29 - Psycho thinks Christmas is sad

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     Je me lève, me maquille et m'habille bien. Comme à Noël ma famille a l'habitude de toujours nous prendre en photos quand nous ouvrons nos cadeaux, il est coutume de bien s'habiller pour être élégant sur les photos.

Je ne sais même pas quand cette tradition a commencé, mais j'ai le souvenir d'avoir toujours fait ça.

Alors je ne me pose pas de questions, et je mets de la BB crème, de la poudre, du blush, du fard à paupières doré et beige, de l'eye-liner, du mascara et un peu de rouge à lèvres couleur pêche. Je me fais un chignon pas super travaillé, et mets une robe noire et blanche à manches longues et un collant. Je suis plutôt satisfaite du résultat, et puis mon maquillage cache la plupart de mes boutons.

Je descends, et vois un tas de cadeaux sous le sapin, ce qui me fait esquisser un petit sourire. Quand mes frères sont arrivés et que tout le monde est prêt, nous sommes autorisés à ouvrir nos cadeaux respectifs. Au final, j'ai eu pleins de livres, une tablette graphique et un joli collier.

Je remercie tout le monde, puis nous avons quartier libre jusqu'au repas. Ma mère et mon père commencent à le préparer, et je sors en attrapant une écharpe, mon téléphone et mes écouteurs. Je marche lentement jusqu'au parc. Je m'assois dans le froid sur une des balançoires, et mets ma musique.

« The stain of RED that colors the pavement
Painted with blood of somebody you love
Is this the sacrifice for the broken ?
Losing the purest of what's in your heart »
(« RED » de Survive Said the Prophet)

Les paroles de « RED » résonnent dans mes oreilles et j'ouvre Snapchat. J'ai oublié de faire mes flammes, alors je prends rapidement une photo de la balançoire vide à côté de moi et l'envoie.

Quand j'étais petite, j'attendais Noël avec impatience, en comptant les jours. Le jour enfin arrivé, j'étais émerveillée par la magie de cette fête. Les cadeaux, la bonne humeur, les chansons qu'on ne peut sortir qu'une fois dans l'année, le repas somptueux, la famille qu'on ne voit pas souvent.

Mais maintenant, je la vois complètement différent. J'ai des cadeaux, mais je dois faire attention au prix, car le père Noël n'existe pas. La bonne humeur n'est que factice. Pourquoi faire comme si tu allais bien quand c'est faux ? Les chansons, ce sont toujours les mêmes. On les connaît par cœur, et elles restent dans la tête pendant trop longtemps. Le repas est toujours bon, mais les adultes parlent toujours de sujets nuls, comme la politique, la météo ou l'actualité... Et la famille... Je n'ai pas besoin de voir les gens pour penser à eux. Je fonctionne comme ça.

Et je me déprime à penser comme ça. J'aurais préféré garder ma naïveté d'enfant qui trouvait que Noël était magique. Qui restait éveillée toute la nuit pour attendre le père Noël, mais qui finissait par s'endormir vers minuit. Je me rappelle qu'une fois, avec mes cousines, on avait cru entendre les clochettes des rennes. On en était persuadées. Mais on avait dû rêver...

Je me balance un peu sur la balançoire, en pensant aux bons moments que Noël m'avait apporté. Maintenant, je me souviens surtout des disputes familiales. Cette atmosphère pesante quand les adultes s'engueulent pour des histoires que nous, adolescents, ne comprenons pas. Et les enfants n'entendent pas, comme ils sont à une table différente. C'était mieux, avant. Quand je pensais que les adultes ne se disputaient pas.

Je préfère donc partir de la maison avant le drame, pour ne rester que dans les meilleurs moments. Si c'est pour entendre qu'il fallait dorer la dinde avant de la faire rôtir, non merci. Même le vent glacé du parc est plus accueillant.

Je m'arrête de me balancer, et pose mes pieds au sol. Je regarde l'heure sur mon téléphone. Il n'est pas si tard... J'ai encore un peu de temps pour rester ici...

Psycho needs helpWhere stories live. Discover now