|Chapitre 2|

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Si on m'avait un jour dit que j'étudierai les sciences, je ne crois pas que je l'aurais cru. Pourtant me voilà à New York, passionnée de littérature, pour apprendre le bon fonctionnement du corps humain.

En première, je ne savais pas quoi faire de ma vie et les inscriptions à l'université se rapprochaient à grands pas. J'aimais la littérature, mais je ne voyais aucun avenir dans cette filière, alors puisque j'étais assez bonne en sciences, j'ai choisi la médecine. C'était une décision prise sur un coup de tête, j'étais perdue, mais mon père était tellement fier. J'étais si heureuse de voir ses yeux briller lorsqu'il racontait que sa petite fille allait devenir médecin, que je n'ai plus pu faire machine arrière.

Mais calme, tout va bien se passer.

J'ai sans problème obtenu mon diplôme de fin de lycée, il ne me reste maintenant plus qu'à faire mes quatre années universitaires et à intégrer une école de médecine réputée. Je me prépare depuis des années, tout va parfaitement bien se dérouler.

Je me suis aussi inscrite dans une école de danse pour me libérer l'esprit. Tant que je pourrai danser, tout ira pour le mieux. Il le faut. Bien sûr, mon père préfèrerait que je me concentre sur mes études, mais je ne peux me résigner à arrêter de danser. Ce serait comme m'ôter une partie de moi. Une partie bien trop vitale. Comme m'empêcher d'écrire m'enlèverait cette faculté d'extériorisation de mes sentiments. Ce sont les deux seules choses pour lesquelles je vis, est-ce si étrange que cela ?

Mon père est parti depuis une heure déjà, mais je suis toujours allongée sur mon lit à observer le plafond blanc. Il faudrait que je vide ma valise, que je fasse connaissance avec ma colocataire et que je visite un peu le campus, mais pour le moment je n'en ai pas envie. Et je n'ai pas encore vu la fille en question, seulement ses affaires déjà installées. D'autant plus que mon premier cours de l'année commence à dix heures.

Je relève la manche de ma robe pour regarder l'heure sur ma montre : neuf heures quarante-huit.

— Merde !

Je me lève en vitesse de mon lit et presse le pas en direction de la porte. Cette dernière s'ouvre juste à ce moment-là, dévoilant une fille blonde. Elle est jolie, souriante, du moins pour ce que j'en vois avant de passer le seuil de la chambre en vitesse. J'ai juste le temps de l'entendre me lancer gaiment un :

— Salut ! Je suis...

Mais, je ne lui laisse pas le temps de terminer. La pauvre, elle n'est pas tombée avec la plus sociale des filles.

D'autant plus que je déteste être en retard. Vraiment j'ai horreur de ça, mais c'est devenu une vraie manie chez moi. Si ce n'est pas le comble du ridicule.

J'ai déjà huit minutes de retard quand j'arrive enfin devant l'amphithéâtre. Je toque à la porte, priant intérieurement pour ne pas être la dernière. Quand je vois tous les regards se braquer sur moi, je me rappelle pourquoi et à quel point je déteste me trouver dans cette situation. En plus, je manque de tomber en ratant la marche de l'estrade réservée au professeur. Cette dernière m'observe perplexe, une expression à mi-chemin entre l'impatience et l'amusement collée au visage. Gêne et humiliation m'accablent à ce moment très précis. Pourtant c'est bête, personne ne se souviendra de ce moment, si ?

Je bredouille des excuses presqu'inaudibles à la femme qui se tient devant moi – Mademoiselle Johnson si j'ai bien lu sur mon emploi du temps – et rejoins, tête baissée, la première place libre que je trouve, un peu en hauteur. J'observe silencieusement le garçon blond assis à côté de moi, tandis qu'elle reprend son monologue sur le déroulement de son cours de biologie. Il a l'air de boire les paroles de notre professeure. Sans doute un passionné. Tout ce que je souhaite, c'est qu'il ne m'adresse pas la parole.

— Salut. Je suis Matthew, se présente-il en chuchotant.

Non, ce n'est décidément pas mon jour de chance.

— Madison, je réponds dans un demi-sourire.

Puis je me détourne pour me concentrer à mon tour. J'attends passivement que la fin des deux heures sonne, nullement intéressée par ce discours qui nous est et sera sans cesse répété.

— Ainsi, n'oubliez pas que vous jouez ici votre avenir et que chacun de vos actes pourra avoir une répercussion sur celui-ci. Sur ce, on se retrouve vendredi prochain pour notre véritable premier cours ensemble.

Je prends mon temps pour ranger mes affaires. J'aimerais pouvoir aller m'excuser pour le dérangement que j'ai occasionné en début de cours, mais pour ça je préfère être seule. Je vérifie que je suis bien la dernière à ne pas être sortie avant de m'adresser à la jeune femme.

— Excusez-moi ? l'interpellé-je, placée dans son dos.

— Oui ?

Elle se retourne et je prends un temps pour l'observer. Elle n'a pas l'air bien âgée, sans doute une petite trentaine d'années, et elle est plutôt jolie avec ses cheveux blonds coupés au carré et sa ligne de mannequin. En silence, je passe en revue sa taille marquée et ses jambes qui n'ont pas l'air d'avoir de fin. Je déglutis lentement.

— Je voulais simplement m'excuser pour mon retard de ce matin, cela ne se reproduira plus.

Mon ton involontairement désinvolte me fait frémir. Je ne voudrais pas qu'elle me trouve insolente, mais c'est sorti tout seul.

— J'espère bien, me répond-elle avec un sourire en coin. Plus sérieusement mademoiselle... Roberts, c'est ça ?

J'acquiesce doucement, infiniment surprise qu'elle connaisse mon nom. Elle sourit.

— Il me semblait bien vous avoir vu quelque part. Je suis l'une de celles à avoir analysé votre dossier pour les bourses. Ne vous inquiétez pas pour ça, rien de grave. Personne n'est mort, plaisante-t-elle.

— Vu comme ça.

— Votre dossier est vraiment remarquable. Surtout dans les matières littéraires, si je me souviens bien.

Elle me fixe droit dans les yeux, comme si elle essayait d'y déceler quelque chose, mais je ne fais que renforcer ma barrière. Les gens prendraient peur s'ils pouvaient lire en moi..

— Merci. Bonne journée mademoiselle Johnson, je réponds mal à l'aise.

Je remonte mon sac sur mon épaule et me dirige vers la porte. Mais elle s'adresse à moi juste avant que je ne passe la porte.

— Si cela peut vous rassurer, Madison, j'étais aussi en retard pour mon premier jour à la fac.

Je lui adresse un sourire maladroit et sors de la salle sans demander mon reste.

Je suis gênée qu'elle ait fouillé dans mon dossier scolaire. Même si dans le cas présent, c'était dans mon intérêt et que je ne peux donc pas lui reprocher. Mes parents ne manquent pas spécialement d'argent, mais se voir offrir la quasi-totalité de mes frais de scolarité était tout de même alléchant.

Ce qui m'intrigue, c'est qu'elle ait réussi à me cerner de la sorte. Est-ce qu'elle aurait si rapidement compris que je n'avais rien à faire ici ?

— Hé, attends ! m'interpelle une voix rauque alors que je m'avance dans le couloir.

Je me retourne, mais les yeux bleu nuit dans lesquels je me plonge me stoppent dans mon élan. Le garçon qui se tient face moi est grand, brun aux cheveux légèrement bouclés et possède un regard dans lequel je pourrais me perdre tellement leur bleu est profond.

Je suis comme pétrifiée sur place, complètement électrisée.

Perfect - Auto-éditéWhere stories live. Discover now