Lectures du soir

Le garçon de mon bus

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Aujourd'hui encore, je prenais le bus pour rentrer chez moi. Tous les lundis, je finissais à 12h, c'était le petit plaisir de la semaine. En général, pour ne pas dire toutes les semaines, on allait manger sushis, avec mes amis, dans un restaurant japonais pas très loin de notre lycée. Paul et Léo, mes amis en question, pouvaient rentrer à peu près quand il voulait puisqu'ils habitaient en centre-ville. Mais moi, j'étais obligé d'attendre une rare ligne pour rentrer dans ma campagne. Elle ne passait qu'à 8h, 16h et 18h ce qui était assez contraignant.

Mais pour dire vrai, attendre le bus de 16h – parce que c'était celui que je prenais tous les lundis – n'était pas si déplaisant que cela. En fait, j'avais même hâte. Non pas de rentrer chez moi, mais plutôt du fait que dans mon bus, depuis le début de l'année, se trouvait un magnifique jeune homme.

Je ne lui avais jamais parlé, j'étais bien trop timide. Il fallait dire qu'il était très intimident et très beau. Il portait toujours un T-shirt, puisque les rares fois où il avait une veste, il prenait toujours le soin de la retirer une fois dans le véhicule. D'ailleurs, il la plaçait toujours entre ses jambes, ne prenant jamais la peine de s'assoir et laissant volontiers sa place aux autres passagers. Sous ce T-shirt très souvent blanc, je pouvais aisément voir une musculature entretenue et développée. Et bon dieu, quel plaisir pour mes yeux ! Parfois il avait aussi des lunettes rondes sur le nez qui lui allait à merveille. Et quand il n'écoutait pas de musique avec ses écouteurs Bluetooth, il lisait un livre toujours en restant debout.

Je ne savais ni quand il montait, ni où il allait puisqu'il était déjà là quand je rentrais dans le bus et toujours là quand j'en sortais. La seule chose dont j'étais sûr, c'était qu'il me plaisait incroyablement et que je rêvais d'entendre sa voix. J'en avais déjà parlé des milliers de fois à Paul et Léo, qui à chaque fois me poussait à lui parler. Mais rien n'y faisait, j'étais bien trop peureux pour cela.

Aujourd'hui donc, j'étais dans ce bus de 16h. Et il était encore là. Il se tenait à une des barres du bus, un livre entre les mains et ses lunettes sur le nez. Cette fois pourtant il n'était pas en blanc mais portait à merveille un T-Shirt noir qui faisait ressortir sa chevelure ébène. Qu'il était beau.

Il ne m'avait jamais vu le regarder et bien heureusement parce que j'avais l'air d'être un psychopathe. Mais j'imaginais de toute façon, avec quasi-certitude, qu'il devait avoir l'habitude d'être ainsi admiré.

J'avais beau lui passer devant après avoir pris mon billet toutes les semaines, jamais je n'avais osé dire ne serait-ce qu'un bonjour. Et lui n'avait jamais relevé la tête à mon passage, bien trop concentré à lire ou regarder le paysage. Pourquoi noterait-il la présence d'un passager parmi tant d'autre après tout ?

Je ne mettais jamais mes écouteurs le lundi, au cas où il veuille m'aborder. En soi c'était stupide parce que je l'observais tellement que je le verrais sûrement venir mais pourtant, je ne pouvais me résoudre à m'isoler dans ma musique. Je ne m'habillais jamais trop avec des marques aussi, j'avais peur que s'il me remarque, il pense que j'étais un fils à papa. C'était faux, complètement faux, mais j'aimais la mode depuis tout petit et tout mon argent de poche passait dans Gucci. Chacun ses passions après tout. Lui devait avoir une passion plus intéressante. Un sport, une activité intellectuelle, n'importe quoi. Mais évidemment pas la mode...

Finalement, aujourd'hui encore, je descendis à mon arrêt après avoir contemplé ce bel inconnu durant près d'une heure, sans lui avoir adressé ne serait-ce qu'un mot et dans la hâte de le revoir le lundi prochain.