Chapitre 9

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Mes yeux papillotèrent et s'ouvrirent lentement. Où étais-je ? Que s'était-il passé ? Je ne savais pas, je n'avais plus aucun souvenir, tout était flou, comme si une brume opaque voilait et emprisonnait ma mémoire.

Allongé dans une chambre qui ne semblait pas être une d'hôpital, je sentis mon corps protester alors que je tentais de me redresser. Je posai une main sur mon front et fis un effort pour me souvenir. Le seul mot qui surgit dans mon esprit n'était que : Franc.

Je me souvins. De tout. Ma « discussion » avec mon beau-père, ma chute dans l'escalier, ses coups, ma fuite et... je ne savais plus. J'avais dû m'évanouir.

La porte de la chambre s'ouvrit et laissa apparaître Soraya. Elle ne souriait pas. D'habitude elle était si joyeuse... S'asseyant sur le lit, elle me murmura simplement :

— Tu aurais dû m'en parler.

— Comment voulais-tu que je t'explique ce qui se passait ? On se connaissait à peine.

— Ça n'a pas d'importance ! J'aurais pu t'aider.

La jeune fille posa sa main sur la mienne et esquissa un petit sourire triste. Je me tus, à quoi bon répondre à ça ?

La porte s'ouvrît à nouveau. Un homme, d'une carrure imposante, entra. Je ne l'avais jamais vu, mais l'aura de sécurité qu'il dégageait me rassura immédiatement. Qui que ce soit, il allait m'aider.

— Comment te sens-tu ? me demanda-t-il.

— Ça va, réussis-je à balbutier.

— Que s'est passé pour que tu sois dans cet état ?

Ces questions me mettaient mal à l'aise. J'avais l'impression d'être au commissariat. Je ne répondis rien, espérant que le silence s'étire entre cet homme et moi. Mais celui-ci ne laissa pas le silence s'installer.

— Il serait préférable que nous aillons à l'hôpital pour un contrôle. À première vue tu n'as rien de cassé, mais tu as de nombreuses contusions. 

— C'est grave ? s'enquit Soraya.

— Je ne suis pas médecin, c'est difficile à dire.

Les yeux gris de l'homme étaient emplis d'un sentiment étrange et je sus qu'il avait parfaitement compris ce qui m'était arrivé. Devais-je être soulagé ou au contraire angoissé à l'idée qu'il ait découvert mon secret ? Je n'avais pas le temps de répondre à cette question que l'homme reprit la parole.

— So nous y allons tout de suite.

Ma jeune amie hocha de la tête et m'aida à me lever. Je sentis mes jambes trembler et je vacillai, je serais probablement tombé si cet homme ne m'avait pas rattrapé.

— Doucement, dit-il. Allons-y ça ne prendra pas longtemps.

***

J'avais toujours détesté les hôpitaux. Je ne savais pas pourquoi mais tout ce blanc m'angoissait, l'odeur du désinfectant m'étouffait et l'adrénaline qui régnait en ces lieux ne faisait qu'augmenter la mienne.

Assis aux urgences, ce qui me paraissait exagérer, je tentais de réprimer mon anxiété. Soraya était proche de moi et parlait avec son père.

— M. MacDorty ?

Un infirmier s'approcha et interpella le père de Soraya. J'avais des sueurs froides alors que nous traversions les couloirs menant vers l'un des médecins de garde.

Une porte s'ouvrît et avec douceur, M.MacDorty me fit entrer avec Soraya. Je m'installai devant le docteur qui croisa les mains sur son bureau. Il nous dévisageait tour à tour avant de demander :

— Que puis-je pour vous ?

— Ce jeune homme est arrivé chez moi couvert de bleus et de nombreuses blessures. Je veux vérifier que rien ne soit cassé.

***

La voiture de Stefan s'arrêta devant chez moi. Le rendez-vous médical s'était plutôt bien passé, ils n'avaient rien découvert, j'avais affirmé être tomber dans les escaliers. Pourquoi n'avais-je pas dit la vérité, tout aurait pu de terminer ?

J'ouvris la portière et remerciai le père de Soraya de m'avoir ramené. Je fronça alors les sourcils en le voyant sortir de la voiture. Mais que faisait-il ?

— Je vais t'accompagner, déclara-t-il simplement.

— Ce n'est pas la peine !

— Je suis capitaine de gendarmerie Marc, on ne peut pas me mentir, répliqua-t-il. Je sais bien que tu n'es pas tombé dans les escaliers.

— Je vous assure que oui !

J'étais en train de perdre ce débat. Je ne pouvais pas prendre le risque que mon secret soit découvert, ce serait catastrophique !
Je n'avais cependant pas le temps de répondre car la porte de la maison s'ouvrit et mon beau-père surgit, furieux.

Je tressaillis alors que Franc me fusillait du regard. L'angoisse monta le long de ma colonne vertébrale et j'espérais que Stefan avait remarqué mon malaise, il était mon seul espoir d'éviter les coups.

— Te voilà enfin ! s'écria Franc. Où étais-tu passé ?

— Je...

— Il était avec moi, intervint Stefan en voyant mon anxiété.

— À qui ai-je à faire ? demanda mon beau-père.

Il était furieux, je le voyais aux tremblements de ses mains. Stefan sortit alors un insigne de sa veste en cuir et déclama solennellement :

— Capitaine Stefan MacDorty.

Mon beau-père ne répondit rien et se dirigea vers la maison après m'avoir fait un signe de main. Je m'apprêtais à partir mais Stefan me retint :

— S'il t'arrive quoi que ce soit, appelle-moi. Je ne te laisserai pas tomber Marc.

— Merci Monsieur.

Je m'éloignai et entrai dans la maison. À peine la porte s'était-elle refermée que mon beau-père m'asséna une gifle du revers de la main. Je m'effondrai contre la porte alors qu'il m'envoyait un coup de pied dans l'estomac.

Ça ne s'arrêtera donc jamais ? Il n'y avait que moi qui pouvait faire cesser mon enfer. Je ne voulais pas de cette vie, je n'en voulais plus.

J'esquivai le coup de Franc et sortis en courant. Stefan n'avait pas bougé d'un pouce. Savait-il ce qui se passait ?

— Stefan ! Je veux porter plainte pour violences sur mineurs !

— Je ne sais pas pourquoi tu as entendu aussi longtemps, mais tu as pris la bonne décision.

Il me sourit et regarda Franc de ses yeux gris. Tout en me poussant vers la voiture, il saisit son téléphone et appela l'un de ses collègues. Il finit par regarder Franc et déclara :

— Vous ne causerez plus de tords. La jeunesse est trop courte pour être gâchée par des enfoirés dans votre genre.

Tout était fini... Ma vie pouvait recommencer. Enfin commencer.

DéséquilibreWhere stories live. Discover now