Flying Away

36 5 3
                                    

   Aux alentours de 21:00, Addison me bipe. Je suis surprise : elle me bipe dans le bureau du Chef. Lorsque j'y arrive, je toque discrètement à la porte et entre. Elle et Bailey sont debout en face du docteur Webber. Elles se retournent à mon entrée.

MOI. – Bonsoir. Addison, vous m'avez bipée ?
ADDISON. – Oui.
DR. WEBBER. – Oui, docteur Blanc. Le fait est que le docteur Bailey et le docteur Shepherd partent demain soir pour un week-end de conférence à Boston.
MOI, ne voyant pas où il veut en venir. –... Et donc ?
DR. BAILEY. – Addison veut que vous veniez avec nous.
MOI, croisant justement son regard. – Oh ! Ahem...
ADDISON. – Si je ne m'abuse, vous n'avez encore jamais eu la chance de partir pour un de ces week-ends, et je pense que c'est quelque chose qui pourrait beaucoup vous plaire. Maintenant que vous êtes titulaire, c'est certes une belle occasion pour apprendre mais aussi et surtout pour vous faire un carnet d'adresses auprès de confrères.
DR. WEBBER, tapotant une enveloppe sur son bureau. – Si vous acceptez la proposition, et croyez-moi : vous devriez, votre billet d'avion est là. En revanche, il était trop tard pour vous réserver une chambre à l'hôtel...
ADDISON. – Vous devrez partager la mienne.
MOI, réprimant ma joie de toutes mes forces. – Ça ne me pose pas de problème.
DR. WEBBER, me tendant l'enveloppe. – Parfait ! Eh bien tenez, voilà pour vous.
MOI. – Merci beaucoup, monsieur.
DR. WEBBER. – Remerciez avant tout Addison.

   Je me tourne vers elle. L'espace d'une seconde, les yeux dans les yeux, nos âmes fusionnent. Je lui souris.

MOI, sous-entendant tellement plus. – Merci, Addison...

   Nous quittons toutes trois le bureau du Chef. J'échange plusieurs regards lourds de sens avec Addison, lui étant reconnaissante.

DR. BAILEY. – Bon, docteur Blanc, on se donne rendez-vous à l'entrée de l'hôpital, demain, à 17:00 tapantes. On a rendez-vous à l'aéroport à 18:00. L'avion décolle à 20:00. C'est bon pour vous ?
MOI. – Oui, docteur.
DR. BAILEY. – Bien. Ne soyez pas en retard.

   Sans attendre de réponse, elle tourne les talons et quitte les lieux. Addison et moi nous regardons en riant.

MOI. – Toujours en ébullition, notre Bailey...
ADDISON. – Toujours.
MOI, posant une main sur son avant-bras. – Merci de m'avoir incrustée.
ADDISON. – Je t'en prie. On va pouvoir passer du temps ensemble sans se compromettre avant que je récupère tous les papiers pour le divorce et que je les donne enfin à Derek...
MOI. – Tu crois qu'on arrivera à ne pas se trahir devant Bailey ?
ADDISON. – On ne s'est pas trahies devant Richard, et pourtant Dieu sait qu'il a assisté à des moments... délicats. Alors Bailey, on s'en sortira : on est bonnes actrices, Iness. Si on fait exactement comme on vient de faire quand on sera avec elle, tout se passera bien. Ne t'inquiète pas.
MOI. – T'as raison. Et puis... personne ne nous soupçonne.

   Elle me lance un regard complice que je lui rends.

MOI. – Bon, allez, c'est pas le tout, mais j'ai une valise à faire, du coup...

   Je jette un œil alentour et, voyant l'endroit désert, embrasse doucement Addison.

MOI. – A demain, Addie.
ADDISON. – A demain.

***

   Le lendemain, comme convenu, je rejoins Bailey et Addison à l'entrée du bâtiment. J'arrive, valise à la main, en même temps que Bailey.

MOI. – Bonjour docteur Bailey.
DR. BAILEY. – Docteur Blanc.

   Nous rejoignons Addison. Je suis surprise en la découvrant moins bien habillée qu'à l'accoutumée, mais je crois que ça me plaît. Après tout, l'Addison en jean et sweat-shirt est à mes yeux largement aussi belle que l'Addison en jupe crayon et talons aiguilles. Enfin passons, il faut surtout que j'arrête de la reluquer.

MOI. – Bonjour.
DR. BAILEY. – Docteur Shepherd.
ADDISON. – Bonjour. Vous êtes prêtes, on peut y aller ?
DR. BAILEY et MOI. – Oui.

   Nous embarquons dans notre taxi, direction l'aéroport. Je reste silencieuse durant tout le trajet, étant un peu anxieuse à l'idée de monter à nouveau dans un avion. Une fois nos bagages enregistrés, nous gagnons la porte d'embarquement et n'avons plus qu'à attendre. Addison et Bailey discutent. Pour le moment, elles ne semblent pas se rendre compte de mon malaise, ce qui me convient parfaitement.

DR. BAILEY. – Vous savez qui sera de la partie ?
ADDISON. – Non, pas vraiment. Je ne me suis pas renseignée. Ça ne m'étonnerait pas que Nicole Herman vienne... Mais sinon, je ne sais pas...
DR. BAILEY. – J'ai entendu dire qu'il y aurait Marie Cerone...
ADDISON. – C'est possible.

   L'embarquement commence. Je redoute. Je n'ai pas de très bons souvenirs des moments qui arrivent. Une fois dans l'avion, nous trouvons assez rapidement nos places. Je suis contente : je suis côté hublot et Addison est directement à côté de moi. Ça me rassure déjà un peu de la savoir toute proche. Je reste néanmoins fermée comme une huître. Alors que l'avion démarre et commence à rallier la piste de décollage, je me sens de moins en moins bien. Je tremble. Bailey finit par se rendre compte que quelque chose ne va pas.

DR. BAILEY. – Blanc, vous allez bien ?

   Je ne réponds pas. Au même moment, Addison se tourne rapidement vers moi et prend conscience de mon état.

ADDISON. – Ouh là, Iness ? Ça va ?
DR. BAILEY. – C'est l'avion qui vous fait peur ? Vous avez le mal des transports ?

   Grâce à Dieu, non, je ne l'ai pas. Il ne manquerait plus que ça... J'opine négativement. Addison saisit discrètement ma main tout en se penchant vers moi.

ADDISON. – Tu es très pâle... Qu'est-ce qui se passe ? Parle-moi...

   Je soupire. Les mouvements de l'avion font rejaillir des traumatismes enfouis depuis très longtemps. Je me concentre pour trouver enfin le courage de leur dire ce qui ne va pas.

MOI. – C'est... c'est seulement que la dernière fois que j'ai pris l'avion, c'était un... un aller simple... Un vol sans retour depuis la Russie...

   Bailey reste sans voix, ne sachant quoi répondre. De toute manière, il n'y a rien à répondre. Addie fait aller et venir son pouce sur ma main, essayant ainsi de me rassurer. Un dernier virage, puis l'accélération. Je serre sa main tandis qu'une larme coule sur ma joue. Je me penche en avant, tentant de retenir mes sanglots. Elle s'en aperçoit et fait alors quelque chose qui me surprend : elle passe un bras dans mon dos et m'attire contre elle. Je ne pense même pas aux conséquences que ça pourrait avoir et fonds en larmes dans ses bras, me cachant, le visage enfoui dans sa nuque.

ADDISON. – Chuuu... Doucement, je suis là, respire... Je suis là...
DR. BAILEY. – Blanc, ressaisissez-vous...
ADDISON. – Miranda ! Elle a besoin de soutien, ce n'est pas le moment de lui dire de se ressaisir.

   Je me blottis plus étroitement contre elle et elle serre l'étreinte. Sa présence, son odeur, son corps enveloppant le mien m'aident à ne pas sombrer. Bailey semble quant à elle lâcher l'affaire, se rendant compte que la situation ne regarde finalement plus qu'Addison et moi.

MOI, chuchotant, la voix brisée par les sanglots. – Excuse-moi...
ADDISON. – C'est rien. Ne t'inquiète pas... Ta réaction est tout à fait légitime.
MOI. –... Je peux rester encore un peu contre toi ?...
ADDISON. – Bien sûr. Reste aussi longtemps que tu en as besoin.
MOI. – Merci... Merci de ne pas me juger, de me comprendre...
ADDISON. – C'est normal, Iness...

   Je reste encore quelques instants dans ses bras puis me défais d'elle, ayant pris sur moi, lui lançant un discret regard empli de gratitude. Après un bon quart d'heure, Addie tente de renouer la conversation avec Bailey, afin de lui faire oublier ce dont elle a été témoin. Ça semble fonctionner. J'essaie de me joindre à elles, de temps en temps, mais je ne suis toujours pas à l'aise. Les heures passent, lentement. Vers 22:30, nous finissons par nous souhaiter mutuellement bonne nuit. Je vais essayer de dormir, donc. Je sais que je n'y parviendrai pas, mais enfin ça ne me coûte rien d'essayer.

I'm in Love with Satan | EN PAUSEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant