Act. 25

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      Quand il coupe le contact, je me sens incapable de remettre mes talons. Je regarde les escarpins comme des outils à torturer, n'ayant pas le cœur de les enfiler pour monter jusqu'à ma porte.

— Femme fatale, mais pas jusqu'au bout, me taquine-t-il en voyant l'expression sur mon visage.

— Tu ne tiendrais pas cinq minutes avec. C'est ma plus belle paire de talons, mais aussi la plus difficile à mettre.

— J'ai une idée.

Il sort de la voiture sans en dire davantage. Il fait le tour et ouvre ma portière. Sans me prévenir, il se penche vers moi et passe un bras sous mes genoux, l'autre sous mon dos. J'ai à peine le temps de riposter, il ne me laisse pas le choix.

— Non, Sacha, c'est pas la peine ! m'écrié-je mais je me retrouve déjà dans ses bras.

Sans me répondre, il referme la portière à l'aide de son pied et je m'agrippe à son cou.

— Tu ne devrais pas agir comme ça.

— Laisse-moi deviner. Je dois te détester et te laisser marcher sur le béton pied nus parce que tu me détesteras aux prochaines répétitions, c'est ça ?

Je réprime un sourire dans mon coin, me détournant de son regard et de son air satisfait.

— Tu m'as accompagné à cette soirée de merde et tu as même été gentille, pour une fois. Estime que c'est ma manière à moi de te remercier.

Je ne relève pas, n'ayant de toute façon pas le choix, et je passe le badge sur la porte pour que nous puissions entrer. C'est légèrement fastidieux, mais nous parvenons à atteindre l'ascenseur sans encombres. Une fois à l'intérieur, je lui assure qu'il peut me déposer, mais il jette un œil au sol en me disant que ça a l'air crade. Je me laisse donc faire jusqu'à ma porte, puis qu'il ne veut pas que je me salisse les pieds. Il me dépose sur le paillasson, satisfait.

— Merci.

— C'est normal.

La situation ressemble en tout point à la fin d'un rencard. Il m'a raccompagné et maintenant, nous nous retrouvons face à face sans savoir quoi faire. Si je m'appuie sur le contexte, il n'y a rien qui ferait que j'attende qu'il m'embrasse sur mon palier, et pourtant...

— Je suis à ta fenêtre dans une minute, conclut-il. À tout de suite.

Je ne m'attendais pas à ce qu'il soit aussi confiant à l'idée de prolonger la soirée. Il fait volte-face et disparaît dans les escaliers, une nouvelle fois sans me laisser le temps de réagir.

De mon côté, comme il ne me reste plus que ça à faire, je tourne ma clé dans la serrure, ne sachant pas à quoi m'attendre de sa présence.

Je referme la porte derrière moi. Il n'est pas très tard, alors je ne suis pas surprise de voir que mes parents sont encore réveillés, c'est pourquoi je passe ma tête par la porte. La lumière de la chambre de Déborah est éteinte, je demande donc :

— Débo n'est pas là ?

— Elle est allée dormir chez une copine, répond ma mère. Alors, cette soirée ? Tu rentres tôt.

Chez Kenneth... en somme.

— Ennuyeux à mourir, on a décidé de partir.

— Et tout s'est bien passé ?

— Ouais, super. Par contre, je suis un peu fatiguée. Je vais aller me coucher, j'ai prévu de me réveiller pour revoir une chorégraphie. Bonne nuit, dis-je d'une voix douce.

Nous échangeons tous les trois un sourire et je referme la porte de leur chambre. Je me dirige vers la mienne et je tourne sans attendre le verrou. Je dépose mes talons dans un coin de la pièce et je m'avance vers ma fenêtre, là où il vient tout juste d'arriver. Il retire ses chaussures et entre une énième fois dans mon espace personnel. Je n'arrive pas à croire que je commence à m'y habituer.

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