Herceptin

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Mai 2013


Le foie de maman va mieux, mais dès qu'on arrête le traitement, les métastases reviennent en force. Elle va devoir être sous herceptin à vie. Toutes les trois semaines, on va lui injecter ce médicament pour qu'elle puisse vivre. Enfin une bonne nouvelle !

Maman fait l'effort de venir me voir à la pièce de théâtre de l'école. Elle est exténuée à la fin de la représentation. Mais elle est venue, comme toujours. Elle ne m'a jamais laissée seule. Depuis que je suis toute petite, elle ne rate pas une leçon de danse, de natation ou encore d'équitation. Elle venait aux répétitions générales, aux examens de natation, aux concours d'équitation...



J'ai toujours eu le sentiment que maman serait toujours là, quoi qu'il arrive, qu'elle verrait chaque moment important de ma vie. Pour moi, c'était une évidence. Tu n'imagines pas à quel point aujourd'hui mon coeur est brisé à l'idée que tu ne sois pas présente à mon mariage, à mon emménagement, qui sait peut-être même que tu aurais pu voir tes petits enfants courir dans le salon. Désormais, il n'y a que dans mes rêves que je peux te retrouver pour te serrer dans mes bras et te dire à quel point je t'aime, et à quel point tu me manques maman.


Les semaines passent, je travaille durement pour l'école. J'étudie, et maman m'aide. Elle me donne son avis sur des travaux, elle me prépare à manger lorsque je bosse plus tard. Elle me soutient, et j'essaie de la soutenir comme je peux. Je me souviens d'un jour où avec son approbation, j'ai séché quelques heures d'école pour rester auprès d'elle. Je ne regrette pas ces journées passées avec elle.

Juin 2013

Je fais mon maximum pour que maman soit fière de moi. Elle reprend le dessus petit à petit. Les examens approchent, et j'ai une boule au ventre qui ne veut plus partir. J'ai peur de ces oraux, des mathématiques, des professeurs, mais par dessus tout, j'ai peur de vous décevoir. J'angoisse à l'idée de rater ma vie. Désormais, elle ne me quitte plus, le stress est présent à chaque instant de mon existence. Pour toi, pour nous, pour nos vies.

J'étudie encore un peu plus chaque jour. Je bosse les maths et les sciences, mais par dessus tout je travaille mes cours d'histoire et de littérature. Ces matières me passionnent, les professeurs croient en moi. J'ai toujours été comme ça, lorsque quelqu'un a confiance en mes capacités, j'essaierai de ne jamais le décevoir. Alors je donne tout. A ma façon, je veux que maman saches que je suis une guerrière comme elle.

Je passe mes examens, certains se déroulent mieux que d'autres, et nous voila le jour J. L'examen d'histoire. Ce professeur est un modèle pour moi. Je veux présenter le meilleur examen face à lui. Je prends place et tire une question. L'URSS, je connais bien, comme l'entièreté de mon cours. Je réponds, il me fixe sans jamais détourner son regard. Il va plus loin que son cours, me pose des questions encore plus précise, je réponds du mieux que je peux. A la fin il me demande quelles ont été mes périodes préférées de l'histoire que nous avons vu en cours, je réponds sans hésiter la dictature Maoïste. Pourquoi me pose t'il cette question ? Je ne comprends pas bien, mais je suis heureuse, cet examen est derrière moi et je l'ai réussi. Je pense qu'il était fière de moi à cet instant, par extension je l'étais aussi.

Il ne me reste que quelques examens, j'essaie d'exceller en français, et tout se déroule très bien. Je rentre et suis toujours heureuse d'annoncer à maman que je réussis chaque examen. Elle est rassurée. Je pouvais au moins faire ça pour elle.

21 juin 2013

C'est ce vendredi qu'à lieu la remise des diplômes. Tous les rhétos sont présents. Même si les examens se sont bien passés, j'ai cette boule au ventre qui ne me quitte toujours pas. Nous nous asseyons dans le hall omnisports, une grande salle devant laquelle se trouve le directeur et l'ensemble des professeurs. Le discours du directeur commence, je suis assise avec mon petit ami et sa famille, et mes parents et ma grand-mère maternelle se trouvent juste devant. Les élèves sont cités un à un avec la mention diplômé ou ajourné. Le temps me semble être une éternité avant qu'enfin mon nom ne soit cité. "Marie Molle : diplômée ». Ces mois de travail ont payés ! Maman pleure de joie, ou plutôt de fierté. Ils sont tous fiers de moi. Papa s'empresse de le dire à ma grand-mère paternelle, à ma tante, mon parrain... tous me félicitent. Ma famille est fière de moi ce soir. J'ai rempli ma mission, maman a un poids en moins sur ses épaules aujourd'hui.

Maintenant que l'entièreté des élèves ont été cité et que la plupart sont diplômés, les professeurs vont remettre les prix. Le directeur annonce « le prix d'histoire avec monsieur K. est attribué à ... Marie Molle ! ». Je hurle de joie intérieurement ! Mon coeur bat la chamade. Le travail porte toujours ses fruits comme papa dit ! D'ailleurs je le regarde en passant, et je vois que lui aussi est fier de moi. Monsieur K. m'offre mon prix, il s'agit d'un livre biographique sur Staline ! C'était pour ça, sa question sur ma matière préférée !

Les autres matières sont abordées et je reçois également le prix de français et de religion. Je suis heureuse ! Tout ce que j'ai donné à payé aujourd'hui ! Mes parents sont vraiment fiers de moi, je suis réellement heureuse aujourd'hui.

En y repensant, je suis heureuse que maman ai pu me voir réussir, elle était fière. J'aurais aimé qu'elle voit tant d'autres choses que je vis sans elle aujourd'hui.

SurvieWhere stories live. Discover now