L'option Boîte de Claquemurge

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Une fanfiction en hommage au plus grand : Terry Pratchett. Si vous ne connaissez pas le Disque-Monde, les références risquent de vous passer un peu au-dessus, et surtout qu'est-ce que vous faites ici ? Foncez le lire ! 


« Bonjour Monsieur ! Heu... Monsieur ?

L'homme grand et maigre sursauta en réalisant qu'on s'adressait bien à lui. Rincevent était de l'avis général, même si ce n'était pas particulièrement le sien, le plus mauvais mage de toute l'Université de l'Invisible. Il travaillait au service du bibliothécaire et on considérait qu'il avait à peu près autant d'utilité qu'un meuble[1], c'est pourquoi la plupart des gens ne se donnaient pas la peine de lui adresser la parole.

Son interlocuteur avait de plus un air respectueux voir même vaguement inquiet que Rincevent n'avait guère l'habitude voir en face de lui. Par réflexe il jeta un coup d'œil par-dessus son épaule pour voir si un mage important ne s'était pas glissé en douce entre lui et la série des Classicus qu'il était en train de ranger. Mais ce n'était pas le cas.

Celui qui l'avait interpellé lui disait quelque chose. Un dos un peu voûté, des cernes, des cheveux en bataille, une odeur rappelant qu'il était loin de la maison de sa maman et devait choisir ses sous-vêtements tout seul, plus de boutons d'acné que de barbe... Soudain la lumière se fit : un étudiant ! Évidemment, à force de vivre dans une université, on finissait forcément par en croiser un un jour ou l'autre [2]. Quoique plus souvent en train de faire le mur pour aller vider quelques chopes au Tambour crevé que dans la bibliothèque où ils risquaient toujours de se faire lire un bouquin plus costaud qu'eux.

L'étudiant continua : « Vous êtes bien le mage Rincevent ? J'aurais un service à vous demander, Monsieur.

Cette modeste phrase déclencha les pires craintes de Rincevent. D'un geste de la main il arrêta l'étudiant et lui demanda :

— Il ne s'agit pas de sauver le monde, n'est-ce pas ?

— Pardon ?

— Et pas un pays non plus ? Ni une demoiselle en détresse ? Non, de toute façon il n'y a pas la moindre chance pour que je rencontre un jour une demoiselle, ou alors une de quatre-vingt treize ans peut-être. Il est hors de question que j'accepte la moindre quête, tu comprends.

— Mais... heu... non, Monsieur, rien de ce genre. J'aurais juste besoin de renseignements pour un devoir.

— Et tu comptes froisser le tissu de la réalité pour voir si tu arrives à le repasser ensuite ? Interviewer le Créateur et lui demander pourquoi il a oublié la mayonnaise ? Un truc dans ce genre-là ?

— Non Monsieur. On m'a dit que vous aviez un coffre en poirier savant et je voulais rédiger mon devoir dessus. Si ça ne vous dérange pas. »

Immédiatement Rincevent se sentit soulagé. Une longue existence (allez savoir pourquoi, les moments horribles lui paraissaient toujours plus longs) passée à affronter les Choses de la Basse-Fosse, voyager entre les univers, renverser des gouvernements, défier les dieux et les héros, et d'une façon générale à éviter de se faire tuer de centaines de manières variées et souvent exotiques lui avait donné un instinct de survie surdéveloppé. Il était l'as des as de la fuite, et même si chaque fois qu'il avait sauvé sa peau c'était pour se jeter dans la gueule d'un loup tout juste un peu plus gros, la Mort lui[3]-même disait de Rincevent : « AH OUI, CELUI-LA... ». Son système d'alarme personnel s'était donc déclenché immédiatement en entendant l'autre l'appeler Monsieur avec une majuscule et par-dessus le marché être poli. Car on ne sait jamais à quoi s'en tenir avec les gens polis qui vous demandent un service. Au moins, un coup de pied annonce franchement la couleur, et il y a peu de chance pour que celui qui vous le donne ait ensuite l'intention de vous faire autre chose que de vous donner un autre coup de pied (voir un crachat si c'est le videur d'une taverne dans laquelle vous êtes ivre mort et dépouillé de tous vos biens). Tandis qu'un service, c'est à tous les coups vous envoyer au-devant d'une mort atroce pour une noble cause. Rincevent n'avait rien contre les nobles causes. Il estimait simplement que sa vie était à elle seule une cause encore plus intéressante, et surtout savait qu'il était le seul à vouloir la défendre.

Idées folles et autres faribolesWhere stories live. Discover now