Quitte ou double (version roman NaNoWriMo2019)

Chapitre 22 : le repère

Cette fois, Chat n'est pas drogué lorsqu'il retrouve la lumière du jour, alors que Ash lui enlève le sac et le salue d'un affectueux :

"Salut gamin. On te manquait ?

— Ben, un peu. Ash numéro deux a nettement moins d'humour que vous, c'est fou.

— Ah ! C'est rien de le dire. Je ne sais pas ce qu'ils lui ont fait subir, mais je crois que le principe c'était "tout pour qu'il ne devienne pas comme Ash". A quoi ça a servi de le fabriquer, à ce compte-là. En tout cas, chapeau, petit. Tu es encore vivant. Je ne sais pas comment tu as convaincu la patronne ni combien de temps ça va durer, mais à chaque fois que je te laisse sans solution, tu trouves un moyen pour revenir dans la course. Je suis admiratif.

— Je pense que mon charme légendaire a joué. Sinon, est-ce qu'il y aurait moyen qu'on me détache, par hasard ?

— Bien sûr.

Ash fait signe à l'un des hommes de le détacher. Ils ont utilisé des menottes métalliques parfaitement classiques, ce qui est déjà mieux que les liens de plastique de la dernière fois. Presque un carton d'invitation.

Chat tourne sur lui-même et examine ouvertement les lieux, intéressé. On l'a emmené dans un sous-sol une fois de plus, à croire que la bande a un goût bien particulier pour les caves, ce qu'il leur conseillerait d'éviter s'ils veulent sauver leur image. Cette fois c'est un grand espace qui a été aménagé avec une série d'installations informatiques, et bien entendu, en bout de course, au-dessus d'une table d'opération : le casque de lecture.

Chat note deux entrées, une grande porte de hangar qui donne peut-être sur un parking, en tout cas qui permet à un véhicule de passer lorsqu'elle est ouverte en grand, et un ascenseur. Les deux sont en métal. Les murs sont en béton. Tout est verrouillé à quadruple tour. Non, la situation n'a rien à voir avec la cave de Hailcourt. Ici, les hommes d'Amélia sont chez eux, et rien ne sortira d'ici sans leur accord.

Les hommes et les femmes d'Amélia. Il y a plus d'hommes parmi les costauds qui entourent Chat en fronçant les sourcils d'un air patibulaire, mais derrière, entre les ordinateurs et les chargements de diverses caisses, c'est assez mixte. L'ancien policier voit dans un coin ce qui ressemble à une véritable armurerie. Encore plus loin, des cages. Il demande :

— C'est là que vous avez mis Lynn ?

— Lynn ? On dirait que tu t'es attaché. Ce n'est pas bon quand on a de grandes ambitions comme toi.

— Je me vois mal l'appeler Madame Delran, honnêtement. Ah, d'ailleurs, vous ne m'en voulez pas trop pour le petit tour au port ?

— Et bien...

Ash s'approche, tout sourire, et sans crier gare lui balance deux violents coups de poing dans le ventre. Chat se plie en deux et fait de son mieux pour ne pas tomber, tandis que l'autre lui dit gentiment :

— Maintenant on est quitte.

— Super, croasse Chat.

L'image d'Altran lui revient malgré lui. Le deuxième Ash n'est peut-être pas celui qui a le plus d'humour, mais au moins ce n'est pas un humour aussi mordant, et à cet instant ça lui conviendrait bien. Mais bon. C'est aussi ça de vouloir jouer avec les durs. Pour se faire admettre, il faut faire soumission devant un sacré paquet de salauds.

Ash lui explique :

— Madame Thurstone a des projets pour Delran. Elle tient bien le mari, mais cette vieille fouine serait bien capable d'avoir planqué pas mal de ressources hors de porté de son gars, et ce ne serait pas moi qui lui reprocherais. Il faut aussi qu'on s'occupe de créer une piste pour les clones. Il faut qu'ils ferment ce putain de dossier une bonne fois pour toutes. Enfin, ça c'est mon boulot, bien sûr. Toi, ce que tu vas faire, c'est la conclusion. C'est toi qui vas la tuer.