Après minuit » DYBALA ✓

Après minuit - trois.

-Dis, Riz, à quelle heure rentre Todd ce soir ?

-Il finit à 21h, il sera là dans les coups de 21h20, comme d'habitude, pourquoi ?

Je haussai les épaules.

-J'ai un match de foot à regarder.

Ma sœur abandonna son assiette des yeux pour me regarder, surprise.

-Un match de foot ? Toi ?

-Ouais.

-Je ne savais pas que tu suivais le foot.

-Je ne suis pas le foot. Mais j'ai fait un pari avec un ami.

-Un ami ? elle répéta, encore plus choquée, et il y avait de quoi : je n'avais pas d'amis. Je n'avais jamais réussi à m'en faire quand j'étais plus jeune, et puis j'avais fini par abandonner. Je continuais d'assurer à ma grande sœur que je n'avais besoin de la compagnie de personne, et elle faisait semblant de me croire, même si je sais qu'en vérité, elle s'inquiétait pour moi. Todd aussi s'inquiétait, même s'il était mille fois plus doué que Rizlane pour le cacher. Mais je leur assurais sur facture qu'être seule ne me dérangeait, et ça n'était pas faux. J'avais l'habitude, alors ça ne me pesait pas.

-Comment est-ce qu'il s'appelle ? Il est avec toi à l'université ?

-Il s'appelle Paulo. Et non, je ne crois pas qu'il aille à l'université.

-Oh, est-ce que c'est lui que tu vas voir la nuit, quand tu disparais pendant plusieurs heures ? elle m'interrogea, et sans même savoir pourquoi, je rougis. Okay, wow, pourquoi tu es toute rouge ? Qu'est-ce que tu fais avec ce mec, au juste ? elle paniqua, et je secouais la tête.

-Je ne savais pas que tu savais que je sortais pendant la nuit.

-Eiza, bien sûr que je le sais. Tu le fais vraiment discrètement, mais je le sais quand même.

Je hochai la tête.

-Au début, je sortais juste parce que je n'arrivais pas à dormir, et j'allais juste au stade parce que je sais qu'il est toujours vide. Et puis il y a deux jours, il était là.

-En plein milieu de la nuit ? elle aussi un sourcil, et son vif intérêt pour cette histoire me fit intérieurement sourire.

-Il dit qu'il a besoin de s'entraîner pour devenir footballeur pro.

-Et jouer dans l'équipe que tu veux regarder jouer ce soir, elle connecta tout ce que je venais de lui dire, et j'acquiesçai.

-Oui. Qui est la Juventus de Turin.

Rizlane fronça les sourcils.

-Ce n'est pas l'équipe que Todd déteste ?

-Oui, mais t'en fais pas pour ça, je lui assurai, alors que je savais très bien que quand Todd allait rentrer, la vue de ce match à la télé allait provoquer de vive réaction chez lui.

Et je n'avais pas tort, car bien évidemment, il passa la porte pile au moment où un joueur de la Juve marqua un but.

-Mais qu'est-ce que tu regardes, Eiza ?! Todd s'exclama, se pointant devant la télé. Si tu te mets au foot, supportes au moins les bonnes équipes !

-La Juve est première du classement de Serie A, je lui fis remarquer, et il ouvrit grand ses yeux.

-Mais depuis quand est-ce que tu t'y connais en foot ?! Est-ce que tu supportes la Juventus en secret depuis que tu vis ici ?

Je haussai les épaules. J'avais juste fait une recherche avant de regarder le match, mais il n'avait pas besoin de le savoir. J'aimais bien agacer Todd.

-Et ces abrutis mène un à zéro...il râla.

-Tu devrais en profiter pour t'asseoir et regarder, je lui fis remarquer. S'ils représentent l'ennemi pour toi, il faut les observer.

Même s'il était réticent au début, Todd finit par s'asseoir à côté de moi, et c'est comme ça qu'on regarda le reste du match tous les deux. Il lui arrivait de faire des commentaires auxquels je ne comprenais rien du tout, mais j'étais heureuse de partager ce moment avec lui, finalement.

La Juve gagna son match sur un score de deux à zéro, ce qui me laissa perplexe. Je ne savais pas vraiment si je voulais perdre ou gagner le pari que j'avais fait avec Paulo, après tout, mais il semblait que j'avais gagné.

Cependant, quand je le rejoignis, peu après minuit, je ne pris même pas le temps de le saluer, prenant directement le chemin des cages.

-Qu'est-ce que tu fais ? On n'a pas gagné 3-0, il fronça les sourcils, et je haussai les épaules.

-Tu ne peux pas t'entraîner à être un footballeur pro si personne n'est dans tes cages, je souris, et il me rendit mon sourire.

-T'es pas obligée de faire ça, Eiza.

-Je sais.

Mais je restai dans les cages. Et même si je n'avais vraiment aucune idée de ce que je faisais, j'avais enfin l'impression de compter. Enfin l'impression d'être utile.

/publié: 25.03.18/