Once upon a time... Addie

56 6 0
                                    

   Elle marque une petite pause, me laissant le temps de me servir un peu de café aussi.

ADDISON. – Bon... Hmm... Je... je suis née dans le Connecticut. Mon... plus vieux souvenir d'enfance remonte à mes sept ans. Je faisais du vélo avec mon frère dans le vignoble de nos parents. On descendait le chemin quand mon pneu a crevé. Je suis tombée. Je me suis éraflé le visage... J'avais très peur, et très mal, mais Archer m'a dit que tout irait bien. Il m'a ensuite ramenée à la maison en me portant sur près d'un kilomètre. Depuis cette histoire, je l'ai toujours considéré comme ça : celui qui m'a ramenée à la maison en me disant que tout irait bien...

   Je l'écoute attentivement, touchée qu'elle me confie tout cela.

ADDISON. – A l'âge de... huit ans, je crois, je me chargeais déjà de préparer les... boissons du Capitaine. C'est mon père. On l'appelle comme ça, avec Archer. J'ai aussi dû nier le fait qu'il couchait avec sa secrétaire. Je l'attendais pendant qu'il était dans son bureau, en train de faire l'amour avec elle...
MOI. – Attends... Tu... tu étais dans la pièce à côté, pendant qu'il faisait ça ?
ADDISON, des sanglots amers au coin des yeux. – Oui. Et ce n'est pas le pire. Le pire, c'est que je devais prétendre auprès de ma mère que je passais de bons moments avec lui, qu'on allait manger des glaces... L'adultère doit être génétique, en fait.

   Avalant une gorgée de café brûlant, je pose mes doigts sur les siens. Elle accepte de prendre ma main.

ADDISON. – Il... se tapait tout ce qui bougeait, à vrai dire... Et je devais toujours le couvrir.
MOI. – Tu en as souffert...
ADDISON. – Beaucoup.
MOI. – On ne devrait pas demander ça à une enfant...
ADDISON. – A qui le dis-tu... J'aurais mille fois préféré vivre en ayant moins de moyens, mais dans une famille saine. Il a toujours été toxique. C'est peut-être pour ça que je le suis aussi... J'ai été élevée comme ça, avec un modèle familial du non-dit, du mensonge...
MOI. – Tu n'es pas toxique. Tu as seulement trop souffert.
ADDISON. – Et toi, tu... tu m'aimes trop pour t'en rendre compte... Iness, crois-moi, j'ai vraiment peur de te faire du mal malgré moi, parce que je suis comme ça : je détruis tout ce que je touche et... ça me terrifie.
MOI. – La famille saine, ça peut être nous, Addison... Nous deux.

   Elle serre ma main.

ADDISON. – Enfin bref. J'ai... fait mes études à Yale, puis j'ai quitté le Connecticut pour aller à New York. C'est là-bas que je suis entrée à la Columbia University College of Physicians and Surgeons, et que j'ai rencontré Derek... Et Mark. Après nos études, Derek et moi avons ouvert des cabinets privés, puis nous nous sommes mariés. Les premières années, tout allait bien... Puis ça a été la chute libre. C'est ce que je t'ai déjà expliqué, il était de plus en plus absent, et j'en souffrais. Il ne faisait pas attention à moi. J'étais devenue transparente... Alors j'ai fait une bêtise, parce que Mark était disponible pour moi, parce qu'il m'accordait son attention et... j'ai honte de l'avouer, mais il m'a aussi permis d'assouvir un besoin charnel...
MOI. – Derek et toi...
ADDISON. – Derek et moi rien du tout. On ne faisait plus rien, depuis des mois. J'ai bien essayé seule mais... ce n'est pas pareil... Enfin bref. Mark était là. Derek l'a découvert. Nous a surpris. Il m'a jetée dehors, à raison : j'étais fautive. Mais ensuite, il m'a dit de rentrer, et que c'était lui qui partait. Je ne méritais que ça, mais à ce moment-là, je me suis sentie abandonnée...

   Une larme dévale sa joue. Elle est encore très fragile par rapport à toute cette histoire. Elle aura besoin de temps pour guérir, ce que je comprends.

ADDISON. – Je suis désolée, c'est... c'est juste que...
MOI. – Que tout ça t'a fait beaucoup de mal...
ADDISON. – Voilà. Alors tu comprends pourquoi je me suis éprise de toi ? Tu... tu es une des rares personnes capables de me comprendre. Tu m'as toujours témoigné du respect. Tu ne m'aimais pas, mais tu n'en faisais pas une affaire personnelle.
MOI. – J'aimais travailler avec toi. Je ne voulais pas devenir ton amie, et soit dit en passant : j'avais tort, mais en tant que collègue, j'ai toujours eu de l'estime pour toi. Tu m'as formée. Sans toi, je ne serais pas là où je suis maintenant. J'ai eu énormément de chance de te rencontrer. Plus encore depuis...
ADDISON, souriant. – Qu'on couche ensemble ? Enfin... qu'on est ensemble.
MOI, lui rendant le sourire. – Oui.
ADDISON. –... Tu sais, je... j'ai l'impression que ça fait des années qu'on a une relation... Ça me fait peur, quelque part, mais j'ai le sentiment d'avoir trouvé ce que je cherche depuis toujours. Je me sens... entière. Je ne saurais même pas l'expliquer... Je pense que c'est seulement parce que tu es... toi.

   Je sens mes joues s'empourprer tandis que mes yeux s'embuent. Elle le voit.

ADDISON. – Je suis sérieuse. Si vraiment tu tiens à rester avec moi, malgré tout ce qui te menace, je pense que tu peux me sauver...
MOI. – Je ne peux pas te sauver. Si je peux faire quelque chose pour toi, c'est seulement te soutenir, t'épauler, faire le chemin avec toi, le temps que tu te sauves toi-même.
ADDISON. – Tu crois que j'en suis capable ?...

   Je la regarde dans les yeux, appréciant la profondeur et la puissance de ce qui nous unit.

MOI. – J'en suis convaincue.

I'm in Love with Satan | EN PAUSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant