Prosaïk

FΛUST

Mon ami s'amusait à faire déborder
Le verre qu'il avait manqué de renverser
Sur le comptoir auquel il s'était appuyé
Pour ne pas s'effondrer sur le sol esquinté.

Il m'avait retrouvé, ce soir-là, dans un bar
Dont nous ignorions l'heure de la fermeture,
Et nous allions sortir, lorsqu'une créature
Sembla soudainement surgir de nulle part.

Elle s'était dressée, en déployant ses ailes,
Entre nous et la porte, et nous dévisageait
En dévoilant les cornes que son front couvrait,
Déclarant qu'elle avait été chassée du ciel.

La voix de cette bête était grave et profonde
Et s'adressait à mon ami qu'elle approchait,
En murmurant le nom des choses qu'il aimait,
Pour jeter dans ses yeux des images immondes.

Ils me rappelaient Faust et Méphistophélès,
Vilains comme l'esclave et beaux comme le maître,
A se moquer des fautes qu'ils pouvaient commettre,
Se faisant l'un à l'autre les mêmes promesses.

Et comme il ignorait tout de l'éternité,
Mon ami proférait des abominations,
En caressant la plume qu'il avait trempé
Dans le sang qui coulait des lèvres du démon,

Et lui sembla soudain, en retroussant ses manches,
Que la peau de ses bras était devenue blanche,
Et planta son regard plein de confusion
Dans le mien qui brûlait de fascination.

Ħeиrik