13 : La journée des compliments pour Gabin.

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J'ai pris l'initiative d'aller chercher Agathe après les cours. Apparemment ça plaisait aux filles, le coup du beau mec qui l'attendait devant les grilles du lycée avec une bécane d'enfer, une cigarette à la bouche et un blouson en cuir sur les épaules. Sauf que je ne fumais pas, je portais une doudoune avec de la moumoute, et je ne possédais qu'un scooter avec des flammes dessus. Ça devrait le faire quand même, c'était l'intention qui comptait.

Je l'ai vue arriver. Elle n'était pas avec son groupe d'amis marchant en ligne, un livre à la main et le sourire aux lèvres. Elle n'avait rien de ces plans de films américains. Ses cheveux ne volaient pas au vent, elle ne portait pas une belle jupe avec des chaussettes hautes. C'était un mercredi matin. Et comme tous les mercredis matins, Agathe n'avait pas envie de faire un effort pour quatre heures sans bouger d'une salle à écouter parler d'économie. Elle portait un vieux jogging avec de la peinture blanche sur une jambe, avait enfermé ses frisettes dans un chignon serré, et n'avait pas cherché à se maquiller. Quand elle m'a aperçu, ses écouteurs dans les oreilles, elle a soupiré.

─ Génial, a-t-elle dit, lasse, maintenant tu vas rompre avec moi parce que tu m'as vu dans ma tenue du mercredi matin, et aucun garçon ne peut survivre à ma tenue du mercredi matin.

─ J'aime bien ta tenue du mercredi matin, elle est beaucoup mieux que ma tenue du mercredi. Et puis honnêtement, tu es toujours belle, peu importe ce que tu portes.

Elle a plissé les yeux, surprise que je ne moque pas d'elle, comme j'avais l'habitude de le faire.

─ Qu'est-ce qui t'arrive ? a-t-elle demandé, préoccupée. Gabin, est-ce que tu as pris de la drogue ? Tu me le dirais si tu te droguais, hein ?

J'ai ri.

─ Non, j'ai rien pris. Mais tu sais, hier c'était la journée internationale des compliments. Et comme on ne s'est pas vu hier, j'ai décidé de la déplacer à aujourd'hui.

─ Tu as décidé de déplacer une journée internationale comme ça ? Il y a des gens qui sont prêts à manifester là.

Un silence s'est interposé, et finalement, dans un sourire, Agathe a cessé d'être sur la défensive, et s'est approchée de moi pour m'embrasser, passant ses bras autour de mon cou. Après dix bonnes secondes, elle s'est détachée pour évaluer la position dans laquelle on se trouvait : moi appuyé contre le siège de mon scooter, elle pendue à ma nuque pendant que je lui entourais la taille.

─ J'arrive pas à croire qu'on est devenu ce couple en jogging, baskets, et doudoune en moumoute, qui s'embrasse sur un scooter à la sortie du lycée. Tu m'as rendue beauf.

─ Ah ouais, là, on est vraiment à deux doigts d'appeler nos enfants Kilian et Lorenzo, et d'aller passer nos vacances au Cap d'Agde.

Elle a ri, et rien que pour entendre cet éclat de voix, j'aurais pu passer le reste de ma journée à dire des conneries. J'avais souvent entendu, de certains des mes potes, qu'une fois qu'on sortait avec la fille qu'on avait convoitée pendant une longue période, on se rendait vite compte qu'elle était fade. Ils disaient qu'on s'ennuyait rapidement, qu'il n'y avait plus cette complicité donnée surtout par le jeu du flirt. À ces gars, j'avais envie de leur donner deux réponses. La première : ils n'avaient pas connu Agathe. La seconde : on ne se lassait jamais quand on tombait amoureux.

Moi, Gabin Schneider, j'étais passé du premier de la classe pour entraver le règlement, à ce gars éperdument fou d'une fille, comme on le voyait des les films avec Virginie Efira. On pouvait parler d'une sacrée évolution.

─ Et donc, a lancé Agathe, pourquoi quelle occasion as-tu sorti ton plus beau scooter tuné et ta belle moumoute ?

─ Je t'emmène manger un truc.

Les 24 états d'âme de Gabin et Agathe.Where stories live. Discover now