La mort dans l'âme

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Julien, après avoir fait un rapide bilan de sa vie, était en proie au plus profond désarroi. Rien n'allait plus, ni au travail où il ne se voyait confier que des tâches subalternes, ni dans sa vie privée. Constance le trompait effrontément depuis quelques temps. désespéré, il colla son arme contre sa tempe...

Le jeune homme sortit chancelant de chez lui. Il erra un bon moment dans la ville sans but précis, avant de tomber sur un pub dont l'enseigne éveilla sa curiosité : « L'entre deux ». Il pénétra dans l'établissement, histoire de boire un verre et se changer les idées. C'est alors qu'une superbe rouquine aux yeux couleur d'émeraude fit son entrée. Vêtue d'une robe rouge et vaporeuse invitant au péché, elle le frôla. Julien l'accompagna du regard. Elle se dirigeait vers le juke-box, d'une démarche féline, malgré ses talons aiguilles. Julien était plutôt bel homme, grand, mince, brun, avec de grands yeux gris. Il était sportif et avait un corps athlétique. Lorsqu'elle revint vers lui, il lui proposa un verre avec un large sourire. Elle le détailla longuement, songeuse, puis accepta la proposition.

Était-ce l'effet de l'alcool ? Julien se sentait bien. Un parfum enivrant troublait ses sens. Dans sa tête, il avait déjà envoyé Constance au diable. Après tout, s'il pouvait rester avec cette superbe femme, il serait ravi de s'endormir dans ses bras.

Julien dormait paisiblement. Jézabel l'observait dans son abandon. Il était indéniablement très beau. Mais sa prestation de la veille ne l'avait pas convaincue. Il avait été trop doux et trop tendre pendant leurs ébats. Elle s'attendait à quelque chose de plus « sauvage » de sa part. Décidément chez ce jeune homme rien ne collait. C'était une guimauve dans un corps sculpté dans le marbre. Jézabel pressentait qu'elle s'en lasserait vite. Elle n'avait que faire d'un soupirant au tempérament romantique.

Lorsque le jeune homme s'éveilla, la jeune femme était à la fenêtre. Il admira son corps qu'il devinait au travers des vêtements fins. Sentant qu'il était réveillé, elle vint s'asseoir au pied du lit. D'un ton naturel, elle lui proposa de le présenter à son Boss. Celui-ci était à la recherche d'un garde du corps. Julien rencontra le Boss le jour même. L'affaire fut rapidement conclue.

A « Pandémonium » les règles étaient très différentes de ce que Julien avait connu auparavant. Le Boss lui avait parlé d'une « initiation » qui d'après lui était indispensable. Pourquoi ? Maintenant qu'il y réfléchissait, l'entretien avec le Boss lui semblait surréaliste. Il y avait été question d'une concurrence avec une autre société, « Plein Ciel », pour une histoire de parts de marché. En quoi cela concernait' il un garde du corps ? Cela restait assez flou dans son esprit.

Julien, les yeux embués, pensa de nouveau à Constance. Tout comme Jézabel, celle-ci l'avait rejeté. Il ne comprenait pas la raison pour laquelle il lassait si vite les femmes. Il les aimaient pourtant, les respectaient, avait toujours voulu les protéger. Constance avait été son premier grand amour.

Julien s'était ensuite épris de la sulfureuse Jézabel. Sa quête de la femme idéale s'arrêterait ici. Il se dirigea vers le salon, où il avait déposé son arme de service. Il saisit le BERRETA, le caressa sensuellement, avant de l'appuyer sur sa tempe. Il entendit le bruit de la détonation raisonner dans sa tête, mais il ne ressentit pas la moindre douleur. Incrédule, il fixa son reflet dans la glace : aucune égratignure.

Jézabel avait assisté à sa lente descente aux enfers. Elle le regarda d'un air condescendant et ironique. La donne était truquée depuis le début, ne le savait-t-il pas ? Il n'avait aucune chance. Julien n'avait-il donc pas vu son corps inerte sur le tapis du salon de l'appartement de Constance ? « On ne meurt qu'une fois chéri » murmura-t-elle, avec un sourire sardonique.

La mort dans l'âmeWhere stories live. Discover now