Chapitre 14

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J'aidû m'endormir quand même, parce que je viens d'ouvrir les yeux etune fine bande de lumière filtre sous mon volet. Il fait jour. Jeregarde mon portable. Rien. J'aurais dû m'en douter. Après maréaction d'hier, tu m'étonnes que personne n'aie envie de meparler... Enfin, ça m'aura au moins permis de savoir qu'il est neufheures trente-quatre. On est lundi, mes parents sont au travail, jepeux donc descendre sans avoir à faire la conversation, et sansqu'on me demande de faire le ménage ou je ne sais quoi. J'hésitetout de même à sortir du lit. J'ai pas envie de commencer unenouvelle journée. Tant que je reste dans mon lit et que je ne faisrien, rien de mal ne peut m'arriver, si ?


Jemets de la musique, ma playlist de « best of des meilleureschansons du monde ». Ça regroupe un peu de tout, du metalsymphonique, du folk metal, du death metal... Ok, il y aprincipalement du metal, mais j'aime bien aussi le hard rock,l'emocore, le rock, le classique, tout ça. Je ne suis pas vraimentbranchée électro ni rap, et tous ces genres de trucs. Je ne saispas pourquoi, y'a des bons trucs pourtant, mais c'est juste pas cedont je suis le plus fan.


J'aiécouté la playlist en entier. Elle dure approximativement troisheures. Il est maintenant midi trente et toute cette musique m'adonné envie de danser. Et j'ai faim. Je me lève, mets ma robe dechambre (je n'allais pas m'habiller alors que je n'ai rien à faireaujourd'hui), et descends les escaliers. Je réchauffe les restes delasagnes que mes parents ont mangé hier soir. C'est mon père quiles prépare et elles sont trop bonnes. De toute façon, mon papa,c'est le meilleur cuisinier du monde ! Je suis en train de baverdevant le micro-ondes quand j'entends mon portable vibrer. J'ai reçuun sms. Ça doit être ma mère, elle va stresser si je ne répondspas tout de suite. Je vais chercher mon téléphone, le déverrouilleet surprise : c'est un message d'Alice. « Mercredi, caféde la place d'Avogadro, 14h30, ça te va ? » Non, ça neme va pas, il faut que j'enterre mes rêves. Jamais elle ne sortiraavec moi, jamais elle ne m'aimera, et c'est peut-être mieux commeça. Je ne lui réponds pas, et retourne à mes lasagnes.


Monrepas fini, je remonte dans ma chambre. Je ne sais pas quoi faire.Rien ne m'attire vraiment. J'ai la flemme de tout. Je ne peux pas, etne veux pas, parler à Abi, et encore moins à Alice. Je n'ai pasenvie d'ouvrir mon ordi et de traîner sur les réseaux sociaux,c'est un coup à tomber sur des photos de la fête d'hier, et voirAlice heureuse m'anéantirait. Il faut qu'elle souffre autant quemoi. J'ai plein de trucs d'activités manuelles type point de croix,dessin, sequins, que je pourrais faire en écoutant de la musique, çane m'intéresse plus. Je finis par retourner dans mon lit. J'attends.Je m'ennuie, mais ça ne me déplaît pas tant que ça. Je perds lanotion du temps, j'ai l'impression qu'il s'est figé.


Montéléphone sonne. C'est encore Alice. Ça me ferait tellementplaisir de lui faire du mal que je décroche. C'est probablement uneerreur de ma part, mais de toute façon dans l'état où je suis, jene sais pas si j'ai encore grand chose à perdre... Je décroche.« Je t'avais pas dit de me laisser tranquille ?

-Non,tu m'avais dit de m'en aller pour être exacte, ironise-t-elle

-Etça revient pas au même pour toi ? Tu veux que je t'offre undictionnaire peut-être ?

-Benpourquoi pas ? Tu me le donnerais mercredi à quatorze heurestrente du coup ?

-Sic'est vraiment ça que tu veux je te l'enverrai par la poste. J'aipas envie de te revoir, tu comprends ça ? J'ai déjàsuffisamment souffert comme ça.

-Ouais,j'avais remarqué que c'était pas la joie...

-Alorspourquoi si tu l'as remarqué tu ne me laisses pas tranquille ett'essaies de tout empirer ?

-J'essaiejuste de t'aider ! Elle se met à crier.

-Benc'est raté.

-Y'aaucun moyen que je te convainque de venir hein ?

-Nan.

-Pourtantje t'avais bien dit que je voulais « remettre ça » non ?

-Jamais.

-Si,je suis sûre de l'avoir dit !

-Non,ce que je voulais dire c'est que jamais tu ne recommenceras.

-Tusais, c'est dommage, je commençais à bien t'aimer... »


Çay est, j'ai envie de pleurer. Mais bon, elle aussi visiblement, doncça me va. Je reprends, avec une voix un peu cassée. « Leproblème il est là. Tu ne m'aimes pas. T'aimes juste jouer avecmoi, t'aimes qu'on te résiste, on dirait un chat qui s'amuse avecune souris. J'ai pas envie d'être juste un jouet.

-Eh,pleure pas...

-Situ ne veux pas que je pleure, va t'en.

-Pastant que tu ne m'auras pas entendue.

-Jet'ai entendue, tu veux me voir pour te sentir mieux par rapport à tasoirée ratée, et parce que ce que tu n'es pas habituée à ce qu'onte résiste.

-J'avoue,il y a un peu de ça, mais...

-Maiss'il y a bien quelque chose que veux faire c'est tirer un trait surtoi, et là tu m'aides pas. Alors si tu m'aimes tant que ça,respecte ça et barre toi ! » Je raccroche avant qu'ellen'aie le temps de répondre. Je suis furieuse, et en même tempshorriblement mal. Et je ne lui ai probablement même pas faitsouffrir tant que ça. C'était bel et bien une erreur de décrocher.Mais si elle rappelle je le ferai quand même, je ne passerais àcôté d'une telle occasion pour rien au monde.


Jereçois un SMS, encore d'Alice. « Réconcilie toi au moins avecAbi, tu as bien besoin d'une amie... » Je n'en ai pas envie.C'est aussi à cause d'elle que je me sens mal. Et puis, des amies,j'en ai plein à la danse. Je sais que ce n'est pas pareil qu'avecAbi, mais ça reste des amies. J'ai besoin de me défouler. Jedescends, pousse les meubles, chausse mes pointes, et me mets àdanser. Il n'y a pas beaucoup de place mais je fais avec. Je ne saispas trop improviser d'habitude, mais là ça vient un peu plusnaturellement.


Quandma mère arrive, je suis encore en train de danser. Oups. Je n'avaispas vu l'heure passer. Ce n'est pas que je n'ai pas le droit dedanser, c'est juste que je n'aime pas qu'ils me voient. J'ai un peuhonte de ce que je fais, j'avoue, je ne suis pas très douée, etsurtout, quand je fais ça c'est souvent que je me sens mal, et jen'ai pas envie de les mêler à tout ça. Mais bon, j'imagine quec'est trop tard puisque ma mère me fait « Ça ne va pas mapuce ?

-Sisi, c'est juste que je m'ennuyais alors j'ai eu envie de danser.

-Jevois bien que ce n'est pas vrai, allez, viens me faire un câlin. »

Quandelle me dit ça, ce n'est pas une question mais une obligation, jem'exécute donc. « Tu sais, tu peux tout me dire... »Non, pas tout. Je peux pas leur dire que je suis amoureuse d'unefille.

Lu'Where stories live. Discover now