Une fille

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On marche entre les sombres silhouettes des arbres. Dustin est à côté de moi, je le sens nerveux, très nerveux. Lucas lui, a peur mais il sait que c'est pour la bonne cause. Mike je n'en sais rien, je n'arrive jamais à distinguer ses émotions, il est trop ou enfin pas assez... Il est froid, trop franc et il est blessant. Je suis plutôt sociable alors je n'ai pas eu de mal à être amie avec lui. Il est protecteur, c'est quelque chose que j'apprécie, il ne le montre pas, mais il nous aime beaucoup. Je ne l'ai pas remarqué tout de suite au début, mais c'est parce que j'ai plutôt l'habitude de le montrer quand j'aime beaucoup quelqu'un. J'aime beaucoup Mike, même si je ne le dis pas souvent.

Il est encore plus énervant que d'habitude  maintenant, Will n'est plus la. Il y a un vide dans le groupe. J'essaye tant bien que mal d'être chaleureuse et essayer de rire même si notre meilleur ami est peut être mort. On ne parle jamais de cette hypothèse, et pourtant en marchant là, tous collés les uns aux autres, du haut de nos 11 ans, dans une forêt noire, cherchant notre meilleur ami, j'entends presque la phrase qui se fait une place parmi les autres dans la tête de mes amis, celle qui fait le plus peur. « Il est mort. » Quand la pensée la murmure au fond de mon crâne une boule se forme dans mon ventre et une sérieuse envie de vomir commence à apparaître.
J'essaye d'effacer cette phrase et secoue légèrement la tête. Lucas le remarque :
-Tout va bien Sasha ?
-Oui je..
-ccchhhht !
Mike vient de nous interrompre, l'index levé vers le ciel, les genoux fléchis. En tête du groupe, face à un muret il nous chuchote :
-J'ai entendu un bruit derrière. On se retourne, lentement.
Une vague de peur parcourt mon corps, je ferme les yeux un instant et respire profondément, comme pour prendre plus de courage. Je n'ai jamais été vraiment courageuse, on va dire que je subis bien. Je ne sais pas vraiment comment expliquer, j'ai vécu des choses que je ne peux pas décrire, j'ai d'abord été adopté, à l'âge de 2 ans. Je ne me souviens de rien de ma vie avant d'être recueillie dans ma famille adoptive. Ensuite je n'arrivais pas à trouver ce je j'étais. Je comprenais que je n'étais pas comme les autres à cause de mes pouvoirs. Et j'avais toujours ce besoin de les utiliser presque tout le temps, comme un handicap. Je ne savais pas contrôler ce qui habitait mon esprit, mes bras, mes mains, mon corps entier. Puis toute seule, en grandissant, j'ai appris à les cacher, les utiliser en les canalisant pour ne pas abuser de ma force, et à stopper les crises. Les crises, elles apparaissent rarement mais dangereusement. Si je ne fait pas attention et que j'ignore les appels que me fait mon corps pour que j'utilise mes pouvoirs, ça peut finir en crise d'épilepsie.

Nous nous retournons, lentement. Maintenant dos au muret, on a devant nous comme décor toujours la nuit noire avec les silhouettes des arbres, mais sous nos yeux, peut être le personnage principal de la situation. Une fille.

012Where stories live. Discover now