52/ Bel ami

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— Que se passe-t-il M. Conti ? Un dossier à problèmes ? Un coup de main ?

— Entre Fortier et Manoukian, c'est sérieux ?

— Ah ! Vous savez !

— Ce serait difficile de ne pas le savoir, vu qu'il se promenait à moitié nu dans son appart ce matin.

— Il ne vous est jamais venu à l'idée de mettre des rideaux, demande Louisa en posant son menton sur ses mains.

— De... Il ne s'agit pas de ça...

— De quoi s'agit-il alors ?

— De Fortier et Manoukian. Je ne le sens pas, ce type.

— Et ça date de quand cette sensation exactement ? D'avant qu'il ne la « baise » ou d'après ?

— Mlle Rossi ?!

— Quoi, Mlle Rossi ! Je suis vulgaire ? Mais il le faut bien, parce que quand je suis mignonne, on ne me comprend pas manifestement.

Conti se lève et va pour partir, puis s'arrête devant la porte, la main sur la poignée.

— Mon impression s'est renforcée depuis qu'il la « baise » comme vous dites. Mais j'avais déjà senti qu'il était...

— Faux ?

— Oui.

— Moi aussi, je l'aime moyen. Mais pour le moment, je ne peux rien faire. Irène est dans l'euphorie. Elle pensera que je m'inquiète pour rien. Elle ne m'écoutera pas. Et encore moins vous... Néanmoins...

— Néanmoins, répète-il en se retournant vers elle.

— Rien ne nous empêche d'être vigilant et de se renseigner sur lui... Il va falloir être fort M. Conti. Mais bon... Ça n'est pas comme si vous n'aviez pas eu votre chance et que vous ne l'aviez pas laissée passer... lâche Louisa en dardant un regard entendu sur lui.


Il sort en silence. Mlle Rossi a tort. Il n'a pas laissé échapper sa chance. Il aurait pu séduire Irène Manoukian au point de la mettre dans son lit. Il aurait pu la « baiser » comme l'a dit si vulgairement Louisa. Mais il ignore s'il aurait pu la lâcher ensuite, comme il le fait sans vergogne pour ses conquêtes d'un soir. Irène est différente. Il n'a pas voulu lui faire mal. Il en aurait eu honte. Il en aurait souffert.

Il a été lâche, et maintenant, il le paye. Il ne sait pas à quoi il s'attendait ! La voir passer de bras en bras, continuer la ronde des cœurs brisés ? Pas sûr qu'il supportera mieux. mais, Irène Manoukian n'allait pas rester disponible ad vitam aeternam, juste pour lui ! Il la connait maintenant ! Il sait qu'elle a un cœur de midinette, qu'elle cherche l'amour. Le vrai. Celui qui dure. Celui qui fait rêver et auquel ne croit pas Conti. Il le sait. Mais il n'arrive pas à accepter. C'est tout. C'est tout ? Sûr que non. Car Mlle Rossi a aussi raison, n'est-ce pas ? Elle a sacrément raison.


— Alors ? Cette nuit d'amour ?

— Ça a été fantastique ! Vraiment ! Il est attentif et très... doué...

— Je vois. Pas de détails, donc.

— Non ! Les détails, c'est quand on est sûr de ne jamais revoir le type !

— Le fait qu'il soit ton subordonné ne pose pas de problème ? demande ingénument Louisa en tripotant sa salade pomme de terre du bout de sa fourchette.

Irène l'observe un instant, étonnée, avant de répondre.

— Mais... On en a parlé hier ! Tu m'as dit que ça n'était pas important !

— Non ! J'ai dit que ne pas le prendre dans l'équipe aurait été une erreur...

— Louisa ! Regarde-moi ! Qu'est-ce qui se passe ?

— C'est juste que je m'inquiète un peu.

— Pardon ? Mais je suis heureuse pour la première fois depuis super longtemps, et toi, tu t'inquiètes ?

— Oui, bichette... Fortier, on ne le connait pas. Et une relation entre collègue est toujours délicate, surtout quand il y a un rapport de hiérarchie.

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