12 : DYLAN + KÄRCHER = DÉCAPSULEUR

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CW : Consommation d'alcool.

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Le problème avec un crush, c'était le point de non-retour. Il existait un instant précis, à la milliseconde près, où la ligne était franchie, sans possibilité de faire demi-tour. Quand vous viviez dans le doute, tout allait bien pour vous, vous aviez encore le pouvoir de vous persuader de votre indifférence. Mais dès que vous tombiez dans le précipice, c'était trop tard. Il suffisait de penser : « Oh, je crois bien qu'elle me plaît... » Boum. Terminé.

Mon souci n'était pas seulement de passer le point de non-retour, mon souci était que je le franchissais bien trop vite. Je chutais dans le ravin en un claquement de doigt. J'attrapais des sentiments comme un rhume après une journée d'hiver : je me couchais le soir avec le nez qui coulait un peu, et je me réveillais le lendemain incapable de respirer. Jennyfer avait posé sur moi un regard brûlant, j'étais chamboulée.

Je n'arrêtais pas d'y penser. En me brossant les dents, en allant au lycée, en fixant mon manuel de maths. La prof était passée dans mon rang et voyant que je contemplais le même exercice depuis cinq minutes, elle a tapoté ma page du bout de son crayon pour me ramener à la réalité. Par la suite, elle a fait un truc de prof : elle s'est servie de mon cas pour faire une recommandation générale.

─ On reste concentré. Je vous rappelle que c'est le genre d'exercice qui tombera au bac.

J'ai laissé tomber ma tête dans ma main, incapable de me concentrer.

Mon corps se remémorait de mille et une sensations à la minute : la main de Jenny sur ma bouche, nos yeux accrochés, les étreintes et les baisers avec Théa... Le fil entremêlé des souvenirs m'a faite tiquer. J'ai eu un spasme d'embarras sur ma chaise.

─ Ça va ? m'a demandé Alexis, à côté de moi.

─ Mmh ? Ouais, t'inquiète.

─ T'as trouvé la réponse au petit c ?

Il a fallu quelques secondes à mon cerveau pour faire la connexion. Je lui ai répondu sans réfléchir :

─ Dix-huit.

Alexis a froncé les sourcils, confus. De toute évidence, ce n'était pas le résultat trouvé. Ça tombait bien, ce n'était pas le bon.

Je pense que Théa me manquait trop. Les Skypes et les appels ne remplaçaient pas la présence d'une personne. À distance, je ne pouvais pas la toucher, jouer avec ses cheveux, ses mains, humer son odeur. J'avais plusieurs tee-shirts à elle, mais à force de lavages, ils sentaient la même lessive que tous mes autres vêtements. Depuis combien de temps ne s'était-on pas vu ? Un mois ? Moins. Quelques semaines à peine. Qu'importe, l'éternité s'était immiscée entre nous. Je n'étais pas un loup solitaire, j'avais besoin d'attention, d'un public pour rayonner ; j'avais besoin d'embrassades et de moments d'intimité. Mon crush pour Jennyfer n'en était pas un. C'était le manque qui parlait, comme en réponse à un sevrage forcé.

Sur ma gauche, Alexis a chuchoté :

─ Gina, je trouve pas dix-huit !

─ Essaye dix-neuf.

Il s'est jeté sur sa calculatrice. Un regard pour mon cahier, et Alexis aurait remarqué que je n'avais rien noté.


**


Jeudi, vendredi, rien d'exceptionnel. J'ai mangé avec les gens de ma classe, j'ai respecté les ordres de maman, je me suis excusée auprès d'Alexis pour l'avoir mené en bateau. Pour le dernier cours de la semaine, je suis arrivée en retard après avoir pris trop de temps aux toilettes. En ouvrant la porte de la classe, mes camarades étaient assis.

Dylan Mercier doit payerМесто, где живут истории. Откройте их для себя