Vivre ou mourir

24 2 0
                                    

Mon souffle est court, j'étouffe, mais je ne dois pas m'arrêter. Mes bras me font mal, ils se tétanisent, à force de porter ce bébé, mon bébé. Je sais que son père nous court après, je ne peux pas ralentir. Il ne doit pas nous rattraper.

Affolée, je rentre dans la maison avec fracas, et m'enferme dans la salle de bain, à l'étage. A double tour, je suis tranquille. Je pose le nouveau-né sur un tabouret.

Il n'en veut pas, de ce bébé. Alors je ne vois que deux solutions à cela. 

Scénario 1 :

Il va bientôt arriver. Je n'ai plus beaucoup de temps. Je suis dans un état second, mais je suis persuadée que si je mets fin à mes jours, alors son père le prendra en charge. Il ne pourra pas l'abandonner. Il n'aura plus que lui, comme famille, et pour se souvenir de moi.

Je regarde mon bébé, avec amour. Je lui dis au revoir. Je fais en sorte qu'il ne puisse plus poser ses yeux sur moi, et j'en finis avec la vie.

Je suis morte. Je suis morte mais je suis toujours là, à voir mon corps allongé par terre, à voir la salle de bain, à voir toute la scène. Il est enfin arrivé à nous rattraper et il ouvre la porte de force. Il hurle de terreur. Il se rue sur mon corps et le tient dans ses bras. Il passe un long moment ainsi, à bercer mon enveloppe charnelle tout en sanglotant. Puis, il finit par me délaisser pour prendre le bébé, qu'il serre contre son cœur.

Nous sortons dans le jardin. Il s'assoit par terre, le bébé toujours dans ses bras, et moi juste à côté de lui, sur une grosse pierre. Je suis morte et pourtant je sens le vent caresser mon visage. Les oiseaux, je les entends qui chantent. Le soleil me réchauffe avec douceur. Je comprends que la vie continue pour d'autres, mais moi, je me sens détruite. Morte et vivante à la fois. Vivante et morte à la fois.

Scénario 2 :

Personne n'est au courant que je l'ai mis au monde. Je pourrai toujours faire croire à une fausse couche, seuls lui et moi serons au courant de la vérité.

- Je suis désolée, je suis si désolée...

Les mains autour du cou de mon enfant, je ferme les yeux pour ne pas le regarder mourir, mais toutes les sensations dans mes mains s'impriment dans mon esprit et m'emplissent d'une douleur incomparable qui me donne envie de hurler comme si un poignard s'enfonçait dans mon cœur.

J'ouvre le verrou. Son père m'attend de l'autre côté. Sans un mot, il me prend dans ses bras. Je ne pleure pas. Je ne peux plus parler. J'ai mal.

Nous sortons dans le jardin. Il s'assoit par terre, moi à côté de lui, sur une grosse pierre. Je sens le vent caresser mon visage. Les oiseaux, je les entends qui chantent. Le soleil me réchauffe avec douceur. Je comprends que la vie continue pour d'autres, mais moi, je me sens détruite. Morte et vivante à la fois. Vivante et morte à la fois.

Les histoires dans mes yeux - Journal de rêvesWhere stories live. Discover now