58/ L'ennemi intime

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— Tu savais qu'elle vivait avec quelqu'un, Louisa ?

— Quelqu'un ?

— Il y avait un grand type chez elle. J'ai bien fait de la lui confier ?

— Oui ! oui ! C'était son frère ! C'est moi qui l'aie appelé ! Ne t'inquiète pas. Il va bien s'occuper d'elle !

— C'est toi qui l'as appelée ? Pourquoi ? Tu n'avais pas confiance en moi ?

— Mais... Pas du tout ! s'exclame Irène, étonnée de cette remarque. Je ne voulais pas qu'elle reste seule. C'est tout...

Fortier se détourne. Il est mécontent. Il n'a pas anticipé la force des sentiments d'Irène envers Louisa. Il ne l'a pas encore assez ferrée. Mais ça va venir. Pour Louisa, il ne s'inquiète pas. Il lui a fait suffisamment peur. Il trouvera sans doute une autre occasion de se la taper en douce. Un demi sourire s'affiche sur son visage quand il s'affale sur le canapé dans la pénombre du salon. Il a faim !

À peine est-il assis que la lumière du loft d'en face vient inonder la rue... et le salon. Irène est surprise. Ça fait longtemps que Conti n'a pas allumé toutes les lumières en même temps. Elle jette un œil curieux au loft.

Conti est devant sa fenêtre. Dès qu'il la voit, il signe.

« Fortier est là ? »

« Oui. » répond-t-elle surprise de la question.

« J'arrive. Faites-moi bon accueil. »

— Le patron est rentré avec une poule, ricane Fortier qui ne regarde même pas par la fenêtre. Il pianote sur son téléphone.

— Non. Il est juste rentré, dit Irène en tentant un air enjoué.

La jeune femme lance un regard du côté de son amant. Elle lui trouve un air étrange. Est-ce la première fois ? Quelque chose se met en branle dans son esprit. Quelque chose d'intrigant, d'inquiétant. Est-ce l'état inexplicable de Louisa ? La scène que lui a faite Éric ? Sa propre faiblesse face à sa colère froide ? Sa remarque inappropriée et pleine de suspicion ? Ou ce message de Conti, alors qu'il ne lui a pas adressé la parole depuis si longtemps ?

Irène ne sait pas quoi penser. L'appréhension monte de plus en plus vite. Et elle n'en est pas vraiment étonnée. Plusieurs éléments lui reviennent en mémoire brusquement. Des petites choses qu'elle avait balayée sous le tapis pour ne pas faire d'ombre à son idylle toute neuve qu'elle ne voulait pas gâcher.

Brusquement, Irène se rend compte de tous les efforts qu'elle a fait pour plaire à Éric, ces dernières semaines. Pas qu'il soit tellement exigeant, elle voulait tellement que ça dure. Alors elle a lissé. Fini la musique italienne à fond ! Les repas sur le pouce ! Les soirées entre filles ! Le calme de son appart. ! Son appart ! Même son chat ! Il a fallu qu'elle le confie à Louisa, parce qu'il griffait Éric dès qu'il le pouvait ! Mais elle l'a fait ! Parce que, même si jusqu'à présent elle avait dit le contraire, certaines choses ont moins d'importance que l'amour qu'on vous porte.

Enfin, ça c'était encore vrai il y a quelques heures. Maintenant, elle a un doute. Un sérieux doute.

Des coups sont frappés à sa porte.

Fenêtre avec vueDonde viven las historias. Descúbrelo ahora