Lysandre - Partie I

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« Elle m'a porté en elle jusqu'à la vie et je la porte en moi à jamais. »

John Joos

Je ne pouvais même pas dire que j'avais attendu ce moment toute ma vie. Lysandre le pouvait. Moi pas.

            J'avais toujours eu une famille. Une mère, un père, un frère. Pas les plus aimants ni les plus bons. Mais je n'avais jamais senti de vide en moi. Du moins, pas avant la mort de ma grand-mère.

            À présent, j'étais assise face à un garçon qui me ressemblait trait pour trait. Un frère. Mais pas celui que je croyais. Un autre. Mon jumeau.

            Depuis que nous avions quitté la salle du trône pour pouvoir discuter plus tranquillement dans le salon privé de la reine, j'avais deux paires d'yeux braqués en permanence sur ma personne. L'une d'un bleu clair presque transparent, l'autre, d'un violet envoutant. Une couleur que je connaissais par cœur. Ma couleur.

            Seth n'était pas là. Je lui avais demandé de me laisser seul. Je savais que j'avais besoin d'affronter ce moment seul. De toute façon, sa présence n'aurait pas été appréciée par les souverains Argents. Mais je le savais pas loin, il attendait dans une des salles attenantes. Si le roi Émeraude assurait mes arrières, je pouvais en dire autant de Lysandre, qui avait marché si près de moi que j'avais senti son bras effleurer le mien à chacun de mes pas. Cette affection naturelle qu'il me vouait déjà emplissait mon cœur et toute mon âme d'une chaleur apaisante et d'une tranquillité que je n'avais jamais connue dans la Tour. J'avais l'impression que chacune des cellules de ma peau le reconnaissait.

            La reine s'était assise en face de moi, Augustin à sa gauche et Lysandre à ma droite. La reine m'observait calmement, le visage insondable. Ses fils n'arrivaient pas à masquer leurs émotions. La curiosité qui dévorait le visage du prince ainé et la dévotion qui se lisait sur celui de Lysandre était éclatante de naturel.

            Je me demandais ce que mon propre visage disait de mes émotions.

            J'essayais de ne rien cacher, moi qui avais appris à tout garder sous clé. Je me permis d'exprimer ce que je ressentais en cet instant. Peur, bonheur, tendresse, tristesse. J'étais face à ma famille. Mon sang. Je ne voulais pas avoir la même relation avec Augustin et Lysandre qu'avec Galaad.

            -Alors... Ma véritable mère est Maria Eléazar, fit soudain Lysandre, brisant le silence qui s'était installé.

            Lyria Astréa eut un bref mouvement de recul, mais elle se reprit bien vite.

            Elle l'avait élevée, elle était sa mère. Je ne devais pas l'oublier.

            -En effet claqua la voix froide de la reine.

            Lysandre se leva soudain, comme s'il était incapable de rester plus longtemps assis et se posta face à une fenêtre, nous tournant le dos.

            -Vous n'auriez pas pu me le dire ?

            Sa voix était aussi sèche que celle de sa mère.

             -J'ai grandi en sachant que ma mère n'était en réalité pas ma vraie mère, insista-t-il. J'ai grandi en sachant que j'étais à moitié Ivoirien. Vous m'aviez dit que ma mère biologique était une simple domestique Ivoirienne qui avait accompagné les hauts dignitaires et qu'elle est morte en nous donnant naissance. Et aujourd'hui j'apprends que, non seulement ma sœur est la princesse Era Eléazar, mais que je suis moi aussi un descendant des Eléazar. Que mon demi-frère règne sur cette famille et que ma véritable mère est encore en vie.

La Tour d'Ivoire - Tome 4Nơi câu chuyện tồn tại. Hãy khám phá bây giờ