Water Lily

Ou comment se sentir plus monstrueuse que monstrueuse.

Chapitres 8 à 10 corrigés par emy396 ! 

- Moi ? Répétai-je dans un bégaiement nerveux mais peu étonné.

Kenan me fixa une longue seconde avant de sobrement hocher la tête. J'hésitai à éclater de rire. Il se moquait forcément. C'était probablement sa façon de me souhaiter la bienvenue, une sorte de bizutage ayant pour unique but de m'effrayer un peu plus que je ne l'étais après ce qu'il c'était passé dans la cafétéria. Mais, une part de moi voulait s'obstiner à croire qu'il ne mentait pas. Il pensait sincèrement que j'étais celle que cherchait cette créature monstrueuse.

La première question fusa. Pourquoi ? Pourquoi moi ? Pourquoi maintenant ? Puis d'autres s'ajoutèrent à cette première. Que me voulait-il ? Que représentai-je de suffisamment important pour attirer l'attention d'un traqueur ? Je n'étais qu'une humaine. Ou du moins, il y a une semaine je ne pensais être qu'une gamine un peu tarée sur les bords. Je portais mon médaillon à mes lèvres, le mordillant trop fortement pour ne pas marquer le métal. Je battais des pieds sur le lit, incapable de rester immobile dans ma panique. Que devais-je faire ? M'enfuir ? Rester ici ? Et surtout pourquoi moi ? La première question revenait inlassablement, attendant une réponse qui ne venait pas.

- Le coquatrix est engagé par des marqués, souffla Kenan en venant se laisser tomber à côté de moi.

- Isidore aurait déj...

- Non, me coupa-t-il dans un soupir. Il n'a rien à voir avec cela. Disons... que tu représente déjà une menace, pour certains.

- Une menace ? Murmurai-je incrédule. Je ne vois pas en quoi je suis une menace. Au pire des cas ils risquent de se faire ébouillanter parce que j'ai trébuché avec ma tasse de thé. Je ne suis qu'une gamine inoffensive qui va se faire tuer d'ici trois jours...

- Tu n'es pas inoffensive, Keylinda. Peut-être un peu pour le moment, ajouta-t-il avant que je n'ouvre la bouche pour lui rappeler ses propres paroles. Mais tu vas devenir puissante. Tu seras dangereuse pour tout ceux que tu jugeras comme des ennemis. Et certaines personnes n'ont pas envie de prendre ce risque.

Il ne me disait pas tout. C'était évident. Quelque chose, incrustée dans ses pensées, lui permettait d'être aussi confiant. Quelqu'un lui avait affirmé ces paroles bien avant qu'il ne les prononce lui-même. Mais aussitôt que mon esprit cherchait des réponses, il se referma complètement. Son esprit devint une muraille que je ne pouvais pas franchir. Des ronces. Des murs gigantesques. Des grillages de barbelés. Tout était mis en place pour me rejeter. Je le regardai, déconfite face à sa réaction.

Je restai donc muette, convaincue qu'il avait tort. Je n'allais pas devenir dangereuse. Je n'avais jamais été violente. Jamais été doué pour les sports de combat ou des matières nécessitant une force physique quelconque. Sans être une empotée, je ne pouvais pas prétendre avoir un réel talent dans ce type de domaine. C'était à peine si je savais comment gifler quelqu'un alors me battre et représenter une menace me semblait dès plus ahurissant.

- Tu te sous-estimes. Tu te souviens quand tu avais douze ans ? Un petit garçon habitait le voisinage, tu l'as vu embêter le chat de la vieille femme qui vivait en face de chez toi.

- C'était un idiot, murmurai-je. Il le martyrisait sans cesse.

- Et tu te souviens de ce qui lui est arrivé ?

Vaguement. C'était il y a longtemps maintenant, tout n'était qu'un vague souvenir. Je me souvenais à peine de la colère que j'avais ressentie envers ce petit garçon exécrable. J'adorai les animaux et, tout particulièrement, les chats. Alors, quand ce garçon à peine plus âgé que moi c'était mis à harceler le petit chat noir, j'avais monté toute une technique pour le protéger. Au départ, ma mère avait proposé d'aller parler aux parents de cet enfant, de peur que je m'attire des ennuis, mais j'avais refusé en bloc. J'avais fait de cette tâche une véritable mission.