Epilogue

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Le ciel, remplit de centaines d'éclairs menaçants, grondait. L'air était lourd, étouffant. Un silence de mort régnait parmi les vivants. Un silence non naturel. Les oiseaux n'égayaient plus les cieux de leurs chants mélodieux de même que les rongeurs ne faisaient plus frémir leurs moustaches habituellement agitées. Personne n'osait même cligner des yeux. Le temps semblait comme suspendu. Chaque seconde semblait durer une éternité. Le souffle court, le cœur palpitant à une vitesse qui défiait l'entendement, ils attendaient. Attendre, tel était le mot d'ordre. La Terre était plongée dans une douloureuse attente à mesure que le ciel s'assombrissait et que l'air se raréfiait. L'heure du châtiment était-elle venue ? Serait-ce le début de ce qu'on appelait la fin ? On ne pouvait voir, ce jour-là, seulement de l'horreur, de la terreur absolue sur tous les visages. Ils s'étaient crus aux dessus des lois, aux dessus de tout et de tout le monde. Pour eux, il n'y avait que deux camps possibles : leurs alliés et leurs adversaires. Leurs amis et leurs ennemies. Ceux avec eux et ceux contre eux. Le bien et le mal. Trop de temps avait passé. Ils avaient oublié. Tout oublié sur le pourquoi et le comment de leur création. Ils L'avaient oublié. Ce croyant les maîtres du monde ils avaient oublié que ce dernier existait déjà bien avant eux, et qu'il avait déjà un Maître. Et maintenant ils allaient payer cette erreur de leur vie.

Les combattants étaient suspendus en vol, leurs gestes arrêtés brusquement en plein mouvement. Tels des centaines de statues, d'une beauté sans pareille, parfaite, inhumaine. Tels des milliers de statues, figées pour ce qui semblait l'éternité.

Tout d'un coup, une voix s'éleva de nulle part et de partout à la fois. Une voix aussi bien claire et aigue qu'indistincte et grave. Une voix, porteuse d'un sort terrible :

- Regardez autour de vous ! les apostropha la voix.

Un silence encore plus tendu salua Ses paroles.

- Le monde que Je vous avais laissé est tombé dans le chaos. Au lieu d'y apportez la paix vous y avez semé la guerre. Pourquoi vous ai-Je créé ? Pour quelle raison êtes-vous en ce monde ?

La foudre continuait de gronder, mais son intensité augmentait au fur et à mesure que la voix, lente et mortelle s'élevait.

- Votre unique mission était de préserver l'équilibre. Est-ce donc ainsi que vous accomplissez votre devoir ? Vous avez ruiné tous les principes que Je vous ai inculqués par orgueil et par cupidité. Vous vous êtes entredéchirés sans tenir compte de Mes avertissements. Le monde a besoin de ses deux facettes. L'une ne peut vivre sans l'autre. Mais vous avez fait rimer partage avec carnage.

Un cri résonna soudain dans la prairie. Puis deux. Puis dix. Maintenant, l'étrange immobilité et le silence qui les avaient habités auparavant avaient disparu, remplacés par les spasmes et la douleur. Une douleur si intense que ces êtres, autrefois si braves et courageux, si fiers et arrogants, qui avaient déjà affrontés des centaines de monstres et encourus les pires tortures sans broncher, laissaient à présent leur cris et leurs larmes couler à flots. Ce n'était pas seulement une douleur physique mais aussi une souffrance mentale. Il leur semblait qu'une part d'eux-mêmes leur était arrachée sans qu'ils puissent vraiment comprendre de quelle part il s'agissait.

- Vous avez négligé la vie ? continua la voix. Eh bien soit, qu'il en soit ainsi. A partir de ce jour, plus aucun de vous ne pourra jamais enfanter. Continuez de vous exterminer et vous serez voués à l'extinction. Tel est mon jugement.

Ange NoirWhere stories live. Discover now