Chapitre 1

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1 semaine après sa disparition

Allongés tous les deux sur mon lit, nous discutions. Installée à côté de celui qui partage mon cœur, j'évoquais des souvenirs. Des souvenirs heureux. Mon copain m'en a rappelé quelques un avec mon père. Nous rigolions ensemble en pensant à lui. Nous souriions. Un souvenir en entraînant un autre, nous avons passé des heures à nous raconter des anecdotes sur lui. Sur cet homme si inflexible et si tendre à la fois. Ce modèle patriarcal.

Je mentionnais des souvenirs datant de mon enfance mais aussi certains datant d'avant l'opération. Ces confessions ont réveillé en nous un bonheur qu'on pensait perdu. Nous riions aux éclats.

Le sentiment que procurait nos rires m'avait tellement manqué. Je continuais de plus belle, à ne plus pouvoir m'arrêter. Nous étions deux idiots rigolant à de souvenirs agréables. Une situation si paradoxale à ce moment de notre vie. J'avais l'impression de devenir folle. Allais-je pouvoir m'arrêter ? Etais-je en train de sombrer dans la folie ? Allais-je finir dans un hôpital spécialisé ? Ces questions trottaient dans ma tête, même si je n'avais pas les moyens d'y répondre.

A mes côtés, je le voyais sourire. Ça me rassurait. La joie est communicative n'est-ce pas ? Ce soir-là, je m'en suis vraiment rendu compte.

Malheureusement, la tristesse l'est tout autant.

Après quelques minutes, nous nous sommes calmés. Nous sommes devenus sérieux. Nous parlions de ce futur incertain qui nous attendait. La peur et l'angoisse prirent la place de la joie. Dans les bras l'un de l'autre, nous réfléchissions. Nous repensions à ce qu'on venait de vivre il y a une semaine. A ce qu'on était en train de vivre.

Il nous manquait déjà. Ce manque. Comment allais-je vivre avec ce trou béant dans ma poitrine toute ma vie ? Il ne sera jamais possible de le combler. La tristesse m'a de nouveau submergée. Me laissera-t-elle un jour tranquille ? Va-t-elle un jour laisser place à un contentement permanent ?

J'avais juste envie de faire mon deuil, même si je n'avais aucune idée de ce que ça voulait vraiment dire. Tout le monde me disait que l'on devait faire notre deuil pour avancer.

« Tiens et si je faisais mon deuil aujourd'hui? ».

Ce terme si abstrait que l'on vous demande de faire alors que vous avez dix-neuf ans sur votre tête. Je me suis demandée alors s'il existait un mode d'emploi. S'il fallait faire quelque chose de particulier pour que la souffrance soit moins présente et que j'accepte son décès. Comment accepter que son père soit mort ? Est-ce qu'on l'accepte vraiment un jour ? Est-ce que c'est réellement possible ? Comment peut-on approuver une telle chose ? Comment imaginer ne plus vivre avec la personne que l'on aime tout simplement parce qu'elle ne devait ne plus être là ?

Dans ces moments vous êtes seul. Personne ne vous prend par la main pour vous expliquer et vous aider. On doit se débrouiller pour avancer. Et même si nos amis ou notre famille sont là, l'envie de surmonter cette épreuve ne peut venir que de nous. On doit se battre tous les jours pour ne pas oublier de vivre.

Le seul but est de se dire que demain sera moins dur qu'aujourd'hui. On doit se dire que la vie c'est maintenant, et qu'il faut en profiter avant qu'elle nous soit prise.

Parce que rien ne vaut la vieWhere stories live. Discover now