entre le Marèl avec ses copines, les oslè et les cordes à sauter. Enfin, elle a grandi entre les mythes, les histoires racontées tard la nuit sur la cour sous la lune pleine et les Konbit.

La listeWhere stories live. Discover now