CHAPITRE 1

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POINT DE VUE DE LAURE:

Une musique stridente se fit entendre dans son rêve. 

Tournant sur elle-même, dans le jardin où elle avait passé de nombreuses vacances, elle n'arrivait pas à voir quel objet, quel animal pouvait créer un bruit aussi effrayant qu'insupportable. Tout ce qu'elle voyait était les champs de fleurs jaunes bougés au gré du vent, deux rouge-gorges volés au-dessus de la cabane en bois que son grand-père venait de construire pour elle et sa grand-mère faire un gâteau à travers la fenêtre de la cuisine. Le son se fit de plus en plus intense, strident si bien que Laure, dans sa longue robe bleue à carreaux, dut se boucher les oreilles pour faire ce bruit intolérable. Puis, sans comprendre pourquoi, elle se sentit tomber en arrière, une force étrange l'emmener dans sa chute. Elle tenta de s'accrocher au vide, dans l'espoir d'être retenue dans sa chute par quelque chose. Elle ferma les yeux, prête à percuter l'herbe et...sentit le dur plancher de sa chambre.

— Aïe.

Sonnée, elle mit quelques instants à reprendre ses esprits. Elle ouvrit les yeux et avec désolation, admira son plafond. Quand Laure remarqua que le bruit incessant qui l'avait tiré des bras de Morphée n'était autre que son réveil, elle râla et se releva en se frottant le coude. Ce foutu son lui tapait sur le système depuis quelques semaines mais après ses quelques maigres heures de sommeil, il lui donnait des envies de meurtre. Tendant le bras vers sa table de chevet, elle l'éteignit et le silence remplit de nouveau sa chambre pour le plus grand bonheur de ses oreilles. Elle en profita pour désactiver les dix autres qui allaient suivre — malgré la mélodie affreuse, peu de choses parvenaient à la tirer de ses rêves.

Elle s'assit sur le rebord moelleux de son matelas et dut chercher, au plus profond d'elle-même, la motivation nécessaire pour affronter une nouvelle journée ennuyante. Sortir de sa petite bulle parfaite pour envoyer des CV et répondre aux emails de refus n'avait rien de charmant. Pourtant, c'était son quotidien morose depuis quelques mois. 

Remettant sa couette à regret sur son lit, elle soupira d'envie quand son chat, Mistigri fit son apparition et sauta sur l'oreiller qu'elle voulait remettre en place.

— Dis donc, tu veux descendre ? J'essaye de faire mon lit au cas où tu ne l'aurais pas remarqué.

Elle n'eut que pour simple réponse, un miaulement. Quelle chance d'être un chat

Elle en profita pour allier ses coussins avec parcimonie, étaler son énième couverture et ouvrir la fenêtre. Et alors qu'elle allait ouvrir la porte pour se rendre dans la cuisine et se servir un café, sa mère manqua de lui rendre dedans.

— Oh, tu es enfin levée !

— Coucou maman.

— Tu sais, le sommeil est la meilleure arme pour affronter la vie. Tu devrais mettre de l'anti-cernes...lui ordonna-t-elle avant de disparaître dans le couloir.

Laure leva les yeux au ciel, contrariée par la réflexion de sa mère. Du haut de ses 32 ans, elle savait parfaitement prendre soin d'elle-même sans son aide. Ou presque...Avant de revenir à la maison, elle l'avait rarement appelé. Outre cas de force majeure tel que savoir si l'ibuprofen agirait contre des maux d'estomac ou comment savoir si le saumon qui traînait depuis 4 jours dans le frigo était encore mangeable. Non, elle n'était plus une enfant, se rassura-t-elle. De temps à autre, sa mère se faisait un malin plaisir à la traiter comme telle.

Laissant derrière elle son pyjama, aussi tôt arrivée dans la salle de bain, elle se faufila dans la grande douche italienne. L'eau terriblement chaude détendit ses muscles endoloris par sa chute et elle remarqua avec effroi qu'elle avait déjà un bleu sur le bras. Ce fichu rebord de lit..., marmonna-t-elle sous le pommeau de douche. Une vingtaine de minutes plus tard, les cheveux enroulés dans une serviette et habillée, elle s'assit à la table du salon son ordinateur en face d'elle. Il ne lui fallut que quelques instants pour lire les emails qu'elle avait reçues dans la soirée. Avec un regard rempli de mépris, elle s'affaira à les supprimer les uns après les autres en cliquant avec un trop d'énergie sur la merveilleuse poubelle de sa boîte-mail.

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