Le Joueur de Fiddle - Tome 1

★ Chapitre 1

« — On affronte tous des tempêtes intérieures dont personne d'autres ne connaît l'existence. Ne jugez jamais une personne sans connaître son histoire. — »

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Est-ce qu'on vous a déjà largué dans un aéroport ? Non ? Moi, oui. Au moins, si l'on joue à "Je n'ai jamais", je serais certaine de parvenir à faire boire tout le monde avec ça. Un peu d'autodérision prévient mes larmes de dévaler mes joues avec fureur.

— Maëlle ? Dis quelque chose, je t'en prie.

Adrien me fixe depuis plusieurs longues minutes après m'avoir déballé tout un discours m'expliquant le pourquoi du comment il souhaitait rompre avec moi. Pinçant mes lèvres, je redresse la tête et mon regard croise ses yeux azur. Il ne semble pas ressentir le moindre regret ou once de tristesse. Adrien a toujours eu beaucoup de difficultés à exprimer ses émotions, mais j'aurais pensé que dans ce genre de circonstance, il ne resterait pas indifférent comme s'il m'annonçait la météo.

— Que veux-tu que je te dise ? Mis à part : est-ce que tu te fiches de moi ?

Il soupire et ses mains viennent se placer sur mes épaules. Je n'ai pas la force de les repousser. Dans ses yeux, je lis un brin de contrariété. Comme si ma réaction n'était pas celle qu'il attendait.

— Ma puce, je...

— Non, s'il te plaît, ne m'appelle pas comme ça.

Adrien me presse contre lui et son odeur familière inonde mes narines et brouille mes sens. Je ne me sens pas le courage de le repousser, bien que j'aimerais le savoir très loin de moi en cet instant. Me séparer de trois longues années de relation en quelques minutes est bien trop difficile. Alors, passive, je savoure son étreinte.

Comment est-ce possible que ce soit les mêmes bras qui m'ont soutenu ces dernières années qui me réconforte à présent après m'avoir fait tant de mal ?

Lorsqu'il s'écarte, une voix grésillante qui annonce l'embarquement imminent d'un avion pour Oslo. Immédiatement, je reviens à la réalité et à l'imminence de mon propre départ pour l'Irlande.

— Si ce n'est qu'une histoire de relation à distance, tu n'as pas à t'en faire, tenté-je de le convaincre. On peut y arriver, ce n'est pas si difficile. Tu sais, j'ai une amie qui...

— Ce n'est pas la peine. Ma décision est prise. C'est plus... logique et facile ainsi.

Je chasse une larme qui nait au coin de mon œil et fais un pas en arrière.

— Tu préfères donc abandonner lâchement un combat avant même le début de la bataille ?

— Tu parles toi-même d'un combat. Je pense que ça ne vaut pas la peine d'essayer et d'être tous deux malheureux. Comme ça, tu peux vivre pleinement ton voyage sans avoir à te soucier de moi.

Un ricanement mauvais m'échappe. Dans ma poitrine, mon cœur fait des loopings au début de chacune de ses phrases, dans l'espoir qu'il revienne sur sa décision.

— Que c'est gentil de ta part !

— Maëlle, s'il te plaît, ne le prends pas comme ça. J'aurais aimé qu'on en discute plus longtemps, mais tu vas bientôt décoller...

— Si tu m'en avais parlé plus tôt au lieu d'attendre que mon vol nous empêche d'en parler, ça aurait pu être différent.

Mes mots sont crus, mais je ne parviens pourtant pas à en effacer l'amour que je lui porte. Cette scène me parait irréelle. À vrai dire, je suis certaine que lorsque je vais monter dans cet avion, il m'enverra un message pour me souhaiter bon voyage et tout ça n'aurait jamais existé. Je l'aurais rêvé.