2 - Les ennuies commencent

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J'avais une vie tranquille. Une vie parfaite. Aujourd'hui la vie m'a appris que l'on nous met constamment à l'épreuve. Ma mère et moi nous étions quittées en mauvais termes : malgré nos fréquentes disputes, je savais toujours quand j'allais la revoir. Je ne pensais vraiment pas qu'elle était sérieuse lorsqu'elle parlait de m'envoyer dans une école très loin de la maison.

Je commence à me perdre dans mes pensées lorsque j'entends quelqu'un m'interpeler.

— Psssst.

— Euh oui ?... Murmuré-je.

Mon chauffeur me jette un regard interrogateur dans son rétroviseur.

— Excusez-moi mademoiselle avez-vous dit quelque chose ? me demande-t-il.

— Euh... Non rien oubliez.

— Très bien.

Je dois rêver ou j'imagine des choses : à vrai dire, je suis assez fatiguée, je somnole peut-être ? J'ai quand même cru entendre un enfant parler. Est-ce possible que je devienne déjà folle après seulement quelques petites heures de voiture ? Les paysages ne sont plus que plaines d'un côté et forêts de l'autre. Il n'y a plus aucun signe de vie. Où peut-on bien nous rendre ? Je m'éclaircis la gorge avant de lui demander :

— Comment est-ce que tu t'appelles ?

Sur le reflet de son visage se dessine un petit sourire amical.

— On se tutoie déjà ?

— Oh, pardon excuse-moi enfin je veux... Je veux dire excusez-moi, dis-je, confuse.

Il éclate de rire et me regarde dans le rétro.

— Je rigole bien évidemment, vous pouvez me tutoyer demoiselle. Je m'appelle Drake Palm, dit-il, comme pour me rassurer. Son rire est tellement communicatif que je me mets à rire pour rien.

— D'accord monsieur Palm. Au fait, peux-tu me dire où tu m'emmènes ? demandé-je, l'air de rien.

— Négatif, demoiselle. Vous ne le saurez qu'arrivée là-bas.

— Tu sais tu peux me tutoyer moi aussi, je m'appelle Rubis. Rubis Mills.

— Rubis Mills ? Comme Edwards Mills ? demande-t-il, sur un ton plein de curiosité.

— Qui est Edwards Mills ?

— Non, oublie... Oublie ce que je viens de dire, s'il te plaît.

Ce prénom ne me dit rien et c'est pourtant le même nom de famille que moi. Serait-ce un cousin éloigné ou quelque chose comme ça ? Je n'en ai vraiment aucune idée.

Alors que tout est calme sur cette longue route, quelque chose vient subitement percuter le pare-brise de la voiture. Je n'arrive pas à voir la cause de l'accident, mais ça avait l'air plutôt gros. Drake lâche un juron :

— Merde !

Il sort de la voiture et se baisse devant elle. À première vue, il n'y a rien de grave, car il se relève et s'approche de ma portière calmement. Il toque à ma fenêtre et me fait signe de l'abaisser. Puis il se rapproche, jusqu'à avoir son visage à quelques centimètres de ma tête : je sens le rouge me monter aux joues. Doucement, il murmure :

— Ne bouge pas de la voiture c'est clair ?

Cette proximité de nos visages me met mal à l'aise. Je suis tentée par ces beaux yeux marrons qui semblent voir à travers mon âme, par ces lèvres pulpeuses à souhait et par sa petite fossette qui me fait fondre. Il insiste :

— Promets-le-moi Rubis.

Je n'arrive à formuler aucune phrase à cet instant. Pourtant, comme si j'avais donné une réponse, il se relève, s'éloigne et me presse de refermer la fenêtre. Il me faut au moins deux bonnes minutes pour revenir à moi. J'oublie alors un instant Drake et sa gentillesse et ne pense qu'à une seule chose : m'enfuir.

De Nature SauvageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant