Le mariage d'Antoine

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C'est la deuxième fois qu'elle porte cette robe, et pour être honnête, elle l'adore. Le tissu blanc descend jusqu'au sol, recouvert de broderie complexe. Le corsage est simple avec quelques perles sur le devant. C'est une robe parfaite pour danser, car elle suit tous ses mouvements. Bref, c'est la robe de mariée parfaite. Elle lui ferait presque oublier le trac qui monte en elle à mesure que les minutes passent. Aujourd'hui, c'est le grand jour, elle en rêve depuis quelques années maintenant. Pourtant, le stress a légèrement pris le dessus sur la joie. Sa main tremble un peu quand elle replace son voile dans ses cheveux. Elle inspire lentement, expire quand on toc à la porte.

- T'es là ? Demande timidement Antoine.
- Oui, mais tu ne peux pas rentrer ! Ça porte malheur de voir la mariée en robe avant le mariage.

Antoine ouvre la porte et entre dans la pièce. Il est magnifique dans son costume noir et blanc parfaitement tailler.

- Désolé Juliette, mais je pense que c'est un peu trop tard pour ça.
À son visage fermé et ses yeux qui fuit les siens, elle comprend que quelque chose ne va pas.
- Je suis vraiment désolé. Surtout de m'en rendre compte maintenant, c'est nul, mais je ne vais pas pouvoir me marier avec toi.
- Qu'est-ce que tu dis ?
- Je suis désolé t'es génial et tout, mais je peux pas me marier avec toi. Je peux pas parce que.... Je suis amoureux d'une autre.
- Florence.

Son nom est sorti presque sans être une question.

- Je... Comment tu... Heu, oui. C'est idiot, je t'aime aussi, c'est juste que...
- Tu l'aimes davantage.
-Différemment. C'est comme si on était... Je sais pas, connecté. T'as le droit de me détester, je comprends. C'est idiot, en plus je suis même pas sûr que ce soit réciproque.
- Crois-moi, vu comment elle te regarde et elle me jalouse, c'est réciproque. Hé, attends, pourquoi je te remonte le moral alors que c'est moi qui n'a plus de mariages.

Juliette sourit légèrement.

- Enfin, je savais que ça finirait par arriver. Tu as toujours eu une connexion particulière avec elle. Je l'envie parfois. Mais entre nous, c'était pas si fort, on s'est dit que se marier, ce serait une bonne idée, mais c'était trop tôt, trop convenue.
- Je suis vraiment désolé, je sais même pas quoi dire de plus. Je suis désolé de m'en rendre compte que maintenant.

Juliette rigole en réalisant.

- C'est vrai qu'il y a accessoirement toute notre famille et nos amis qui nous attendent à la mairie. Sans oublier la salle réservée, le traiteur et la musique. Enfin, on peut quand même faire la fête, ça sera toujours ça de positif. On ne va quand même pas gâcher toute la nourriture pour une histoire de rupture.

C'est maintenant au tour d'Antoine de sourire.

- T'es vraiment la meilleure. Si tu veux je m'occupe de l'annoncer à tout le monde.
- Non, je ne voudrais pas rater le visage de mes parents à l'annonce de cet événement dont on va me parler toute ma vie.

Ils se rendent donc tous les deux à la mairie, rentrant côte à côte par une des portes latérales. Tous les regards se braquent sur eux, et des applaudissements hésitants retentissent. Alex va à leur rencontre et glisse à l'oreille d'Antoine :

- Qu'est-ce que vous faites ? Vous n'êtes pas censé rentrer en même temps ?
- Je t'expliquerai lui répond Antoine.
- On a une annonce à vous faire, déclare Antoine une fois face aux invités. Il n'y aura pas de mariage.

Les gens s'étonnent, chuchotent, s'agitent, essayant de comprendre ce qu'il se passe. Le regard d'Antoine croise brièvement celui de Florence assis dans un des rangs du fonds. Il y a de l'incompréhension dans ses yeux mêlé à de la joie, mais ça, il ne le remarque pas.

-Je suis désolé, tout est de ma faute, enchaîne le capitaine. Mais on ne va pas vous expliquer pourquoi aujourd'hui, alors éviter de nous poser des questions s'il vous plaît.
- La fête est tout de même maintenue, ajoute Juliette. On vous attend au point de rendez-vous indiqué sur les invitations, il y aura de quoi manger et danser. Je tiens à préciser que nous avons tous les deux accepté l'annulation du mariage.

Antoine lui sourit de gratitude, ça le rassure de l'avoir à ses côtés en ce moment.

- À tout de suite pour ceux qui le souhaite, conclut Juliette.

Tout de suite après la fin de sa phrase, un brouhaha s'élève dans la salle. Certains discutent entre eux, d'autres se lèvent près et partent. La plupart encerclent les « mariées » et les bombardent de questions auxquelles ils refusent de répondre. Antoine tente de se frayer un chemin dans la foule mais il est arrêté par Alex et ses fils.

- Mais qu'est-ce qui se passe ?
- Désolé Alex, je peux pas t'expliquer là tout de suite. Es ce que tu peux t'occuper des garçon pour la fin de journée, j'ai un truc important a faire.
- Pas de problème.
- Merci, t'es un pote.
- Es ce que tout va bien papa ? Demande Maxime
- Oui, mon grand t'inquiète pas, mais je vais devoir m'absenter. Vous allez rester avec Alex et pas de bêtises, on se voit ce soir.
- Capitaine ?

C'est la voix de Florence qui vient interrompre sa discussion. Alex et les enfants s'éloignent et Antoine joue des coudes pour se retrouver face à l'historienne de l'art.

- Madame Chassagne, vous êtes exactement la personne que je cherchais.
- Ha bon ? S'étonne Florence.
- Es ce qu'on peut se parler en priver ?
- Heu... Oui, si vous voulez.

Antoine l'entraîne dans une pièce annexe, un petit endroit avec des fauteuils et des étagères remplis de livres.

- Voilà, j'aurais bien voulu vous expliquer pourquoi on a annulé le mariage.
- Je croyais que vous ne vouliez rien dire.
- Disons que vous êtes la seule qui ai besoin de le savoir
- Pardon, mais vos histoires de couple ça me concerne pas vraiment.
- Bah si justement.

Il y a un petit moment de silence où Antoine cherche ses mots et Florence tente de comprendre ce qui se passe.

- En me préparant ce matin, finis par dire Antoine, j'ai mis mon costume et j'ai relu le discours que j'avais préparé pour Juliette. Vous savez, le mot que je vous avais lu pour avoir votre avis.
- Ha oui.
- Heu... Voilà, je me suis rendu compte que c'est exactement ce que je ressens, ce que j'aurais voulu dire. Mais pas à Juliette. Heu... J'aurais voulu vous le dire à vous. Je ne peux pas me marier avec Juliette parce que je suis amoureux d'une autre. De vous.

Florence, les yeux écarquillés, ne dit rien et se contente de fixer Antoine. Dans sa tête, des millions de questions se bousculent : comment, pourquoi, depuis quand, mais surtout, es-ce que tout ça est bien réel ? Il y a un long blanc avant qu'Antoine, dépiter, ne continue.

- Vous savez c'est pas grave si c'est pas réciproque, je voulais juste vous le dire.

À la seconde où Antoine finit sa phrase, Florence comble l'espace qui les sépare et l'embrasse. Elle avait fini par se dire que même si ce n'était pas réel, elle voulait saisir cette occasion. Sauf qu'au contact de ses lèvres avec celle d'Antoine, il n'y a plus aucun doute, c'est bien réel.

FIN

Antoine et Florence - L'art du crimeWhere stories live. Discover now