Partie 2

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C'est en relevant la tête que j'ai finalement croisé le regard de Mr Chevignon, assis à son bureau. Il me fixait comme s'il m'attendait. Là j'ai senti les ennuis arriver. Mon regard a dévié sur une forme humaine installée devant son bureau. La forme me regardait aussi, un sourire moqueur plaqué sur le visage. La forme, que je détestais déjà, avait une petite pochette cartonnée à la main, ouverte sur la page de son CV. Là les ennuis frappaient à la porte de mon petit confort, ou plutôt la défonçait à gros coups de pieds. J'avais galéré à me trouver une place dans ce cinéma, et ce mec venait postuler ? Hors de question que je me laisse faire. Mr Chevignon m'invita à prendre place à côté de la chose au sourire odieux. J'étais prête à tout pour lui prouver que je valais mieux que l'énergumène qui lui parlait mielleusement depuis je ne sais combien de temps. J'étais prête à tout sauf à entendre ce qu'il allait me dire.

- Mademoiselle Louis, je vous présente Oscar, il est nouveau en ville et cherchait un travail.

Ouille, cherchait ? ça y est, il l'a embauché ?!

- J'ai donc décidé de l'embaucher. Vous êtes très douée à la caisse, mais seule c'est parfois dur n'est-ce pas ?

Mais qu'est-ce qu'il raconte encore ? Il est tombé sous le charme de la chose ou je me fais des idées ?

- Bon, il est bientôt l'heure d'ouvrir, alors montrez lui rapidement les lieux et expliquez-lui le fonctionnement de mon établissement. Allez, au travail les enfants !

Les enfants, sérieusement ? Il a l'air satisfait de son action, tout comme la chose/Oscar. Personnellement je réfléchis déjà à un nouveau job. Hors de question que je sacrifie mes quelques heures d'amusement quotidiennes pour un petit merdeux « nouveau en ville ». Je sors du bureau de Mr Chevignon et vais récupérer les clés sans desserrer les mâchoires. Je bouillonne. Comment a-t-il pu m'infliger un collègue ?! ça fait bientôt 2 ans que je bosse dans ce taudis et il ne me demande même pas mon avis. Mon nouveau boulet me suis à la trace, du coin de l'œil je peux apercevoir son air moqueur. Il est nonchalant, détestable, il a l'air de se foutre royalement de ce boulot, alors qu'est-ce qu'il fait là ? Un instant l'idée me vient de lui poser la question, ma sa sale tête d'enfant gâté me rappelle à l'ordre ; hors de question que je lui montre de l'intérêt. J'ouvre la loge, grimpe sur mon fauteuil, il se débrouillera bien tout seul. 10 minutes que je suis installée à attendre, 10 minutes qu'il me fixe, toujours avec son petit air, 10 minutes que je refuse catégoriquement de lui accorder la moindre attention.

- Et sinon, c'est quoi ton prénom Mademoiselle Louis ? Finit-il par me demander.

Donc la chose parle. Pfff.

- Ecoute moi bien. T'es ici uniquement parce que Mr Chevignon a eu pitié de toi. Pour ma part je n'ai jamais voulu d'un collègue, encore moins d'un mec comme toi, alors reste dans ton coin et essaye de te faire oublier. Là c'est mon côté je mime avec mes bras une limite entre nos deux espaces de travail tu seras bien gentil de pas y mettre les pieds. J'ai pas envie de te parler, ni de te voir, ok ?

Je me retourne, plutôt fière de ma tirade. J'y suis peut-être allée un peu fort sur l'aspect sociopathe, mais au moins je vais être tranquille !

- Donc tu sais parler ! Me sort l'emmerdeur. J'ai parlé trop vite, je suis visiblement loin d'être tranquille. Je dois absolument trouver une stratégie pour qu'il ne me pourrisse pas l'existence. Bon, comme tu le sais je m'appelle Oscar, je comprends que tu sois gênée par mon arrivée. Après tout c'est normal, toutes les filles sont impressionnées la première fois qu'elles me voient.

Je me retourne choquée par ce qu'il vient de dire. Quel arrogant ! Je me rattrape vite et essaye une nouvelle technique. Il veut faire le malin ? Parfait, moi aussi je suis bonne à ce jeu-là. Je sors mon sourire le plus coulant et commence à bégayer.

- Je ... je suis désolée .. je voulais pas être impolie .. je. Je me penche peu à peu vers lui, il sourit ce con, pensant sûrement qu'il m'a amadouée, comme toutes les autres pétasses qu'il a croisé dans sa vie.

Je me lève maladroitement de mon siège, et lui tend la main comme la petite chose fragile qu'il croit avoir en face de lui le ferait. Il s'apprête à la saisir pour sceller sa nouvelle rencontre, sa nouvelle victoire. C'est bien mon petit, continue comme ça. J'amplifie mon sourire et retiens un peu ma respiration dans le but que mes joues rosissent. En même temps que le contact de ses doigts sur ma main. Comme c'est touchant. Ça y est, il y croit le champion, je le vois dans ses yeux ! Parfait, je lui tords violement le bras et arrête de sourire.

- Tu me parle pas, compris ? je lui dis froidement

- Mais t'es une malade !! oups, j'ai choqué le ptit nouveau

- Pas compris visiblement .. Arrête de me fixer et va t'asseoir, les clients vont arriver alors laisse-moi en paix.

Bizarrement il obtempère sans un mot. C'est plus fort que moi, je souris victorieusement.

La soirée se passe sans encombre, les clients m'ontl'air plus sympathiques que d'habitude, surement parce que je sens la présencedu nouveau derrière moi, et qu'il est irréprochablement silencieux. Cettepensée m'arrache un nouveau sourire. Dès que le cinéma ferme je le sensdétaler. Quant à moi je prends mon temps, je savoure les vestiges de cette soiréequi aura finalement été une totale réussite, je ne m'étais pas autant amuséedepuis belle lurette. Toute guillerette je sors du bâtiment. Ma joie retombeinstantanément quand je sens une grande main m'attraper par la taille et uneautre m'appuyer sur la bouche. Travailler de nuit ne me parait plus du toutamusant.

Une histoire comme une autresWhere stories live. Discover now