Les dieux de jadis - Partie I

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"Le futur a été écrit pour être changé..."

L'Alchimiste - Paulo Coelho


         Amara Amjal avançait lentement, sa robe d'un blanc éclatant se mouvant avec délicatesse au moindre de ses pas. Ses longs cheveux noirs cascadaient librement sur ses épaules et venaient de temps en temps caresser la main d'Alexander Eléazar. Amara s'accrochait au bras de son ami, tandis qu'ils avançaient dans la petite allée qui menait à un petit autel de fortune fait de branches, de coquillages et de bois.

         À quelques mètres d'elle se tenait Maximilian Malkam. Vêtu de noir de pied en cap, il émanait de sa personne une assurance extraordinaire, une confiance si absolue en sa personne qu'elle avait séduit le monde entier.

         Il lui sourit, ses yeux d'un gris pluvieux la regardèrent avancer. Ses cheveux noirs étaient tirés en arrière, quant à sa cicatrice, elle disparaissait presque à la lumière du soleil. Amara ne voyait que lui.

         Elle ne voyait même pas son amie, Apolline Razane, qui avait accompagné Maximilian jusqu'à l'autel quelques minutes auparavant, elle ne voyait pas non plus Anastasia Dolora dont les joues rosissaient de plaisir face au bonheur de ses amis. Les deux femmes, à gauche de l'autel, regardaient leurs amis avancer vers un nouveau chapitre de leur vie. Plus en retrait, sa plus vieille amie, Eleanor, les regardait avancer avec un doux sourire.

         Amara n'avait jamais imaginé se marier un jour, pas dans ce monde, pas avec la condition actuelle des femmes. Mais a à peine 27 ans, ils étaient tous les cinq devenus maitre du monde, l'espoir d'une société en ruine.

         C'était perdu en plein cœur d'une forêt d'Europe centrale, qu'Amara et Maximilian avaient décidé d'unir leur vie. Accompagnés seulement de leurs quatre amis, ils avaient choisi de s'isoler quelques jours pour sceller leur amour.

         Amara ne s'était pas imaginé un mariage comme celui-ci, mélangeant tradition et nouveauté. Elle avait décidé de porter du blanc, Maximilian du noir, ils avaient choisi de sceller leur amour par deux anneaux, mais c'était Anastasia – qui venait de créer une nouvelle cérémonie maritale – qui les mariait. Ils avaient piqué dans chaque tradition, chaque religion, et avaient créé quelque chose de nouveau.

         Parfois, Amara regrettait de ne pas croire en un Dieu. Elle se souvenait de ses séjours chez sa grand-mère, en Algérie, elle lui parlait de prières chaque jour, de traditions et de devoirs. Maximilian aussi se souvenait de sa grand-mère, du dimanche où elle se rendait à la messe et de la pénitence qui était pour elle plus importante encore que le pain qu'elle mangeait chaque jour. Leur monde en ruine avait depuis longtemps banni toutes religions, et l'avenir qu'ils avaient imaginé ensemble n'en incluait pas non plus. Oui, elle aurait aimé croire. Mais elle n'y était jamais arrivée, elle jalousait ceux et celles qui y arrivaient encore. Elle les admirait, et pour elle, ils étaient d'une autre trempe, des sortes d'esprit qui voyaient au-delà des choses.

         Aucun de ses amis ne pouvait croire, alors ils étaient devenus les Dieux qu'ils n'arrivaient pas à prier. Ils avaient créé leur religion sur les cendres d'un monde qui avait depuis longtemps oublié le gout qu'avait la foi, c'est ainsi qu'ils étaient devenus immortels.

         Parfois, la jeune femme se demandait ce que sa grand-mère penserait de ce qu'elle était en train de faire, de l'influence qu'ils étaient en train de prendre, des techniques de manipulation qu'ils usaient chaque jour. Chacun d'entre eux avait étudié la psychologie, la sociologie et la philosophe, ils avaient utilisé la connaissance pour soumettre les autres. Amara en avait conscience, et elle savait, au fond d'elle, que c'était mal.

La Tour d'Ivoire - Tome 4Où les histoires vivent. Découvrez maintenant