Mercredi 3 mars 1915

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Mercredi 3 mars 1915

Je ressens deux sentiments contradictoires : un bonheur intense et un malheur tout aussi intense. Je viens de recevoir deux lettres, une de ma femme et une autre de mes parents. Celle de Catherine annonce et celle de mes parents me félicite : je suis père ! Je viens d'avoir une petite fille. Mon coeur éclate de bonheur à l'idée qu'il existe, sur cette planète, une personne qui soit un mélange de Catherine et de moi-même. Mais mon coeur se brise à l'idée que je ne puisse ni la voir ni prendre dans mes bras ni sentir son odeur. J'ai même envie de l'entendre pleurer et Dieu sait comme je n'aime pas entendre les pleurs d'enfants.

Dans leur lettre, mes parents disaient que ma place n'était pas ici, dans cette tranchée boueuse, mais auprès de ma famille : de mon épouse et de ma fille. Je compte donc demander une permission pour rejoindre ma famille juste le temps de quelque jours. Je veux voir ma fille avant de mourir; même si je meurs dans ce fichu champ de bataille, je veux l'avoir vue, au moins une fois.


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Auteur : Mellouille

Journal de bord d'un poiluWhere stories live. Discover now