Paris brûle-t-il ?

12 1 0
                                    

Démétrius

Comment la situation a-t-elle pu dégénérer à ce point-là ?

Je serais bien navré de vous l'expliquer...

À un moment, nous parlementions avec les forces de l'ordre et la minute d'après, elles faisaient feu sur nous. Comme si nous n'avions que cela à gérer.

Je ne sais même pas comment réagir à ce que j'ai appris au contact des Valkyries. J'avais conscience d'arriver chez des guerrières, mais je ne m'attendais pas à ce qu'elles se battent entre elles.

Hejà m'a paru être quelqu'un d'hypocrite, trop doucereuse pour moi. Le ton qu'elle utilisait pour parler avec sa fille ou toute autre personne m'a tout de suite laissé une désagréable impression. De plus, je suis certain qu'elle me connaît d'avant ma « dégringolade du paradis ».

Je ne sais pas comment expliquer cette sensation. Seulement, j'avais le pressentiment de déjà-vu lorsqu'elle s'adressait à moi, même par son attitude. D'ailleurs, en y repensant, elle m'a appelé Démétrius avant même que l'on me présente. Je me suis dit qu'elle avait dû le lire dans l'esprit de sa fille ou dans le mien. Cependant, Bry m'a confié ultérieurement qu'elle n'avait pas mentionné le nom des personnes du Daemonuis ou de The Divide, car elle n'avait aucune confiance en sa mère. Il y a quelque chose de louche là-dessous, mais je n'ai pas le temps pour cela.

Malgré tout, j'éprouve de la peine pour Bry, j'ai bien saisi que c'était une force de la nature. Pourtant, je n'avais pas conscience de tout ce qu'elle avait pu traverser dans son enfance. Les femmes avec qui j'ai discuté ont été plus que claires quant aux mauvais traitements qu'elle a reçus.

Même si beaucoup d'entre elles ne remettent pas en question les décisions de leur reine, un petit nombre semblait être attaché à leurs « mâles » comme elles les appelaient. Malgré cela, elles sont quand même descendues au village afin de tuer tous ces hommes ainsi que leurs familles. J'avoue que ça me dépasse, j'avais l'impression d'être entré dans une secte. Comme si elles n'étaient plus capables de penser de leur propre initiative, elles savent toutes que c'est mal, mais ne bougent pas plus pour cela.

Enfin bref, quand Bryrja a fait apparaître ce portail, je n'ai pas réfléchi et j'ai foncé à sa suite. Et maintenant que nous sommes encerclés, je me dis que ce n'était pas l'idée du siècle ou même du millénaire.

À mon avis, le fait que la guerrière ait amené plusieurs de ses comparses avec elle est sûrement ce qui a donné l'étincelle de cette comédie.

Imaginez-vous un géant qui arriverait avec une trentaine de femmes, uniquement vêtues par des jupes de cuir et un plastron en fer en guise de soutien-gorge, armée comme si elles sortaient d'un péplum. Sans oublier que celles-ci ont des peintures de guerres sur le visage et leur corps... bah même la plus pacifiste des créatures va avoir la peur de sa vie et soit il détale comme un lapin, soit il se bat.

Pas de bol pour nous, ils ont choisi la deuxième option. J'ai levé les mains en signe d'apaisement, mais rien n'y fait. Ils nous ont mis en joue à peine le pied posé sur le sol parisien. Et le pire, c'est que plus le temps passe et plus je suis certain que la situation va vite dégénérer.

Le négociateur exige que nous baissions nos armes, les filles imposent de même de leurs côtés. Je tourne la tête de droite à gauche, en espérant détendre le nœud que je sens se former dans mes cervicales.

C'est comme cela qu'à la périphérie de ma vision, je vois apparaître Sélène, Théo, Nicholas, une femme à la chevelure de feu et une petite blonde. De là, c'est le boxon total !

Un policier prend peur à leur arrivée pour le moins étrange, il tire, bientôt suivi par tous ses collègues. Dans la panique, je pense qu'ils n'arrivent pas à viser puisqu'ils ne nous touchent pas. Pourtant, je comprends très vite que ce n'est pas le cas, c'est juste que Nicholas et la rousse se sont positionnés devant nous. Je vois les balles ricocher sur ce que je suppose être un bouclier invisible. Seulement, ça n'arrange pas nos affaires, car les militaires ainsi que les forces de l'ordre sont effrayés et nous foncent dessus. Je vous ai dit que je ne sentais pas cette scène ?

Bah ! Voilà, je vous le répète, ça pue !

Nous ne sommes pas assez nombreux par rapport à eux. Ils ont l'avantage d'être en effectif plus important que nous, mais ils ont surtout des armes plus avancées technologiquement parlant.

Les arcs des amazones décochent des flèches à tout va sans que cela impressionne qui que ce soit. À part moi peut-être et encore.

Sélène et la petite blonde se dirigent vers les militaires et elles brûlent littéralement tout sur leur passage. Leurs mains envoient des flammes devant les hommes afin qu'ils se cachent dans leurs véhicules. C'est ce que j'imagine et elles aussi, je suppose, mais les êtres humains ne sont pas forcément logiques. Pour preuve, ceux-ci s'approchent avec des boucliers lorsqu'un éclair zèbre l'Arc de Triomphe. Qu'est-ce qu'il se passe encore ?

Je suis resté immobile, je ne prends pas part au combat, je ne veux pas me battre contre des êtres qui ne m'ont rien fait... J'en ai assez de ces tueries, en fait ! Je suis au milieu de cette folie et des images de mon passé me surviennent en boucle désordonnée alors que je sens des ailes me sortirent du dos. Je me tiens la tête tellement le film de cette vie est rapide et douloureux :

Moi, entrant dans Paris, à côté des soldats à la libération de la Deuxième Guerre mondiale. Toujours ma personne, pleurant avec eux, alors que les gens viennent se jeter sous les chenilles des tanks. Le bruit des os et des corps qui passent... je ne pourrai jamais oublier ce son horrible.

Moi, encore, des décennies plus tard, implorant un policier de ne pas frapper cet étudiant, qui est déjà à terre. Mais l'homme n'en a que faire et il le frappe alors que j'essaie de le ceinturer. Il se tourne et m'envoie son poing dans le visage. À chaque fois, je supplie une femme ou un homme de ne pas tuer en vain.

Je tombe à genoux, ces images n'ont pas de sens... Je suis arrivé sur terre, il y a des siècles de cela. Soudain, une douleur affreuse me vrille le crâne. Mon passé resurgit comme un boulet de canon dans ma mémoire. Je me souviens comment je suis devenu un ange déchu, comment j'ai fini en vampire et pourquoi Nuada m'a laissé littéralement tomber.

Je bascule, face en avant, je me laisse sombrer dans l'obscurité sans même chercher à me retenir. Alors que me parviennent les voix de mes amis à mes côtés, qui vocifèrent des mises en garde à ces gens qui nous considèrent comme des monstres. Par les mondes, si vous saviez...

Le mal n'a pas toujours le visage que l'on imagine. Un démon ne naît pas mauvais et un ange non plus, mais qu'en est-il alors de ces peuples qui se pensent supérieurs à nous ?

Daemonuis Heaven or Hell'sWhere stories live. Discover now