II. Rencontre colorée

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la lumière des étoiles brillant au loin font luire les yeux sombres de l'inconnu

mais il n'a rien de terrifiant, rien de malveillant, mais plutôt tout de ce qui me met en confiance chez quelqu'un,

même si je n'ai rarement offert ma confiance à quelqu'un.

l'homme n'a plus l'air tout jeune, et avec ses rides et ses cheveux blancs, il a l'air d'un grand-père qui veille sur ses petits enfants.

alors quand il m'a tendu, d'abord un mouchoir en tissu de sa poche, puis sa main tâchée de couleurs vives,

je me suis essuyée les yeux

                                                       et je l'ai suivi.

je contemple les étoiles luisant dans le noir de la nuit et les relie entre elles pour créer des formes inexistantes, je tente de ne pas partir en courant pour fuir — comme toujours — la gentillesse du vieil homme, j'espère connaître d'où viennent les couleurs si jolies tâchant en une toile abstraite les mains calleuses de cet homme qui m'est toujours inconnu, et je tente d'imaginer où il m'emmène en espérant ne pas devoir m'enfuir car après tout, je ne le connais pas, même si — pour une fois — je tente de suivre mon instinct.

alors quand il bataille pour ouvrir la porte d'un vieil appartement, j'hésite à partir,

mais reste figée sur place par ce que je vois :

tout le contraire de chez moi.

de multiples tableaux représentant tout ce qu'on peut voir sur Terre recouvrent les murs de l'appartement, si chaleureux avec tout le mobilier teinté de tâches colorées. je ne sais toujours pas ce que je fais là, alors j'attends en dévorant du regard l'art qui fait vivre cet endroit, qui le fait onduler de couleurs.

le vieil homme me tend une couverture et un thé, puis d'une voix douce, me demande :

« Qu'est-ce qui t'a mise dans cet état, jeune fille ? »

je recule, surprise. mes mains gelées triturent la couverture posée sur mes genoux.

c'est alors qu'un adolescent de mon âge surgit dans le salon, les cheveux en bataille avec de la peinture jusque sur le nez.

« Papy, où est-ce que... » commence-t-il.

l'homme me désigne de la tête, l'adolescent se retourne, et je n'ai pas le courage d'affronter son regard. après tout, je ne sais toujours pas ce que je fais là.

« Oh », lâche-t-il.

j'ose lever le nez de ma tasse de thé pour faire face à de grands yeux bruns et un pull en grosse maille tâché d'un arc-en-ciel. le vieil homme à son âge d'or.

« Tu me fais penser à quelqu'un, du temps où j'étais plus jeune », sourit le grand-père. « Le même regard trop plein d'émotions. »

je le fixe brusquement.

« Tu as les mêmes yeux qu'Anna... Est-ce que je t'ai raconté l'histoire d'Anna ? Ah non, suis-je bête, tu n'es jamais venue ici. Anna, c'était comme un ange tombé sur Terre. Elle contenait toute la peine du monde, et peignait pour extérioriser ses émotions. Un peu comme sa catharsis, tu vois ? Mais c'était plus profond. »

AïchöWhere stories live. Discover now