🧜‍♂️Le Jeune Capitaine

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La Petite Sirène, conte écrit par Andersen en 1837.

Il était une fois, dans l'archipel de Luz del Auro, la reine Isabella à qui le Roi Pirate avait confié le contrôle et la protection des Îles Reines. Cette souveraine avait été autrefois une excellente capitaine, et il s'avéra qu'elle était une reine plus juste et aimante encore. Au fil de ses aventures sous les ordres du roi Christián, elle avait eu cinq fils, tous aussi aventureux et charmants les uns que les autres.

Le plus jeune d'entre eux, Esen, était aussi le plus rêveur et il passait le plus clair de son temps à regarder l'immensité de la mer entourant leur île, songeant à toutes les aventures de sa mère et à celles qu'il aurait un jour la chance de vivre. Comme tous les enfants de l'île et comme ses frères aînés, il savait naviguer et nager aussi bien que marcher, mais il n'avait pas encore le droit de partir seul en mer. Ses frères aînés commandaient chacun l'un des grands navires royaux et dirigeaient la flotte de la reine, mais lui était encore trop jeune et il se languissait du jour où il aurait enfin vingt-cinq ans et où on le laisserait partir, voguer vers le large.

Lorsque ce jour tant attendu arriva, les quatre princes entrèrent en criant et en riant dans la chambre de leur petit frère pour lui souhaiter son anniversaire et l'encourager à revêtir le bel uniforme de capitaine que sa mère lui avait offert. Le cœur battant la chamade, Esen s'habilla à la hâte et courut avec ses aînés à travers le palais jusque sur le port où l'attendait son navire.

Comme pour ses frères avant lui, la reine avait fait construire un voilier, baptisé Le Prince du Vent et l'équipage était composé des meilleurs amis du prince qui avaient été élevés à ses côtés pour apprendre les métiers de la mer. Enchanté, son beau visage barré d'un immense sourire, Esen monta à bord de son navire avec ses amis et ils prirent le large sous les acclamations des autres princes et de la foule assemblée sur les quais.

— Bon voyage, petit frère ! cria l'aîné de toute sa voix.

Esen les salua de la main depuis le gouvernail puis il se tourna vers la mer étincelante de soleil, certain d'être sur le point de vivre la plus belle journée de toute sa vie. Ils naviguèrent gaiement sous l'immensité bleue du ciel, chantant de tout leur cœur des complaintes et des vieilles rengaines du port, criant au ciel et à la mer leur bonheur, leur jeunesse et leur liberté.

— Capitaine ! s'exclama la vigie. Rocher des Sirènes en vue !

Le Rocher des Sirènes était un endroit magnifique, une île de roche née du squelette pétrifié d'un gigantesque monstre marin, mort depuis des millénaires. C'était également le point le plus visible du Royaume des Profondeurs, l'un des rares endroits où il s'approchait jusqu'à percer la surface de l'océan. De la végétation luxuriante poussait par endroits et l'eau y était si limpide qu'on pouvait voir danser les sirènes en les pensant près de la surface, alors qu'elles étaient loin, bien loin en dessous. C'était l'un des endroits qu'Esen aimait le plus au monde et il fit réduire la voilure pour ralentir Le Prince du Vent et ainsi pouvoir ouvrir grand les yeux et tout admirer.

Des sirènes chantaient dans le lointain, assises sur des rochers, peignant leurs longs cheveux ou sculptant du corail et des coquillages. D'autres nageaient vivement dans les vagues, comme des éclats de couleur étincelants sous le soleil. Certaines s'arrêtèrent près du navire pour saluer les hommes de l'équipage avec des sourires amicaux. Le peuple de la mer avait toujours été en paix avec les pirates, et plus encore depuis que le plus jeune prince des Profondeurs avait épousé le fils du Roi Pirate. En vérité, les sirènes ne représentaient un danger que pour les marins du Lorion, et surtout de la Ligue des Marchands, dont les lourds navires passaient parfois trop près de leurs cités. Ces hommes étaient arrogants et pensaient dominer la mer, au lieu d'accepter de travailler avec elle. Cela faisait d'eux les proies favorites des pirates, et bien souvent les sirènes les prenaient en chasse, de sorte que les épaves de ces navires venaient couvrir les fonds marins de pièces d'or et de trésors innombrables.

Contes & Histoires de PiratesWhere stories live. Discover now