XVII

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Thierry Lafond était toujours installé à son bureau, et feuilletait plusieurs dossiers à la fois, un rafraîchissement dans la main. Il aurait préféré ne pas travailler en ce jour de chaleur et profiter d'un bon transat au soleil en compagnie de sa femme et leurs deux fils, seulement la curiosité le rongeait depuis qu'il avait mis la main sur les dossiers de Natacha Andreï. Son enquête n'avançait pratiquement pas, mais il savait qu'il en viendrait forcément à bout à un moment où à un autre. Il n'était pas du genre à lâcher facilement prise et quand bien même l'investigation s'avérait être plus compliquée que prévue. Seulement pour le moment il était au point mort, le tas de paperasses jonchant son bureau n'étant en réalité qu'un véritable casse-tête... Comment la jeune femme avait-elle pu disparaître sans explication rationnelle et réapparaître tout aussi surnaturellement comme une fleur au bout de tous ces mois ? Les questions que tous avaient oublié depuis bien longtemps persistaient dans son esprit.

Et, outre tous ces mystères, une nouvelle interrogation vint s'ajouter à la pile : l'hôpital l'informant quelques instants plus tôt qu'un jeune homme mutilé de multiples façons avait été retrouvé, sans papiers ni vêtements, en partie grâce à cette même Natacha qui lui causait tant de soucis.

Pour lui cela ne pouvait être une simple coïncidence, aussi décida-t-il de poursuivre avec plus d'ardeur son enquête mystérieuse pour résoudre ce problème.

***

Lorsque Tristan ouvrit les yeux, la première chose qu'il vit, fut une jeune femme assoupie sur une drôle chaise métallique comme il n'en avait jamais vu de semblable auparavant, près de lui. Il voulut s'étirer pour débloquer son corps alourdi, mais un mal de tête omnipotent, et des sensations douloureuses dans son épaule, l'empêchaient de bouger aussi rapidement qu'il l'aurait souhaité. Il ne réussit qu'à se redresser tant bien que mal pour s'asseoir dans le lit confortable où il avait dormi. Sa tête lui tournait un peu, mais il n'avait plus aussi mal à l'épaule, qu'avant de perdre connaissance, ça qui le réjouissait grandement. Une fois positionné confortablement, il jeta un regard circulaire à la pièce qui l'entourait. La conscience de son corps et l'étrange conformation de la pièce dans laquelle il se trouvait lui confirma qu'il n'était ni mort, ni au Paradis. Mais ignorait cependant tout de ce nouvel environnement.

Tournant la tête vers son bras, il fut surpris de constater qu'il était enroulé dans une grande écharpe d'une blancheur qu'il avait rarement eu l'occasion de voir. Son torse nu laissait apparaître d'étranges carrés blancs incrustés solidement sur sa peau, signe que les plaies reçues d'Ira avaient certainement été prises en charge, même si cette technique de soin lui était encore inconnue. Les multiples blessures de son abdomen avaient, en effet, toutes été soignées, sans exception, ce qui le surpris car il avait l'habitude que le médecin du château ne soigne que les blessures profondes, laissant les plus superficielles se guérir d'elles-mêmes. En touchant son visage, il se rendit compte que celles sur celui-ci étaient également couvertes et eut un léger pincement au cœur à l'idée de découvrir les nouveaux traits faciaux qui le caractériseraient par le futur. Il se promit néanmoins de remercier chaleureusement son bienfaiteur, avant de tourner la tête de chaque côté pour mieux situer où il pouvait bien se trouver.

Le lieu était calme, comme la plupart des hospices de Cheralye, mais il n'avait jamais rien vu de semblable. Les murs étaient immaculés et lisses, cependant ils n'étaient ni fait de bois, ni fait de pierre. Le lit où il était assis, avait l'odeur du linge propre, et les draps étaient particulièrement épais et doux, contrairement à ceux auxquels il avait été accoutumé depuis toujours. Mais alors qu'il laissait son regard se promener, celui-ci se figea sur le visage endormi de la jeune femme brune non loin de lui. Ses traits gracieux et sa chevelure foncée firent doucement chavirer son cœur. Il était indéniable qu'elle était jolie, voire même l'une des plus belles jeunes filles qui lui avaient été données de voir. Un nez fin et droit, des pommettes joliment dessinée, une bouche charnue et rosée. Cependant un détail le frappa, elle était vêtue d'une manière très étrange presque outrancière, ce qui retint toute son attention. Le bas noir qui lui collait aux jambes comme une seconde peau mettait en valeur la finesse de celles-ci, et l'étrange tunique blanche dépourvue de manches et décorée de petits motifs colorés qu'elle arborait, faisait deviner la forme de sa poitrine, et sa taille mince.

Le Temps Des Sortilèges - Tome 2 - Le ChoixOù les histoires vivent. Découvrez maintenant