Chapitre 20 : le choix

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Mia reste silencieuse quelques instants, perdue dans ses pensées. Chat attend. Il espère qu'elle va trouver un moyen de le réconforter, de le convaincre qu'il a tort. De lui prouver que sa vie vaut autant que n'importe quelle autre, qu'il obéisse ou non.

Au lieu de ça, la jeune femme lui demande :

— Est-ce que je t'ai déjà raconté comment j'ai fait une dépression ?

— Plus ou moins. Tu as fait beaucoup de sous-entendus, mais sans donner les détails.

— Et bien, c'est lié justement à ce clone, le seul clone que j'ai vraiment connu. Il était sorti du programme, comme je te l'ai dit, et expliquait à qui voulait l'entendre que c'était sa volonté, qu'il savait qu'il pouvait faire de grandes choses, bien plus grandes que ce qu'on le laissait faire. Il était plus jeune que moi mais il a été embauché immédiatement à un poste à responsabilité, dans la banque où j'ai eu mon premier emploi. Tout le monde trouvait ça normal. C'était un clone. Son... la personne dont il venait n'était pas un financier, c'était un mathématicien, d'une époque bien avant les ordinateurs, et il avait été recréé pour être mathématicien à son tour. Mais ça le frustrait. Il était brillant, c'est certain, mais il était aussi terriblement ambitieux, et égocentrique. Je ne sais pas si c'était le cas de la personne de base. Peut-être que dans son éducation, on a pensé qu'il fallait lui donner beaucoup d'assurance et qu'ils sont allés trop loin.

— Et ça s'est mal passé avec toi ? Qu'est-ce qu'il t'a fait ?

— Il... je crois que son problème, c'est qu'il n'était pas aussi bon qu'il le pensait. Il ne tenait pas bien compte des gens et de leur coté irrationnel. Et ça, quand tu travailles avec des gens, ça ne fonctionne pas. Moi, je sortais des études, je voyais qu'il était en difficulté, et j'ai commis une erreur terrible : j'ai tenté de lui apprendre comment s'y prendre.

— Et il t'a détestée.

— Et il m'a harcelée sans merci pendant des mois. Tout y est passé. Ce que je disais et ce que je ne disais pas, ce que je pensais, mon apparence, mon milieu social, mes goûts, mes amis... Chaque détail de mon identité s'est fait laminer. Toujours dans le sous-entendu, sans jamais se faire prendre. Jusqu'à ce que je craque et que j'abandonne.

— Le salopard...

— Il m'a fallu des années pour comprendre que ce n'était pas ma faute. Et encore plus pour comprendre qu'il ne me détestait même pas. Il était stressé et il se passait les nerfs. Rien de plus.

— C'est encore pire ! Bordel, si je le choppais, je...

Mia lui prend la main et caresse doucement la marque qui reste bien visible sur son poignet. Elle murmure :

— Je pense que tu as déjà assez de travail à prendre soin de toi et de ta mère, non ?

— Ce... c'est différent.

— Je suppose. Est-ce que ça fait encore mal ? Tu as mis quelque chose dessus ?

— Il n'y a rien de spécial à mettre. Oui, ça fait encore un peu mal. Mais ça va. Globalement. Ça va finir de guérir tout seul.

— Bien.

— Mia... J'en suis capable, tu sais. Je suis capable de beaucoup plus de choses que tu l'imagines. Je peux...

— Avec le pistolet que tu caches sous ta veste ?

Chat la regarde, les yeux écarquillés, sans savoir comment se défendre. Depuis quand...

Mia rit doucement :

— Je sais que tu es capable de beaucoup de choses. J'ai bien vu qui sortait de l'appartement et qui restait à ronger les ongles en attendant. Je sais que je n'aurais pas dû chercher, mais j'avais besoin de savoir si j'avais raison ou si je me faisais des idées toute seule. Donc j'ai trouvé le pistolet. Et le crypteur. Et des déguisements au milieu de tes affaires. Je ne sais pas de quoi tu as besoin de te protéger, mais de ce que j'ai vu, tu sais prendre les choses en main.

Quitte ou double (version roman NaNoWriMo2019)Tempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang