Une enquête...

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La pièce était comme n'importe quelle chambre, et si l'on ne faisait pas le tour du lit où reposait Anna, on pouvait croire que la jeune femme dormait tranquillement. Son visage était pâle, et en baissant les yeux, Marc-Antoine aperçut un couteau planté dans son coeur. Le sang de la victime avait coulé sur sa robe de nuit, formant une ligne droite et nette. Il avait bien envie d'embrasser une dernière fois la joue de son amie, mais il préféra ne pas troubler la scène de crime pour rendre l'enquête plus facile aux policiers.

- Vous ne devriez pas être ici, annonça une voix provenant de la porte

Marc-Antoine se retourna avec un hoquet de surprise, et vit un homme très petit, habillé de gris, le visage pâle et les cheveux noirs plaqués en arrière. Il portait de grosses lunettes rondes qui masquaient ses yeux vides d'expression.

-  Qui êtes vous ?, demanda-il.

-  Peu importe qui je suis, je vais vous dénoncer, vous n'êtes qu'un complice du tueur qui cherche à effacer des indices ou des preuves qu'il aurait laissées, rétorqua l'inconnu. 
Pierre-Marie sortit de l'ombre et se retourna. 
- Eh bien ! Voici donc le grand génie. Toujours aussi aimable. Je te présente mon ami Jean-Eude de Bruyère, ajouta-t-il à l'intention de Marc-Antoine. Nous souhaitions simplement admirer une dernière fois notre chère Anna.

- Je suis sans doute allé un peu vite, veuillez m'en excuser. J'ai rencontrer Pierre-Marie dans l'armée ; Anna était aussi mon amie. En ma qualité de chercheur en laboratoire, je désirais simplement trouver quelque preuve pour démasquer le responsable de cet horrible crime.

Un long silence s'installa dans la pièce. Marc-Antoine ne savait que répondre à cet homme, devait-il lui faire confiance ? Pierre-Marie souriait bêtement, et finalement, Jean-Eude proposa de sortir de cette chambre qui le secouait tant, puis dit aux deux hommes :

- Je pense que nous ferions une bonne équipe. Aussi, je vais vous dire la vérité, murmura-t-il sur un ton des plus sérieux.

Il raconta tout ce qu'il savait dans les moindres détails, la jalousie du colonel pour l'amant de la défunte, un homme d'affaire, homme qui lui avait volé sa place dans le coeur d'Anna. Chabert ne s'était jamais remis de leurs entrevues qu'il nommait trahisons. Selon Jean-Eude, même si cet amant était mort, la haine persévérait chez le colonel, il était rancunier et pouvait attendre fort longtemps afin de réaliser la meilleure vengeance possible. Marc-Antoine était sous le choc, il ne savait rien de tout cela. Jean-Eude lui proposa de l'aider à trouver d'autres preuves et d'enfermer le Colonel avant d'alerter la police, puisque les trois amis partis n'étaient pas encore revenus. Et selon lui, ils ne reviendraient pas.

- Bon, eh bien, enquêtons et suivons l'expert !, s'exclama Pierre-Marie sur un ton des plus ironiques.

Pendant les heures qui suivirent, les trois camarades, compagnons de fortune à la recherche de la vérité, de la justice, fouillèrent toute la demeure afin de trouver un moindre détail qui pourrait prouver leurs affirmations. Leur travail fut couronné de succès : ils mirent la main sur le journal intime du Colonel, dont le papier était légèrement jauni et la couverture de cuir rouge sang. Il retraçait toute son histoire jusqu'à son mariage. Après quelques pages vides, il avait alors écrit : « jamais plus je ne veux raconter ma vie, malgré l'Interdiction que je lui avait donnée, ELLE n'en a fait qu'à sa tête. Je jure que je causerais la mort de cette femme abandonnée, abandonnée par la raison et par la dignité après sa trahison. » 

Les cinquante ans du Colonel ChabertWhere stories live. Discover now