Act. 31

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TW : ce chapitre comporte des passages à propos des TCA.

      Le souffle court, je ne m'arrête pas pour autant. L'air frais me brûle le visage en cette matinée d'automne. Je regrette de ne pas m'être habillée plus chaudement. Je suis gelée mais ce que je fais est nécessaire, je le sais.

Cours, Ivy.

Sois la meilleure.

Voilà bientôt une heure que je cours à Central Park. Je peux sentir mon cœur battre dans mes veines. Ma gorge est atrocement sèche, mes poumons semblent sur le point de se décoller. À chaque fois que j'ai fait une pause, je me suis sentie nulle, je repartais donc de sitôt. J'ai besoin d'évacuer, j'ai besoin de...

Un vertige me coupe dans ma course. Haletante, je m'arrête et je m'agrippe au dossier d'un banc d'une main. L'autre posée sur la hanche, je tente de tenir debout.

Je déglutis difficilement, l'estomac creux. Je m'autorise une pause et je m'installe sur le banc, ne prenant pas compte du froid.

Mes jambes tremblent anormalement. Il faut que je rentre pour me doucher avant d'aller au théâtre. Voilà une semaine tout pile que les événements se sont produit. Une semaine que je vis chez Mike, une semaine que ma mère est révoltée et que ma petite sœur insiste pour venir dormir avec moi. Sept jours qui ressemblent à une éternité.

Sacha et moi avons été appelés pour avoir une petite discussion à propos de ce qui s'est passé l'autre jour. Johansson et Niall souhaitaient s'assurer que l'entente pouvait au minimum être professionnelle. De toute la conversation, Sache et moi ne nous sommes pas accordés un regard. Il a cessé de manger avec Adeline et moi. Cette dernière ne m'a rien dit, elle ne s'en mêle pas, mais je suis persuadée que Loris lui en a parlé.

Depuis une semaine, je n'ai pas la moindre nouvelle de mes deux meilleurs amis. Quelque part, ma vie ne ressemble en rien à ce qu'elle a toujours été, et je ne sais plus contre qui être en colère, alors je préfère me haïr.

Après avoir retrouvé un semblant d'équilibre, je me lève. Mes jambes me font mal, mais je suis bien obligée de rentrer. J'enfonce mes mains dans les poches de ma veste et j'avance d'un pas lent. Sur le trajet, je ne me sens pas plus légère qu'au réveil. Ni plus qu'hier. Tous les jours un peu plus je m'enfonce dans cette colère dévastatrice.

Le peu d'indulgence que j'avais à mon égard est passé à la trappe. Il ne me reste plus qu'à être la meilleure... il ne me reste plus que mon rêve. Si je me laisse aller à ce sujet, je n'aurais plus rien et si je n'ai plus rien, alors à quoi pourrais-je m'accrocher ?

Sur la route, je meurs de faim. Je regarde les vitrines des restaurants qui ne sont pas encore ouverts et mon ventre me fait mal. Mike a eu beau me servir des bons petits plats toute la semaine, je lui disais que je n'avais pas faim, que je mangerais en route : ce que je n'ai pas fait.

Je dois être parfaite, perdre le poids que j'ai en trop. Je veux être sublime dans mes costumes. C'est la seule chose qu'il me reste. Je suis déjà trop grosse dans ce legging, je me sens serrée, compressée... sur le point d'étouffer. Tout ce que j'ai mangé cette semaine s'apparentait à du plomb dans mon estomac.

Quand j'arrive à l'appartement, je fonce me doucher. Je préfère que Mike ne remarque pas que je suis sortie aussi tôt pour courir, il se douterait que je suis retombée dans mes vieux travers. Une fois dans la salle de bains, je me déshabille. Je pousse un soupir en retirant tous ces vêtements qui me donnaient la sensation d'être coincée dans mon propre corps.

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