Chapitre 3 : la planque

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Premier point : exciter un peu la bête.

Ou, pour le dire plus correctement, appeler les anciens complices de Félix.

Il sait peu de choses d'eux. Comme lui, ils ont tous un faux nom, des prénoms parfaitement banals. Lorsqu'il s'est réveillé, il était dans un hangar aménagé en garage rudimentaire, squattant l'unique canapé. Cet endroit n'est même pas le QG de la bande, juste un point de rendez-vous. Seul Yann, le médecin et plus ou moins chef, les connaissait tous les trois. C'est lui qui a fait des présentations rudimentaires : le nom, la spécialité de chacun, son rôle dans le plan. Après quoi ils n'avaient parlé que de Lynn. Factuellement, c'est peu.

S'il fait confiance à son analyse, ce sont des mercenaires, aucun d'entre eux n'avait de rancœur personnelle contre la femme d'affaires, et ils n'étaient pas guidés par leurs intérêts directs non plus. Ils étaient habitués à ce genre de travail et se focalisaient sur les points techniques, les difficultés qu'ils risquaient de rencontrer, les plans de secours. Ils travaillaient avec lui pour la première fois mais le connaissaient de réputation, même s'ils ne croyaient qu'à moitié à son talent.

Félix a, comme les autres, reçu un téléphone pour rester en contact avec ses complices. Il l'allume, sort à nouveau l'arme et dit à Lynn :

"Je les appelle. Vous pouvez avoir l'air terrifiée, ça aidera.

— ... ça ne va pas me demander trop d'efforts.

— Alors tout va bien.

Il lui adresse son plus beau sourire. Rien à faire, il aime cette situation complètement folle où tout se joue sur le fil. Il lance l'appel en visiophone, veillant à garder le visage de la kidnapée dans un coin du champ de la caméra. Le médecin décroche presque instantanément :

— Félix, bordel de con, qu'est-ce que tu es en train de branler ?

— Je vous double, pourquoi ?

— Quoi ?

— J'ai Lynn avec moi. Dites à votre commanditaire qu'il peut la récupérer contre le double de ce qu'il a prévu de payer à toute l'équipe.

— T'es dingue, t'as aucune idée de ce à qui tu t'attaques ! Tout ce que tu vas y gagner c'est une balle en pleine tête !

— Ou beaucoup d'argent, qui sait ? En tous cas, dites-leur de ne pas trop trainer. J'ai pas mal de clients potentiels. Si on me fait une meilleure offre, je la vends.

— Je vais t'écorcher vivant, sale petit...

— Je ne pense pas que je vais garder ce téléphone, quelque chose me dit que vous vous êtes arrangé pour qu'il soit facile à retrouver. Mais vous, gardez ce numéro. Je vous recontacterai."

Il raccroche et jette le téléphone par la fenêtre. Tendue comme un arc, Lynn lui demande :

— Comment vous pensez leur échapper ?

— On va disparaitre.

— Comment ? Vous avez une planque ? Bordel, même cette voiture est...

— Oui, oui, je sais, il y a peut-être un mouchard dans la voiture, et même si ce n'est pas le cas ils peuvent retrouver l'ordinateur de bord. On va descendre d'ici cinq minutes et finir le trajet en métro. On va essayer de se noyer dans la foule et de filer là où aucune caméra ne va nous gêner.

— Quoi, dans les quartiers louches ?

Félix éclate de rire en entendant l'expression.

— Vous voulez dire les quartiers pauvres ? Bien sûr que non, ce sont les plus surveillés, que ce soit par les drones ou les flics en chair et en os. Non, on va dans un coin où on pourra vraiment être tranquilles, dans les bars branchés.

Quitte ou double (version roman NaNoWriMo2019)Unde poveștirile trăiesc. Descoperă acum