19 Février 2016

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Hakim,

J'ai longuement hésité avant de t'écrire ces quelques lettres et je me lance enfin parce-que je sens que je ne vais plus tenir longtemps et je ne veux pas partir sans te donner d'explications. Il faut que tu saches la raison de mes maux.

Après mûre réflexion, je me suis rendue compte que toi et moi, on ne pourra plus jamais aller de l'avant. Malgré le fait que je t'aime à en mourir. J'aurais tout donné pour toi mon amour, Dieu en est témoin, j'aurais tout donné...
Mais j'ai été forcée à donner à quelqu'un d'autre ce que j'aurais aimé te donner à toi...
Excuses-moi d'avance si l'encre bave, je n'arrive pas à contrôler mes larmes.

J'aurais aimé vivre avec toi Hakim, j'aurais voulu me marier, avoir des enfants, puis enfin, mourir avec toi. L'ordre logique des choses.
Mais contre toute attente, moi la fille pleine de vie, folle d'amour, je suis contrainte de sauter les étapes et d'en finir tout de suite. Et je sais que tu vas m'en vouloir, je sais que tu vas te demander pourquoi je n'ai pas patienté. Ce n'est pas possible Hakim, ce n'est même pas envisageable de patienter plus longtemps...
Plus les jours passent, plus je me meurs. Je ne supporte plus le simple fait de prendre une respiration, j'ai mal, j'ai si mal. Je ne saurais te décrire comme je vis tout en étant morte. Alors il est temps que je fasse taire mes souffrances.
Mais avant de te livrer à toi-même avec la nouvelle de ma mort, il faudrait peut-être que je t'explique comment tout a commencé.

Tout a commencé pendant les vacances d'été, il y a deux ans : en août 2014 plus précisément. Je peux te dire que je n'oublierais jamais cette date, tout comme je n'oublierais jamais ton beau visage, ta générosité, ton grand cœur.
Revenons-en à notre histoire. On venait de se mettre ensemble, je pense que tu n'auras pas de mal à t'en souvenir. Je t'avais fais tourner en rond pendant deux mois, avant de me poser avec toi. Avec du recul, si tu savais comme je regrette tout ce temps perdu aujourd'hui. Je regrette amèrement wAllah.

Enfin bon, je t'attendais dans le parking qui se trouve derrière chez toi, tu étais censé me rejoindre afin qu'on passe du temps ensemble. Tu avais promis de m'emmener au restaurant.
Ton frère est passé par là au même moment, il s'est approché en me voyant de loin. Je l'aimais bien à ce moment-là, je lui ai alors tendu la main par pure politesse et tu sais ce qu'il a fait ? Il a tiré ma main pour me rapprocher de lui et me faire la bise. Je sais que ce n'est pas la fin du monde, mais tout à commencé par ça, pourtant je n'avais pas donné d'importance à ce petit geste. Je n'ai pas jugé important de t'en parler.
Lorsque tu m'a rejoins par la suite, on a passé une magnifique après-midi. De toute façon je passais toujours de magnifiques moments avec toi, je n'ai jamais perdu un millième de seconde de mon temps avec toi. Tu m'as offert les plus beaux moments de toute ma vie.
Enfin bon, je m'éloigne du sujet. Je te raconte tout cela afin de contextualiser la situation.
Cette rencontre avec ton frère m'est revenue en tête quelques jours plus tard. Je ne sais pas comment l'expliquer, mais mon instinct m'a alertée. J'avais tout juste senti que quelque-chose clochait. De toute façon tu le sais bien, j'étais rodée, je reconnaissais les personnes avec de mauvaises intentions. Mais c'était ton frère, c'était ta chair, ton sang, j'avais pas le droit de te demander quoique ce soit par rapport à lui, j'avais pas le droit de créer un conflit familial.

Si j'avais su...

Je ne veux surtout pas t'offenser, mais si j'avais su, j'aurais coupé tout lien avec toi Hakim, pour ne pas avoir à vivre cette torture physique et morale. Je sais que c'est injuste, tu ne m'as jamais fais le moindre mal. Je ne regrette pas de t'avoir aimé et d'avoir dépensé tout mon temps libre avec toi.

C'est quatre mois plus tard que je l'ai revu, en janvier, alors que j'avais passé un été tranquille  durant lequel j'avais été pleinement heureuse.
C'était un de ces jours de janvier durant lesquels il fait tellement froid que personne n'ose mettre les pieds dehors. Tu étais censé travailler mais tu avais attrapé une grippe, alors j'ai séché les cours et suis venue m'occuper de toi. J'aime prendre soin de toi, je ne supporte pas voir qu'un mal te touche mon amour.
Ce jour-là, on était censés être seuls chez toi, ton père travaillait et tes sœurs étaient en cours. Et tu m'avais aussi dis que ton frère était censé travailler. Je t'ai forcé à prendre une douche, pour te débarrasser de tout microbe. J'ai fini par te convaincre, donc tu t'es exécuté, tu as pris une bonne douche.
Pendant que tu étais sous la douche, je regardais la télé. Soudain, j'ai entendu la porte d'entrée grincer. Je me suis alors levée en sursaut et ai constaté que c'était ton frère qui venait d'entrer. J'ai fais mine de n'avoir rien entendu et d'être concentrée sur la télévision, mais ce n'était pas suffisant pour l'arrêter.
Il est têtu. Il est entré dans le salon et a posé son regard sur moi pendant 2 bonnes minutes sans prononcer un mot. Il a ensuite prononcé mon prénom avec ce truc, comme s'il me mettait en garde.

Lui: Nihed.

Je l'ai donc regardé. Il me fixait avec un regard menaçant.

Lui: Il est où Hakim ?

C'était la première fois que j'entendais bien la sonorité de sa voix, il ne m'avait jamais lâché plus d'un mot, "salam". Sa voix m'a donné des frissons, pas le genre agréable, non, non, loin de là Hakim, j'ai ressentis un frisson de terreur. Je le sentais pas honnête, je sentais ce truc, mais je lui ai quand même répondu, fallait pas qu'il remarque que j'étais terrifiée.

Moi: Sous la douche.

Il s'est alors installé en face de moi, j'ai compris qu'il n'en avait pas fini. Je me suis efforcée de me concentrer sur la télévision, mais son regard me perturbait. Lui, il ne regardait pas la télévision, il me regardait moi, tel un psychopathe.
J'ai attendu une dizaine de minutes et me suis levée pour me rendre dans la cuisine. Mais putain Hakim, il se déplaçait furtivement, pire qu'un vampire celui-là. A peine j'ai eu le temps de souffler, qu'il se trouvait adossé contre le mur, en face de moi.
Mes doutes se sont alors confirmés. Je le redoutais, il me faisait peur. Assad me faisait peur.

Il a sourit en me voyant baisser les yeux en me grattant la tête. Il a alors commencé à s'approcher. Plus il s'approchait, plus je reculais. Lorsque j'ai sentis le carrelage glacé de la cuisine contre mon dos, j'ai sentis une vague de peur m'envahir. Je n'avais plus aucune chance de lui échapper.
Il m'a plaquée fermement contre le mur et s'est mit à caresser mon visage du bout de son nez, je sentais son souffle chaud contre ma peau. Je ressentais son désir pour moi, il m'écœurait fortement. 

Je me demandais comment son désir pouvait être aussi puissant, comment il pouvait ressentir une telle envie alors que je lui ai jamais donné l'occasion de me désirer, je me suis toujours faite toute petite.
J'ai compris rapidement que le problème venait de toi. Il m'a dit plus tard que c'était parce-que tu lui racontais chaque moment passé avec moi. Tu te hâtais à lui raconter nos rires, nos disputes, nos baisers, tout...
Malgré tout ça omri, je ne peux même pas t'en vouloir. C'est ton frère, tu n'aurai pas pu te douter de tout ça, c'est ton frère.
C'est aussi celui qui me pousse au suicide au jour d'aujourd'hui.

C'est ton frère.

-Nihed

Poupée est abiméeWhere stories live. Discover now